Bolivie:

La vanité des réformistes

et des espoirs qu’ils suscitent

Pour nous, en tant que communistes marxistes-léninistes, l’internationalisme prolétarien constitue une partie intégrante de nos orientations. Cela implique la nécessité de consacrer l’effort correspondant, autant au domaine de l’analyse qu’à celui de l’action. Or, dans la période actuelle marquée par l’extrême faiblesse des liens organisationnels qui pourraient structurer un mouvement communiste marxiste-léniniste international, les possibilités de progresser dans ces domaines sont fortement limitées.

Sur le plan international, la politique mise en œuvre par Evo Morales et son mouvement, le MAS, a suscité un éventail assez large d’attitudes favorables, et le coup d’État qui a renversé le gouvernement a produit de multiples réactions hostiles. Mais rares sont les prises de position basées sur une appréciation correcte de la réalité et de ce que signifie être authentiquement antiimpérialiste dans le monde, aujourd’hui.

La période en question a fait ressortir certaines problématiques fondamentales qui caractérisent historiquement la situation de la Bolivie dans le cadre du système capitaliste impérialiste mondial. Il est important de les examiner, afin de mieux appréhender la nature de l’ennemi que doivent affronter le prolétariat et les masses exploitées et opprimées partout dans le monde, et de mieux identifier les voies à suivre pour mettre fin à la domination de cet ennemi.

C’est à cela que nous tentons de contribuer par le présent texte.

ROCML, juin 2020

Dans la même perspective, nous avons publié les textes suivants:

–        Considérations concernant certains aspects du système impérialiste mondial

        Une série de textes au sujet de la période qu’a parcouru le

         Venezuela

         depuis l’élection à la présidence de Hugo Chávez, en 1998.

Le présent texte est suivi d’une Annexe, qui fournit quelques données concrètes en rapport avec le sujet traité. Certaines de ces données sont reprises au cours de l’exposé, sans mention particulière; dans ces cas, les sources d’information utilisées sont indiquées dans l’Annexe.

 

 

Bolivie:
La vanité des réformistes et des espoirs qu’ils suscitent

L’accueil favorable que l’action du régime d’Evo Morales et du mouvement sur lequel il s’appuie, le MAS, a connu parmi un secteur assez large de militants repose essentiellement sur le fait que nombreux sont ceux qui, confrontés aux difficultés du combat jusqu’au bout contre la bourgeoisie, se réfugient dans la croyance en la possibilité d’arrangements réformistes. Et ils ont cru trouver avec la Bolivie une confirmation de leur vision optimiste. Or, l’image qu’ils se font de la réalité est le résultat d’idées préconçues, entretenues par une inclinaison à ne pas vérifier l’exactitude d’affirmations venant d’ailleurs, du moment qu’elles semblent conforter les espoirs que l’on nourrit.

Durant ses années comme président, Evo Morales a régulièrement affirmé que sa gestion, sur le plan économique, menait la Bolivie avec succès vers le niveau de développement des pays les plus avancés du continent. En exhibant la série de chiffres standardisée, canonisée par les organisations internationales telles que le FMI ou la Banque mondiale ‑ PIB [1], bilan du commerce extérieur, taux de pauvreté etc. ‑ il pouvait effectivement faire valoir des progrès considérables dans ces domaines, et les rapports émanant des dites organisations ainsi que d’autres analystes financiers allaient dans le même sens. Les efforts de développement reposaient essentiellement sur les revenus provenant de l’exportation du gaz, en second lieu de divers minerais, ainsi que, dans une moindre mesure, du pétrole et du soja. Et il est vrai que Morales a impulsé une politique ayant parmi ses objectifs l’amélioration des conditions de vie des couches les moins bien munies de la population. Un certain nombre de projets d’investissements dans des activités de transformation ont aussi été lancés.

Voici  quelques échantillons d’appréciations élogieuses qui circulent.

En 2008, est publiée un appel à la « solidarité avec le peuple bolivien et le gouvernement qu’il s’est choisi » [2]. Il affirme: « La politique de récupération de la souveraineté dans des domaines stratégiques de l’économie bolivienne (gaz, eau, biodiversité…), jusque-là livrés en grande partie aux multinationales, […] est le résultat concret de la lutte résolue des mouvements sociaux boliviens. Le processus démocratique et de transformation sociale en marche en Bolivie constitue un exemple, pour toutes les Nations et les Peuples. » Parmi les signataires se trouvent le PCF et le Collectif communiste Polex.

Le PRCF, en 2009, « félicite Evo Morales pour sa brillante réélection » et affirme son « soutien au processus anti impérialiste d’émancipation nationale et sociale en Bolivie et en Amérique Latine » [3]. En réaction aux évènements de novembre 2019, il se réfère à Morales comme « militant indien […] aux fortes convictions anticapitalistes » [4]. À la même occasion, le « Rassemblement communiste » évoque « l’exemplarité antilibérale de la Bolivie multinationale et bolivarienne de Morales: les secteurs publics nationalisés y étaient en consolidation […] » [5].

En novembre 2019 également, certains secteurs de la CGT expriment leur « soutien à tous ceux qui construisent et souhaitent poursuivre le projet vers une Bolivie socialiste et démocratique où la justice sociale, le partage des richesses et la souveraineté nationale restent les principales boussoles de l’action publique de l’État » [6].

Face aux présentations partiales, qui montrent la situation de façon artificielle sous un jour favorable, des points de vue divergents s’expriment également, notamment dans le sens de critiques qui se conçoivent comme « de gauche ». En ce qui concerne ces dernières, il s’agit en bonne partie de constats sommaires qu’on pourrait, à première vue, partager. Pourtant, ils servent en général à promouvoir des orientations politiques pour le moins défectueuses.

Nous exposerons plus loin notre point de vue, nullement conforme aux interprétations mal fondées en question. Mais pour arriver à une analyse correcte de la réalité, il faut en premier lieu se baser sur un examen concret des faits. Il n’est pas convenable de prendre simplement comme référence les positions exprimées par telle ou telle force politique comme par exemple le régime cubain.

La Bolivie, dans le passé autant que dans l’actualité récente, est marquée par une multiplicité de caractéristiques particulières, dont celles propres à la population autochtone et aux territoires de l’Amazonie. Dans ce qui suit, nous nous limitons à aborder sélectivement quelques aspects significatifs parmi d’autres, pour montrer en quoi les prises de positions telles que celles citées sont foncièrement erronées. Cette restriction laisse de côté en particulier un sujet qui est d’importance, celui du caractère affiché de l’État comme « plurinational ». Il est clair que dans les conditions de l’Amérique latine en général et plus particulièrement dans le cas de la Bolivie, la « question nationale » se pose de manière différente en comparaison à d’autres régions comme l’Europe, où les conflits de nationalité ne s’inscrivent pas dans le contexte historique des empires coloniaux. Or, la question des populations autochtones et de la façon dont les problèmes liés sont traités par le gouvernement, fait partie des aspects litigieux du prétendu « progressisme » du régime. Cependant l’analyse de cette problématique déborderait du cadre choisi pour le présent article.

Présence importante du capital impérialiste dans le secteur des hydrocarbures

Historiquement, en Bolivie, l’intervention de l’État dans l’industrie pétrolière a été soumise à des oscillations, passant par des étapes successives. En 1936 est créée la société d’État Gisements pétroliers nationaux de Bolivie (Yacimientos Petrolíferos Fiscales de Bolivia, YPFB). En 1937 le gouvernement expulse la Standard Oil, compagnie US jusque-là seule concessionnaire de champs pétroliers, et confisque ses biens. En 1969 le gouvernement reprend le contrôle des concessions qui entretemps avaient été accordées à la Gulf Oil, autre compagnie US. À partir des années 1980 s’effectue un processus graduel qui fait intervenir des groupes privés transnationales. Il aboutit sous la présidence de Gonzalo Sánchez de Lozada (1993–1997) à l’adoption de lois qui légitiment le transfert d’actifs, installations, activités d’exploration et d’exploitation de gaz et pétrole jusqu’au raffinage et la commercialisation, au bénéfice du capital international. La YPFB renonce à son monopole par la constitution de trois sociétés à capital mixte, 50 % public et 50 % privé: Chaco (avec Amoco), Andina (avec YPF, Pluspetrol, et Perez Companc), Transredes (avec Enron, Shell, British Petrol et Petrobras) [7]. Ces sociétés payent à l’État des royalties à hauteur de 18 %. Durant la deuxième présidence de Sánchez (2002-2003) la situation ainsi créée finit par provoquer des conflits sociaux et en 2003 éclate un mouvement de protestation massive [8]. Il est violemment réprimé, avec comme résultat la mort de plus de 70 personnes, Sánchez démissionne et s’enfuit aux USA. Son successeur Carlos Mesa engage un référendum au sujet d’un ensemble de mesures législatives concernant la YPFB et la propriété des ressources d’hydrocarbures. Les propositions sont approuvées par une large majorité. Le Congrès adopte alors une loi sur les hydrocarbures, qui, entre autre, prévoit pour le processus d’extraction, un impôt de 32 % s’ajoutant aux royalties de 18 %. Mesa refuse de ratifier la loi, ce qui renouvèle le conflit et conduit à la démission du président. Après une période de gouvernement de transition, des élections ont lieu en décembre 2005 et Evo Morales est élu par 53,7 % des votes (il avait été candidat aussi précédemment, aux élections de 2002).

C’est un fait qu’en mai 2006, le gouvernement de Bolivie adopte un décret au sujet des hydrocarbures qui fait intervenir le terme de « nationalisation » sur deux points [9]. En premier lieu il stipule que « dans l’exercice de la souveraineté nationale […] s’effectue la nationalisation des ressources naturelles en hydrocarbures du pays » et que « l’État récupère la propriété, la détention et le contrôle total et absolu de ces ressources ». Par ailleurs il stipule que « s’effectue la nationalisation du nombre d’actions nécessaires afin que YPFB contrôle au moins 50 % plus 1 dans les sociétés Chaco S.A., Andina S.A., Transredes S.A., Petrobras Bolivia Refinación S.A. et Compañía Logística de Hidrocarburos de Bolivia S.A.« , qui sont les sociétés à capitaux mixtes telles qu’elles s’étaient formées à partir des mesures en ce sens entamées par Sánchez de Lozada.

Ainsi le décret en question donne une portée fortement limitée au terme de « nationalisation ». Il faut souligner en premier lieu que cette « nationalisation » a pour objet les « ressources naturelles en hydrocarbures », c’est-à-dire les substances de cette catégorie, qu’elles soient encore enfouies dans le sous-sol ou extraites en vue de leur valorisation. La signification concrète de la phrase ressort de celle qui suit immédiatement, définissant le rôle de la société d’État YPFB chargée d’exercer ce contrôle: « YPFB, au nom et pour le compte de l’État, dans l’exercice plein et entier de la propriété de tous les hydrocarbures produits dans le pays, assume leur commercialisation en définissant les conditions, les volumes et les prix tant pour le marché intérieur que pour l’exportation et l’industrialisation. » Quant au contrôle majoritaire des sociétés mixtes, la procédure de « nationalisation » prévue consiste en une récupération partielle d’actions. Ce n’est qu’en cas de refus d’un arrangement mutuel de la part des actionnaires concernés que ceux‑ci devront céder la totalité des actions qu’ils détiennent.

Cette « nationalisation des actions » se fait par voie d’achat. Dans le cas de Chaco, Amoco n’accepte pas la révision du contrat, l’État acquiert donc la totalité des actions détenues par Amoco. En ce qui concerne Andina, la situation s’était modifiée depuis la constitution initiale de cette société: c’est Repsol-YPF, filiale du groupe espagnol Repsol, qui détient la participation privée de 50 % [10]. L’accord entre YPFB et Repsol-YPF se contente de transférer à YPFB 1,08 % supplémentaires du capital d’Andina. Par ailleurs sont maintenus les contrats conclus avec Repsol-YFB concernant l’exploration et la production.

Pour mettre en pratique l’objectif déclaré, le décret déclare la nécessité, pour les sociétés qui opèrent dans le pays, de négocier de nouveaux contrats de façon à ce qu’elles poursuivent leurs activités selon les modalités convenues. Si, pour une société donnée, les négociations n’aboutissent pas, elle ne sera pas autorisée à maintenir ses activités dans le pays.

Les sociétés qui effectuent des opérations d’extraction doivent remettre toute la production en propriété à YPFB, qui contrôle la commercialisation. Une partie des revenus qui en résultent est ensuite transférée aux sociétés dans des proportions établies par les contrats respectifs. Les montants revenant à l’État consistent comme avant des royalties de 18 % et d’un impôt de 32 %, mais s’y ajoute un autre montant, variable, qui dépend d’une formule spécifique. Dans les faits, la part des bénéfices revenant aux compagnies transnationales s’élève à environ 40 %.

La quasi-totalité de la production du pays résulte alors de l’activité des sociétés suivantes: Repsol, Petrobras, Total E&P Bolivie, YPFB et ses filiales (YPFB-Andina, YPFB-Chaco, YPFB- Petroandina), Pluspetrol, BG Bolivia, Vintage Petroleum, Petrobras Argentina [11]. Repsol occupe de loin la place prépondérante.

En résumé on constate:

– Le secteur des hydrocarbures est essentiel pour l’économie du pays.

– L’État exerce un « contrôle » dans le sens que YPFB, par l’obligation que la production lui soit remise, constitue le point de passage central dans la chaine d’exploration-extraction-commercialisation-répartition des revenus. Mais on est loin du verbiage au sujet du « contrôle total et absolu de ces ressources » figurant dans le décret de 2006.

– Les chiffres montrent, en ce qui concerne notamment Repsol, que les activités dans le pays sont tout à fait rentables, ce qui signifie que la spoliation de la part du capital impérialiste n’a nullement été jugulée.

L’État dans le secteur des minerais: capitaliste et minoritaire

En 2015, dans le secteur minier, l’effectif employé par l’État était de 7.575 sur un total national dans ce secteur de 135.529, c’est-à-dire 5,6 %. En 2005, les données correspondantes étaient de 117 pour l’État sur un total de 55.717, c’est-à-dire 0,2 %.

Les acteurs du secteur se composent de l’État, d’entreprises privées et de coopératives. La production, mesurée en valeur, se répartissait en 2017 de la manière suivante: l’État 7,2 %; les entreprises privées 57,2%; les coopératives 35,6 %. En 2005, les données correspondantes étaient les suivantes: l’État 0; les entreprises privées 55,1%; les coopératives 44,9 %.

En 2009 est adoptée une nouvelle Constitution Politique de l’État qui modifie notamment le régime concernant les ressources minières. Les principes appliqués sont similaires à ceux concernant les hydrocarbures. Antérieurement, les concessions d’extraction et d’exploitation étaient considérées juridiquement comme un bien immeuble, transférable. Elles sont remplacées par des contrats d’association qui prévoient notamment pour l’État une participation aux résultats de plus de 50 %. Cependant, une exception est accordée dans le cas de la mine de San Cristóbal qui garde le statut de concession privée. Dans ce dispositif, l’État est représenté par une société, la Corporation minière de Bolivie (Corporación Minera de Bolivia, Comibol). Les origines de la Comibol remontent à la formation d’un secteur nationalisé en 1952, mais postérieurement l’organisme avait été démantelé en gardant une existence purement formelle.

Un nombre réduit de gisements constitue la base principale du secteur minier (entre parenthèses, les sociétés ‑ transnationales ‑ qui opèrent dans les zones respectives): Huanuni (intégré à la Comibol en 2006), San Cristóbal (Sumitomo, japonais), San Bartolomé (Coeur d’Alene, US), Bolívar, Colquiri, Porco, Poopó (Glencore, suisse), San Vicente (Pan American Silver, canadien), Don Mario (Orvana Minerals, canadien).

Nationalisations à contrecœur

Après une période de cessions de mines à des sociétés privées, précédant la venue du MAS au gouvernement, l’intervention de l’État a été rétablie à l’égard de plusieurs mines à partir de 2006. Il s’agissait non pas d’une stratégie globale mais d’opérations politiques motivées par des conflits d’intérêts internes au secteur minier, pour le contrôle des gisements. Le gouvernement n’avait pas pour autant décidé d’éviter le recours aux sociétés transnationales. Pour lui, la conclusion d’accords avec des sociétés étrangères restait un moyen primordial dans l’objectif d’exploiter les ressources minières. Il se trouve que parfois le gouvernement mettait un terme à des coopérations entamées, cependant ce n’était nullement par détermination « antiimpérialiste », mais parce que contre son gré les affaires tournaient mal.

Huanuni

Durant la première moitié du 20e siècle, s’établit à Llallagua le centre minier le plus important de Bolivie, pour l’extraction de l’étain. En 1952 les mines furent nationalisées, la mine d’étain de Huanuni passait à occuper la place prépondérante, situation qui perdurait depuis. En 2000 elle fut privatisée, moyennant la signature d’un contrat avec une société britannique. Celle‑ci en 2002 se trouva en faillite, la procédure de liquidation conduisit au transfert des droits sur la mine, à des coopératives. En 2006 la mine est intégrée à la Comibol, à la suite de violents heurts opposant les 800 salariés de la Comibol à 4000 mineurs membres de coopératives.

De 2006 à 2009, Huanuni fournit 50 % de la production nationale d’étain. Mais des difficultés apparaissent, liées d’abord à l’augmentation brusque des effectifs de la Comibol consécutive à l’absorption de la mine (de 818 à 4.697 en 2008), ainsi qu’à l’épuisement des réserves, à la baisse du prix à l’exportation ainsi qu’à la construction de nouvelles installations.

Colquiri – Glencore

À partir de 1952, Gonzalo Sánchez de Lozada ‑ qui sera président de Bolivie de 1993 à 1997 ainsi que 2002 à 2003 ‑ crée diverses entreprises, dont la Compañía Minera del Sur (Comsur) en 1962 à partir de l’exploitation de la mine de Porco, et s’établit comme un des entrepreneurs les plus puissants dans le secteur de l’étain et du zinc. En 1990 le groupe britannique Rio Tinto acquiert 30 % du capital de la Comsur, qui développe des ramifications sur le continent sud-américain, notamment en Argentine et au Panama. En 1999 une partie des gisements de Colquiri est attribuée à Comsur en alliance avec une institution financière publique de la Grande-Bretagne. Le conflit en rapport avec la politique du gouvernement en matière de l’approvisionnement en gaz qui éclate durant le deuxième mandat présidentiel de Sanchez, amène celui-ci à s’exiler aux USA. Il conclut une transaction avec le groupe suisse Glencore International qui, moyennant un montage financier étalé entre 2004 et 2006, acquiert la Comsur, laquelle en cours de route change de nom en Sinch’ì Wayra. Sinch’ì Wayra contrôle alors les gisements de zinc, argent, plomb, étain, de Colquiri, Bolívar, Porco y Poopó.

En mars 2012 le gouvernement achève des négociations avec Glencore en vue de l’actualisation des contrats qui liaient autrefois la Comsur à la Comibol. Il est prévu que soit établie une association sur la base d’une répartition de 55 % pour la Comibol et 45 % pour la filiale de Glencore. Dans la zone concernée opèrent les coopératives « 26 de Febrero » constituée en 1987, et « 21 de diciembre ». En mai 2004 un groupe de mineurs des coopératives avait effectué une occupation des lieux pour réclamer l’attribution de nouvelles zones d’exploitation. En 2012, en mai un millier de mineurs membres de coopératives occupent la mine pour relancer leur demande. En juin, un accord est signé entre la Sinchi Wayra Colquiri Mining, le ministère des Mines, des représentants des coopératives, et la Fédération nationale de coopératives minières (Federación nacional de cooperativas mineras, Fencomin). L’accord indique que, avec l’approbation de la Comibol, la société Colquiri a pris la disposition de transférer à ces coopératives le filon qu’elles exploitent, ceci avec comme condition que toute la production de minerai brut soit vendue à la société. Néanmoins, la Fédération syndicale de travailleurs des mines (Federación sindical de trabajadores mineros de Bolivia, FSTMB) et les travailleurs de Colquiri, qui ne font pas partie de l’accord, continuent de faire pression et de négocier avec le gouvernement pour la « nationalisation de Colquiri » dans les jours suivants. Le gouvernement s’engage effectivement dans cette voie, en précisant qu’il respectera l’accord du transfert du filon aux coopératives et que la mesure n’affectera que le contrat avec Sinchi Wayra, et non celui avec les coopératives. Malgré le fait que la Fencomin a accepté l’accord, les coopératives de Colquiri poursuivent l’occupation de la mine, puis les salariés finissent par récupérer de force le terrain.

Indépendamment de ces complications, l’État maintient son alliance avec Glencore en d’autres lieux. Ainsi en 2013 la Comibol s’associe avec Sinchi Wayra pour opérer les gisements Porco (Potosí) et Bolívar (Oruro), sur la base d’un contrat avec une participation de 55 % pour l’État et 45 % pour Glencore. À cette occasion Sinchi Wayra change sa dénomination en Illapa. Outre la mine de Colquiri, Glencore avait aussi acquis auprès de Sánchez de Lozada l’Entreprise métallurgique Vinto (Empresa Metalúrgica Vinto). Celle-ci est reprise par l’État en 2007. Elle a pour principal fournisseur de concentrés de minerais l’Entreprise minière Huanuni (Empresa Minera Huanuni).

Mallku Khota – South American Silver

Le gouvernement procède en 2012 à une troisième nationalisation, celle du gisement de Mallku Khota, contrôlé par l’entreprise canadienne South American Silver à travers l’Entreprise minière Mallku Khota (Empresa Minera Mallku Khota). À la différence de Huanuni et de Colquiri, cette nationalisation a son origine non pas dans un conflit entre mineurs, mais un conflit opposant l’entreprise aux communautés paysannes autochtones désirant constituer leur propre entreprise communautaire. La mine est finalement nationalisée après des mois de conflits faisant un mort et des dizaines de blessés.

Mine d’Amayapampa

Amayapampa est un district où se trouvent des gisements d’antimoine et d’or. En 1994 la concession minière, initialement propriété de citoyens boliviens, est vendue à une société canadienne, Da Capo Resources, qui en 1996 s’unit avec une société US, Granges, pour former Vista Gold, laquelle à travers sa filiale Vista Gold Antigua intervient en Bolivie avec la société Minera Nueva Vista. Les démarches de Vista Gold se heurtent à la population autochtone, qui se mobilise pour défendre ses intérêts. Le conflit aboutit en décembre 1996 à une intervention de l’armée qui fait dix morts parmi la population (plus un commandant du côté des forces publiques) et des dizaines de blessés.

En 2008 la société australienne Republic Gold, qui opère en Bolivie à travers sa filiale Buena Vista, acquiert Vista Gold Antigua. Durant toutes ces années depuis 1994, sont effectués uniquement des travaux d’exploration, sans production quelconque. Le gouvernement garde une attitude d’expectative, ainsi en 2009 encore, le ministre des mines explique « ni l’entreprise ni le gouvernement » n’ont réussi jusqu’alors de convaincre la population d’accepter les opérations minières [12]. En 2012 finalement le gouvernement contacte Republic Gold pour discuter de l’éventualité de prendre en charge la mine. Cependant dans le même temps il déclare ne pas disposer encore des fonds d’investissements nécessaires. Puis cette même année, Nueva Vista Antigua change encore une fois de propriétaire, étant reprise par la société Lion Gold, basée à Singapour. La situation n’évolue pas pour autant et le gouvernement finit par décider en 2015 l’annulation de la concession minière, Lion Gold réagit en abandonnant le pays et laisse derrière elle une dette considérable envers les 280 travailleurs. L’année suivante le gouvernement s’engage à construire sur place une usine de traitement des minerais, mais il précise aussi qu’il ne prendra pas à son compte les rémunérations antérieures dues.

Le syndicat des mineurs d’Amayapampa exprime son mécontentement par la voix de son secrétaire [13]: « Nous exigeons que la mine passe entre nos mains, puisque même l’État ne peut pas la réactiver; donc, nous les travailleurs, nous allons faire l’effort de réactiver. » Il suggère qu’en créant une entreprise ils pourraient mettre en place des meilleurs procédés de travail. En octobre 2016 la Comibol lance de manière officielle les opérations à Amayapampa, en incluant 280 travailleurs, qui semblent ainsi trouver enfin satisfaction de ce qu’ils ont exigé en permanence. Or les péripéties se poursuivent. En octobre 2018 se tient une réunion entre les mineurs, le ministre des Mines, César Navarro, et le président de la Comibol, Zelmar Andia. Le gouvernement annonce qu’une commission de la Comibol étudiera la question. En juin 2019, parmi de multiples actions revendicatives de mineurs, les travailleurs d’Amayapampa manifestent pour réitérer leur demande ‑ que l’État consacre les investissements nécessaires pour réactiver la capacité productive du centre minier ‑ , et en aout ils se mobilisent à nouveau pour une manifestation. Puis, en septembre, le gouvernement reçoit les dirigeants de trois syndicats de mineurs, dont celui d’Amayapampa. Le feuilleton s’arrête là pour l’instant, à cause du coup d’État.

Sociétés minières transnationales

D’autres sociétés minières transnationales opèrent en Bolivie, sous le régime d’Evo Morales.

Mutún – Jindal Steel Bolivia/Sinosteel

Le gisement de fer El Mutún est localisé à l’extrême sud-est de la Bolivie, à la frontière avec le Brésil. C’est le second en importance en Amérique du Sud, après Cerra dos Carajás au nord-ouest du Brésil, et une des plus grandes réserves de fer au niveau mondial.

En 2007 est conclu un contrat entre la Comibol, l’Entreprise sidérurgique du Mutún (Empresa Siderúrgica del Mutún, ESM) et Jindal Steel Bolivia, filiale de Jindal Steel & Power, dirigé par Nabí Jindal. Au bout du compte, le contrat ne donne pas lieu à un investissement effectif à la hauteur de ce qui était convenu. Il est annulé en 2012. En 2015 le gouvernement entame des négociations avec des entreprises chinoises. En 2016 est conclu un contrat avec l’entreprise Sinosteel Equipment & Engineering. Le montant de l’inversion est financé à 85 % par un crédit de la part de la Chine, le reste par l’État. En aout 2019 il est annoncé que les installations entreront en production en 2022.

Coopératives

Dans l’activité minière, les coopératives occupent une place importante, à plusieurs égards. Ils emploient environ 160.000 personnes (qui n’apparaissent pas forcement dans les statistiques officielles), les techniques d’extraction sont rudimentaires, avec une productivité faible. Mais comme il s’agit principalement de mines aurifères, le résultat mesuré en valeur monétaire contribue fortement à la production totale du secteur minier.

Le nombre de coopératives minières augmente de 816 en 1997 à 893 en 2005, et en 2017 on compte 1.816. Concernant l’extension des zones de concession minières, la répartition selon les catégories est la suivante, en 2007: Comibol 12,72 %, entreprises 35,13 %, coopératives 2,05 %, unipersonnel 50,10 %. Le total couvre 2,36 % du territoire national. Et voici quelques chiffres concernant la répartition de l’investissement dans le secteur minier, entre sources publiques et privées (millions de dollars US): en 2006 respectivement 6,0 et 340,0; en 2015 187,6 et 180,0; en 2016 104,0 et 41,6; en 2017 113,3 et 252,8.

La politique appliquée par le gouvernement est orientée dans le sens de favoriser le secteur coopératif. En 2007 est adopté un décret qui déclare propriété public minière l’ensemble du territoire national, sans préjudice aux concessions en vigueur [14]. Étant donné l’incapacité pratique de l’État à assurer le respect de cette disposition, les activités sans autorisation prolifèrent. Par contre la consolidation des droits préconstitués est déclarée explicitement. Qui plus est, des mesures favorables au secteur des coopératives sont adoptées, notamment sur le plan de la fiscalité. Un fond de stabilisation des prix des minerais est créé, qui permet à l’État de subventionner les coopératives si les couts de production dépassent les prix internationaux. Par ailleurs, la loi de l’Environnement ne contient pas de dispositions concernant les activités minières. Par rapport à 2006 les surfaces couvertes par les coopératives avaient été multipliées par huit en 2013, et en cette dernière année est adoptée une loi visant à faciliter encore plus les contrats d’affermage.

La structure globale du secteur coopératif est caractérisée par l’existence d’un réseau qui introduit des relations intermédiaires plus ou moins souterraines: des coopératives sous-louent à d’autres, ce qui crée des rapports de sous-traitance; des coopératives ont recours à des sociétés privées pour la commercialisation vers l’extérieur. C’est une évidence que le gouvernement ne peut pas nier ouvertement.

Rafael Puente, ex‑vice-ministre du Régime Intérieur et de la Police dit [15]: « Tout le monde sait que les “coopératives” minières n’ont rien à voir avec des coopératives; en réalité, ce sont des entreprises, dont les propriétaires sont les soi-disant “associés” (et même pas tous) qui gèrent et exploitent une énorme masse de travailleurs […]. Autrement dit, ce sont des sociétés capitalistes du style d’exploitation le plus primitif, dont ce nouvel État plurinational est censé se libérer. »

Alfredo Rada, vice-ministre de Coordination des Mouvements sociaux, en 2014 [16]: « Au sein du système coopératif, des coopératives sont en train de se décanter qui, sous les effets de l’accumulation de capital, ont perdu leur nature initiale d’“institutions sans but lucratif”, en revêtant des formes d’entreprises propres au capitalisme sauvage. En leur sein s’accélèrent les processus de segmentation de classes entre les membres anciens et les “travailleurs bénévoles”, qu’on a aussi coutume d’appeler “pions” […]. Les premiers sont déjà une nouvelle fraction de la bourgeoisie minière, les seconds constituent la masse de la force de travail qui opère dans des conditions de précarité […]. »

En juillet 2015 surgissent au sein de l’Assemblée législative des interrogations au sujet des liens entre les coopératives et les sociétés minières privées. Certaines coopératives sont soupçonnées d’avoir conclu avec des sociétés des contrats de nature illégale au vu de la loi des mines qui avait été adoptée en 2014 [17], notamment dans les sens d’une association avec des entreprises privées nationales ou étrangères. Le débat le plus important concerne la faculté des coopératives à passer des accords avec les entreprises transnationales, ce qui permet à ces dernières de conquérir de nouvelles zones de travail tout en bénéficiant du caractère « social » des coopératives pour être exemptées de certains impôts et du contrôle environnemental. De telles possibilités sont inscrites dans la Constitution, mais leur institutionnalisation figurant dans un premier projet de loi des mines a engendré de vives critiques à tel point que les formulations en question ont été supprimées avant l’approbation de la loi au parlement. S’il n’est plus permis aux coopératives de passer des accords avec des sociétés transnationales, la nouvelle loi établit cependant que les contrats passés antérieurement sont maintenus. En outre les coopératives s’opposaient à la modification de la loi générale de coopératives minières, pour autant que cette modification a pour objet [18]: « Reconnaitre les droits dans le domaine du travail de toutes les personnes qui, sans être des associées, fournissent des services dans les coopératives minières ».

Dans ce contexte, en aout 2016 des affrontements violents opposent des membres de coopératives et les forces spéciales de police, ayant pour résultat cinq morts (dont quatre par balles) parmi les mineurs, ainsi que la séquestration du vice-ministre de l’Intérieur Rodolfo Illanes, qui meurt suite à des coups violents.

Le gouvernement mène une enquête qui confirme l’existence de contrats non conformes à la loi. Ces contrats avaient été conclus sur la base du Code des mines de 1997 [19]. En conclusion est adoptée une série de décrets. Concernant la question de la syndicalisation [20], sont préservés les cas préexistants où des syndicats incluent des adhérents qui ont le statut d’associé d’une coopérative, et est déclarée légale la constitution dans le futur, de syndicats dans les coopératives à activité de service. Les secteurs d’activité productive ne sont pas mentionnés. Un des décrets ordonne l’annulation des concessions minières impliquées dans des transactions entre coopératives et entreprises privées. Des concessions concernant la mine de San Bartolomé accordées à l’entreprise Manquiri sont effectivement annulées [21].

Cependant la problématique restera ouverte. Le gouvernement accorde des délais aux coopératives pour mettre en œuvre les mesures nécessaires, et parallèlement négocie avec la Fencomin, laquelle met en sourdine son opposition à la nouvelle législation. En octobre 2016 est adoptée une loi qui vise à clarifier le statut des coopératives en rapport avec la question des concessions [22]. Il contient des dispositions qui permettent des arrangements alternatifs avec les sociétés transnationales de sorte à préserver les intérêts de celles‑ci. Se maintient la figure existant des contrats de concessions, mais s’ajoute un nouveau type qui n’est pas soumis à la règle de participation à 55 % de l’État. Par ailleurs, est ratifiée la liberté accordée aux coopératives de contracter des salariés sans perdre leur caractère social en tant qu’entités sans but lucratif, ce qui préserve le statut spécifique concernant l’imposition. En décembre 2018 est adoptée une autre loi, qui instaure un nouveau type de contrat qui pourra être souscrit par la Comibol avec les coopératives minières, lequel permet aux coopératives de participer au développement de toute la chaine productif dans les zones de réserve nationale [23]. Dans la pratique, ce type de transactions était déjà en cours depuis 2013, sur la base d’une disposition transitoire.

Le secteur d’État de l’économie: capitaliste et minoritaire

En dehors des secteurs des hydrocarbures et des mines, le gouvernement a procédé à quelques autres expropriations, essentiellement dans le secteur de l’énergie. Cela ne change pas pour autant globalement la place de l’État dans l’économie.

La part de l’investissement public est certes élevée. Pour la période 2005-2014, elle oscille entre 44 % et 58 %, en 2015 (dernier donnée disponible) elle atteint 63 %. La part de l’investissement privé interne se situe entre 0 et 21 %, et la part restante vient de l’investissement direct étranger.

Le poids des principaux secteurs de l’économie est le suivant (% du PIB à prix courants, en 2018) [24]: services de l’administration publique 16,09 %; agriculture, sylviculture, chasse et pêche 11,48 % (pour la sous-rubrique produits agricoles industrielles 1,89 %); extraction de mines et carrières 10,93 %; industries manufacturières 10,34 %

En 2015, le nombre d’emplois dans le secteur public est de 387.926, pour une population économiquement active de 4.925.990 [25]. Dans ce total, le secteur prépondérant est celui de l’éducation, avec 177.536 emplois, tandis que les entreprises publiques comptent pour 16.366 emplois (en 2006 le nombre correspondant s’élevait à 1.022). Des données disponibles pour l’année 2012 fournissent une indication sur la structure interne de l’ensemble d’entreprises publiques, qui se caractérise par les faits suivants: le nombre total d’emplois s’élève à 11.251; cinq entreprises appartenant au secteur de l’extraction de ressources du sous-sol correspondent à 7.843 emplois, dont 1.631 pour YPFB (hydrocarbures) et 5.732 pour la Comibol (mines); sept entreprises appartiennent au secteur des services et correspondent à 2.710 emplois.

Quant à la structure globale de l’emploi, voici quelques indications.

La part de la population en âge de travailler [26] s’élève à 78 % de la population totale (données 4e trimestre 2016). Mais seulement 48 % appartiennent à la catégorie des personnes économiquement actives [27]. En distinguant la population urbaine et la population rurale, les parts des personnes économiquement actives sont respectivement 30,6 % et 17,4 %. Le régime se fait fier d’un taux de chômage qui est le plus faible en comparaison aux autres pays du continent latino-américain: ce taux, qui se mesure relativement à la catégorie des personnes économiquement actives, est de 4,5 % pour la population urbaine et de 0,8 % pour la population rurale. Un tel constat n’enlève en rien l’importance à d’autres caractéristiques de la situation, dont le travail dit « informel », catégorie spécifique à l’intérieur de la population ayant un emploi. Le gouvernement du MAS considère que la notion n’est pas pertinente, ce qui est vrai dans la mesure où en la matière les différents critères pour définir formellement une mesure statistique sont discutables. Mais qualitativement il s’agit d’un problème de premier ordre.

Divers faits indiquent l’ampleur de ce phénomène de précarité. En 2015 seulement 24,9 % de la population occupée disposent d’une certaine couverture d’assurance maladie [28]. À l’égard des bénéficiaires d’une pension de retraite, le taux est de 48,3 % pour les travailleurs salariés, de 5 % pour les indépendants, et pour l’ensemble des travailleurs, de 21,9 %: cette moyenne reflète la prépondérance numérique des travailleurs indépendants. L’activité des commerçants de rue (en fait dans la grande majorité, commerçantes) constitue un cas de figure parmi d’autres du travail informel. Par exemple, pour l’agglomération de El Alto, voisine de La Paz et comptant quelque 850.000 habitants, on estime à environ 70 % la part des personnes qui sont en situation de travail informel [29]. Par ailleurs, le travail d’enfants est répandu: en 2018, au sein de la population économiquement active les enfants de 7 à 9 ans comptent pour 6,1 %, et ceux de 10 à 13 ans pour 11,7 % [30].

Un discours politique qui penche vers l’imaginaire

D’un point de vue pragmatique, le calcul de Morales est simple: nourrir le budget de l’État grâce aux exportations des ressources minières en s’appuyant sur le capital privé national et extérieur, exhiber les taux de croissance ainsi obtenus et mettre en avant comme objectif la redistribution en faveur de la population. Or, en réalité prime la volonté de faire en sorte que la Bolivie conquière une position plus avantageuse dans la hiérarchie propre au système impérialiste mondiale. À cet égard, Morales n’hésite pas à prédire l’avenir en ayant recours à des projections statistiques téméraires. Dans un discours prononcé en aout 2019 en vue des élections présidentielles, il dit [31]: « Je suis presque sûr que d’ici à 15 ou 20 ans, la Bolivie, rappelez-vous, va être une puissance économique dans la région et peut‑être dans le monde. »

Dans le cadre de l’approfondissement du système capitaliste impérialiste mondial, certains pays en dehors des puissances impérialistes dominantes ont pu développer l’économie nationale de sorte à disposer de forces productives correspondant effectivement, du point de vue technique et organisationnel, au stade impérialiste du capitalisme. C’est le cas pour le Brésil, entre autres. Morales aurait voulu hisser la Bolivie au même niveau, mais il fait figure de grenouille qui veut être aussi gros que le bœuf.

Les problématiques liées à l’exploitation des gisements de lithium sont symptomatiques. À une certaine époque assez lointaine, était en vogue dans les pays dits « de la périphérie » une stratégie pour promouvoir le développement consistant à s’efforcer à remplacer les produits élaborés importés, par des produits fabriqués dans le cadre national. Morales visait plus haut. En 2018, il explique [32]: « Quand nous aurons la grande industrie du lithium, la Bolivie décidera le prix pour le monde, ce sera entre les mains des Boliviens. » Et il engage le projet d’une usine pour la fabrication de batteries au lithium, destinées à l’exportation vers l’industrie de l’automobile. Ainsi la prétention d’être « antiimpérialiste » tourne à la farce, et en s’engageant sur cette voie, la Bolivie subirait encore plus toutes sortes de contrariétés. La crise dans le domaine des sources d’énergies fossiles va de pair avec la crise du secteur d’automobile. Après un hypothétique essor autour des voitures électriques viendra une autre crise qui frappera les filières techniques qui auraient remplacé celles devenues obsolètes. Et en ce qui concerne le lithium, la situation est dès maintenant similaire à celle du pétrole. Après une hausse récente des prix du lithium, est venu un cycle de baisse. Et dans la perspective sur laquelle compte Morales, que le MAS reprendrait le gouvernement, il devrait réfléchir de plus près sur ce que peut signifier l’éventualité de décider le prix du lithium sur le marché mondial. Actuellement, se mène une guerre sévère sur le prix du pétrole, non pas à la hausse, mais dans le sens que la Russie provoque délibérément une baisse, dans l’espoir de ruiner les producteurs US, dont les couts de production sont plus élevés.

Morales, dans ses déclarations proprement politiques, afin de tracer un autoportrait susceptible d’enchanter quelques-uns, manie certains qualificatifs de façon totalement arbitraire [33]: « Actuellement, il y a beaucoup de présidents de tendance communiste marxiste-léniniste, j’en fais partie. » Et pour mettre en garde ceux qui seraient enclins à le croire sur parole, on peut faire remarquer qu’il a aussi parlé du « Frère Pape François, qui est anticapitaliste et anti-impérialiste » [34].

Néanmoins il dit parfois des vérités [35]: « Les nouvelles générations doivent réaliser qui sont les ennemis. Le capitalisme et l’impérialisme ne leur garantissent pas l’avenir. » Mais il n’en tire pas la conclusion qui s’impose: que la politique qu’il applique consiste à travailler main dans la main avec l’ennemi. Au lieu de cela, il se construit un discours qui prétend que c’est grâce à son rôle d’intermédiation que le capitalisme et l’impérialisme fournissent le moyen d’amener la Bolivie vers un futur heureux.

Si nous avons présenté dans toute la partie antérieure de cet article certains éléments d’analyse, c’est pour aider à apprécier à leur juste valeur les argumentations de Morales et des autres personnalités ayant déterminé les orientation de son régime.

Morales [36]: « Nous avons démontré que sans le capitalisme et sans le FMI nous pouvons avoir une Bolivie prospère. »

Voyons: « sans le capitalisme ». Sans même aborder la question de la nature des rapports sociaux de production, il est en tout cas évident que le gouvernement du MAS ne pouvait pas se passer des capitalistes.

Morales [37]: « Nous sommes passés d’un État colonial à un État plurinational à économie plurielle, où l’État se place à la tête de l’investissement, accompagné par le secteur privé, mais aussi par les secteurs associatifs comme les coopératives, les entreprises communautaires, familiales. »

Voyons encore: « l’État se place à la tête de l’investissement ». C’est vrai si on se limite à examiner les chiffres globaux comparés des investissements publics et privés, mais cela s’avère faux quand on examine la situation des secteurs déterminants pour l’économie ‑ l’extraction de ressources du sous-sol ‑, en termes statistiques et surtout d’un point de vue de la structure de l’appareil productif.

Et voyons encore: « l’État […] accompagné par le secteur privé, mais aussi par les secteurs associatifs […] ». Au vu de la réalité, il ne semble pas que le « secteur privé » conçoive son rôle sous la forme de « l’accompagnement » de l’État. Et les « secteurs associatifs » ne sont nullement en bon termes avec l’État, bien que le gouvernement cherche effectivement à les amadouer. En ce qui concerne en particulier les coopératives, qui entretiennent des relations conflictuelles avec le gouvernement, Morales s’en accommode. Un journaliste commente à ce sujet [38]: « Evo a coutume de dire qu’après le “manq’anaku” vient le “munanaku” (après la bagarre vient la réconciliation). Et cela s’est produit entre le MAS et la Fencomin. »

Mais Morales doit aussi assumer le personnage d’anticapitaliste et antiimpérialiste qu’il affectionne. Par conséquent il ne dit pas les choses franchement comme elles sont, mais expose un discours retors [39]:

« « Nous ne voulons pas arracher l’économie aux secteurs privés », a déclaré Morales […]. Il a assuré que les expropriations […] n’ont pas découragé les investissements en Bolivie car pendant ses sept années de gestion, la moyenne des capitaux étrangers est plus élevée que celle durant les sept années précédentes. « Nous avons nationalisé et les investissements ne se sont pas enfuies », a indiqué le président […]. […] Malgré ces chiffres positifs, le président n’a pas éludé les critiques envers la société d’État minière Colquiri pour les mauvais résultats obtenus après son expropriation à l’égard de la société suisse Glencore […]. « Si la nationalisation revient à produire moins, il n’y a aucune raison de nationaliser », a expliqué Morales, exigeant de meilleures performances de Colquiri, qui a réduit sa production, malgré l’augmentation de ses effectifs. »

Le vice-président, Álvaro García Linera, prend soin de développer des argumentations plus structurées. Il se caractérise lui-même comme « marxiste classique ». En 1986 il se trouvait parmi les fondateurs de l’Armée de guérilla Túpac Katari (Ejército Guerrillero Túpac Katari, EGTK) dont l’objectif était d’appuyer l’insurrection des autochtones. En 1992 il est appréhendé et incarcéré, libéré en 1997. Un autre dirigeant de l’EGTK, Felipe Quispe ‑ qui, lui, est resté fidèle à ses activités militantes jusqu’aux jours présents ‑ dit de García Linera [40]: « Il sera toujours un traitre, où qu’il soit et devant quiconque. […] Ce traitre est passé de l’armée de guérilla Tupak Katari (EGTK) aux tâches les plus détestables et les plus répugnantes et s’est incrusté au milieu du gouvernement du “Processus de changement”. »

García Linera, tenant compte des caractéristiques particulières de Bolivie, ne prend pas directement à son compte la perspective du « socialisme du 21e siècle » qu’avait promue l’ex‑président du Venezuela Hugo Chávez. Il conçoit le socialisme comme un objectif plutôt éloigné, dont on doit se rapprocher, en Bolivie, à travers le développement d’un « capitalisme andino-amazonien » [41]:

« […] nos forces seront fondamentalement dirigées vers la mise en œuvre d’un nouveau modèle économique que j’ai appelé, provisoirement, « capitalisme andin-amazonien ». En d’autres termes, la construction d’un État fort destiné à réguler l’expansion de l’économie industrielle, à extraire ses excédents et à les transférer vers le milieu communautaire pour favoriser des formes d’auto-organisation et de développement mercantile proprement andines et amazoniennes. […] Le triomphe du MAS ouvre une possibilité de transformation radicale de la société et de l’État, mais pas dans une perspective socialiste (du moins à court terme), comme le propose une partie de la gauche. »

García Linera précise la façon dont il conçoit le passage du « court terme » au futur plus éloigné, de la manière suivante [42]:

« La Bolivie est capitaliste au sens marxiste du terme, bien que pas pleinement capitaliste et c’est sa vertu. Cette particularité du capitalisme local […], nous l’avons appelé capitalisme andino-amazonien. […] les possibilités de transformation et d’émancipation de la société bolivienne vont en ce sens: à rééquilibrer les formes économiques non capitalistes avec les formes capitalistes, à favoriser ces formes non capitalistes afin que, au fil du temps, elles génèrent des processus de communarisation amplifiée qui permettent de penser à un post-capitalisme. Le post-néolibéralisme est une forme de capitalisme, mais nous pensons qu’il contient un ensemble de forces et de structures sociales qui, avec le temps, pourraient devenir post-capitalistes. »

C’est fort de cette conviction qu’il partage les prises de position de Morales au sujet des « accompagnants » bienvenus par l’État [43]:

« [García Linera:] « L’État bolivien doit contrôler l’épine dorsale du système économique, il doit laisser le travail ouvert, des zones de production pour d’autres secteurs sociaux tels que celui des entreprises, le secteur associé, celui des micro-entreprises, le secteur artisanal, le secteur agraire, le secteur paysan, celui coopérative, (l’État) doit permettre que d’autres secteurs croissent, se développent et fassent fructifier les ressources du pays et de l’État.«  »

Il ne nie pas les rapports conflictuels entre certaines composantes sociales au sein de la société. Mais loin de « prendre le taureau par les cornes », il tente de couvrir par des sophismes le fait que le régime s’oblige constamment à faire un grand écart pour s’assurer tant bien que mal le soutien de groupes aux intérêts fortement divergents [44]:

« Nous avons alors été confrontés à un problème entre des camarades qui nous ont demandé de nationaliser et d’autres qui nous ont demandé de tout « coopérativiser ». [Cf. plus haut, Colquiri, juin 2012. Nous avons passé 20 jours tristes et dangereux où des affrontements entre frères se sont présentés, mais heureusement, le dialogue a prévalu et nous avons trouvé, au moyen de méthodes démocratiques révolutionnaires, le chemin correct pour résoudre ces contradictions, qui ne sont pas antagonistes mais au sein du peuple ‑ récupérant ainsi les concepts du grand président chinois Mao Tsé-toung, un guérillero socialiste et marxiste du XXe siècle, dont nous devrions lire particulièrement les textes militaires. »

Le coup d’État et l’impérialisme mondial

Concernant le coup d’État perpétré en octobre dernier, il est clair qu’il a été manigancé par le gouvernement US, et exécuté avec son appui direct. Mais ce constat ne rend pas véridiques toutes sortes d’interprétations subjectives qui déforment la réalité. Affirmer que « le capital aujourd’hui doit à toute force empêcher que les gouvernements socialistes et progressistes trouvent des solutions » [45], n’a pas de sens au sujet de la Bolivie, puisque « le capital » ‑ du moins certaines fractions du capital national et international ‑ était pleinement impliqué dans les soi-disant « solutions » que le gouvernement de Morales mettait en œuvre. D’un autre côté les complaintes formulées par Morales et son ex‑ministre de l’Économie Luis Arce décrivent les évènements de façon tronquée [46]. « Le coup d’État […] s’est produit […] pour le lithium. Il a été conçu par des sociétés transnationales intéressées en sa privatisation, ensemble avec le gaz […]. » « Maintenant, le gouvernement de facto de la Bolivie veut remettre notre lithium entre les mains des transnationales US. » On a vu plus haut que les ressources naturelles en Bolivie n’ont nullement fait l’objet d’une « nationalisation » dans un sens authentique, donc il ne peut pas être approprié de parler de « privatisation ». Par ailleurs il ne s’agit pas d’une affaire d’opposition bilatérale entre la Bolivie et les USA. Les enjeux se situent au niveau de la concurrence interimpérialiste mondiale.

Les impérialistes US eux-mêmes n’en font pas un secret. Le site Internet « Dialogue » [47] publie dans sa rubrique « Menaces transnationales » un article « Des entreprises chinoises exploiteront le lithium bolivien », et aussi un article « Les origines de la façon de procéder de la République populaire de Chine en Amérique latine et dans les Caraïbes ». On lit [48]: « La politique de Beijin concernant l’Amérique latine et les Caraïbes est basée sur la puissance économique de la Chine, ce qui a amené de nombreux observateurs à affirmer que son influence croissante dans la région avait des objectifs économiques, elle était donc bénigne. Cependant, le Comité permanent du Politburo (CPBP) du PCC, noyau de la direction de la République populaire de Chine (RPC), met en œuvre une stratégie ambitieuse utilisant divers instruments politiques, économiques, psychologiques et militaires pour parvenir à l’hégémonie mondiale. »

Certes, une idée répandue considère que l’attitude de la Chine se distingue fondamentalement de celle des USA: ceux‑ci incarnent l’ennemi impérialiste, tandis que la Chine intervient pour le bien des peuples. Il est vrai que la présence économique de la Chine en Bolivie s’est faite jusqu’ici principalement par la construction d’installations associée à des financements par voie de crédits, et non pas sous forme d’investissements directs. Mais il n’y pas de séparation mécanique entre les deux aspects. Le régime vénézuélien en fait l’expérience, dans ses rapports avec la Chine comme aussi la Russie, qui est également un partenaire économique important dans le secteur pétrolier. Fortement endetté auprès de ces deux pays et économiquement exposé à des difficultés extrêmes, le gouvernement est amené à explorer d’éventuels remèdes partiels, qui impliquerait à accorder une influence plus grande aux créditeurs. Ainsi en 2016, le gouvernement vénézuélien a affecté 49,9 % des actions de Citgo Petroleum, filiale ‑ établie aux USA ‑ de la société d’État Petróleos de Venezuela (PdVSA), comme garantie pour un crédit de 1.500 millions de dollars US accordé par le groupe pétrolier russe Rosneft [49].

Le secteur des coopératives, une plaie ouverte dans la fiction « progressiste »

L’attitude du gouvernement au sujet des coopératives s’est constamment basée sur l’appréciation de principe qu’il s’agit d’un secteur important de l’appareil productif et qu’il fallait le maintenir comme tel. À cet égard la réalité était une source évidente de conflits sévères et récurrents. Mais les actions du gouvernement pour y faire face ont en permanence été guidées par le seul objectif de contenir les affrontements entre les diverses parties prenantes, au lieu de chercher une solution à ce qui, en vue du progrès social dans un sens authentique, constitue le problème fondamental: les conditions d’exploitation et de misère que subissent une grande partie des travailleurs des mines du secteur coopératif.

Notamment, le gouvernement a toujours pris soin d’entretenir autant que possible des relations privilégiées avec la Fencomin. Au départ du régime, en 2006, Villarorel, ex‑président de la Fencomin et associé de la mine La Salvadora, a été nommé ministre des Mines. Il était en fonction durant le conflit entre membres des coopératives et des salariés à Huanuni en octobre 2006 (cf. plus haut). Ultérieurement, se sont produits des moments de tension fortes entre le gouvernement et les représentants des coopératives (cf. plus haut, Manquiri), mais le gouvernement a maintenu la politique de mesures favorisant le secteur, moyennant de multiples avantages financiers et des élargissements des concessions de zones d’exploitation.

D’ailleurs, des deux côtés les déclarations exposant les affinités ne manquaient pas. En novembre 2013, Morales atteste que [50] « le soutien que je reçois des mineurs membres de coopératives vient de 2005, à partir de cette date, elles sont des “alliés naturels” et de caractère “inconditionnel” du processus de changement ». Et il met les points sur les i: « Si quelqu’un veut ignorer le coopératisme minier, il devra changer la Constitution politique de l’État ». Le président de la Fencomin de l’époque, Alejandro Santos, lui rend le compliment: « Nous, les coopératives minières et les 150 mille mineurs membres de coopératives avons toujours soutenu notre président, parce que la politique de notre président est excellente, ce qui, auparavant, n’avait pas été le cas. » À la même époque, Artemio Mamani, dirigeant de la Fédération régionale de coopératives minières de Potosí Nord a déclaré: « Nous garantissons que nous ferons des ravages aux élections de 2014. »

Le MAS a pu s’appuyer sur des représentants des coopératives de diverses manières: Pascual Guarachi (président de la Fencomin, vice-ministre du Transport, chef du groupe parlementaire MAS), Benito Rodríguez Carvajal (membre de coopérative, vice-ministre de l’Emploi, des Services sociaux et des Coopératives), José Luis Chorolque (vice-ministre des Coopératives minières, dirigeant de la Fédération départementale de coopératives minières d’Oruro), ainsi que certains députés.

Au-delà des généralités, le gouvernement ne manque pas de souligner en quoi concrètement les coopératives lui doivent leur reconnaissance. Ainsi, Álvaro García Linera, parlant en l’occurrence comme président en exercice ‑ Morales se trouvant à l’étranger ‑ dit en mai 2014, au sujet de la nouvelle loi des mines et de la métallurgie qui vient d’être promulguée [51]: « Avec cette disposition, les coopératives minières deviennent des “producteurs de première catégorie” et pourront accéder à des filons importants. Le système coopératif n’a jamais eu droit à des zones importantes et riches en minéraux. C’est fini. »

Le gouvernement va jusqu’à préserver des ambigüités intentionnelles des législateurs permettant de contourner les contraintes jugées indésirables [52]. « Le président de la Chambre des sénateurs, José Alberto Gonzales, cité dans un communiqué de presse, a expliqué jeudi, lors du débat au Sénat, qu’en aucun cas les zones ne sont retirées aux coopératives et qu’il ne s’agit pas d’une attaque contre les mineurs membres de coopératives. “Tous les mineurs membres de coopératives […] ont leurs activités absolument garanties, tant qu’elles ne transmettent pas leurs concessions à des entreprises privées”, a‑t‑il dit. Il a ajouté que la disposition est si “large” que même si une entreprise privée est détectée “utilisant un camouflage” d’une coopérative minière, elle peut se transformer en une société d’une autre caractéristique, être régie par le Code de commerce et continuer à fonctionner. »

De même, pour ceux qui pourraient craindre des contrôles, le président de la Comibol José Pimentel précise d’avance qu’existent plus de 500 contrats avec des coopératives et qu’il n’est de toute façon pas possible de les inspecter et de les fiscaliser car « elles sont dispersées dans tout le pays et ce qui a été priorisé sont les contrats liés aux sociétés transnationales » [53].

On peut supposer que parmi les raisons à cette attitude bienveillante figurent des considérations pragmatiques d’électoralisme. Mais plus fondamentalement elle s’intègre dans la conception globale au sujet de l’objectif de la « redistribution des richesses », qui est intentionnellement façonnée selon une structure décentralisée, formulée officiellement: « un modèle productif basé sur la captation des rentes extractives de forme directe par les secteurs populaires » [54]. Quoi qu’il en soit, quant au fond, la persistance des problématiques liées au secteur des coopératives provient du fait que le régime est tout simplement incapable de trouver une solution.

Le cas exposé plus haut des mineurs d’Amayapampa illustre cette situation, en particulier un discours prononcé en décembre 2019 par Morales, devant une délégation de ces mineurs venus remettre à la Banque central un lot de lingots d’or fruit de leur travail. Morales insiste lourdement sur le fait que tout projet d’inversion doit être basé sur une étude et un plan établissant les perspectives de faisabilité et d’utilité. Cette exigence est justifiée. Mais telle que la situation se présente concrètement, pour les mineurs les paroles de Morales équivalent au rejet de leur demande de soutien, du simple fait que manifestement ni le gouvernement ni la direction de la Comibol ne sont en capacité d’élaborer un tel projet, ni de trouver une alternative permettant de montrer à ces travailleurs que le régime promeut le « progrès ». Pire ‑ voilà ce que Morales se permet de suggérer: « Et j’aimerais que les travailleurs de la Comibol travaillent comme moi, dès cinq heures du matin [55]; quand je veux faire travailler dès cinq heures du matin, le syndicat bloque, déclare la grève. Je veux vous dire, camarades de la COB (Centrale ouvrière bolivienne – Central Obrera Boliviana), de la Fédération (la FSTMB), vous avez l’obligation d’appuyer la façon de refonder la Comibol, si nous voulons aller de l’avant, si nous voulons que nos entreprises d’État réalisent des bénéfices. »

Certains, tout en critiquant le régime de Morales, se font complices du réformisme

La trajectoire qu’a traversée la Bolivie à partir de l’élection de Morales comme président fournit une fois de plus la matière à un certain type de dénonciation consistant à condamner l’intervention malfaisante de l’impérialisme ‑ en visant principalement les USA ‑ et à appeler à la défense de la souveraineté nationale du pays. On sait que l’invocation de ce principe général est souvent accompagnée de diverses réserves motivées par des scrupules de la part de ceux qui s’y réfèrent, parce qu’ils ne veulent pas soutenir ouvertement le régime concerné (voir par exemple le cas de la Syrie). Quant à la Bolivie, le contexte politique général ainsi que les résultats effectifs obtenus par le régime dans le domaine économique incitent certains à promouvoir des positions plus tranchées, en faveur de Morales.

Ceux qui en France présentent Morales comme dirigeant montrant la voie à suivre pour aller vers le progrès, transposent vers les pays dominés par l’impérialisme la vision réformiste ancrée historiquement en Europe. Le marxisme montre clairement qu’un pays capitaliste comme la France ne peut pas passer aux rapports de production socialistes au moyen de réformes mises en œuvre dans le cadre de l’État existant, et cela même si elles iraient jusqu’à inclure un changement formel de constitution. Dans le cas d’un pays comme la Bolivie, il n’est pas question de socialisme (du moins pas explicitement, même si l’idée flotte dans les têtes). L’illusion réformiste est dans ce cas reportée sur les rapports avec l’impérialisme environnant: il serait possible, par voie de réformes appliquées à l’intérieur, d’affranchir le pays, non pas de la nécessité d’entretenir des rapports économiques avec les pays impérialistes, mais de faire en sorte qu’il s’agisse de rapports qui respectent la souveraineté nationale et qui ne comportent pas d’éléments négatifs.

De cette illusion ‑ préexistant comme arrière-plan des opinions adoptées ‑ découle la tendance à présenter la réalité de façon schématique, simplifiée, faisant abstraction de tout détail qui brouillerait le tableau: ce n’est qu’ainsi que l’adaptation en question, du réformisme, peut paraitre crédible.

Quant au PCOF, les évènements en Bolivie lui fournissent une occasion d’égrener les formulations en vogue notamment du côté du PCF, au sujet de l’antilibéralisme, la souveraineté nationale, l’oligarchie financière [56]:

« Depuis 2006, la Bolivie s’était engagée dans une voie antilibérale et de souveraineté nationale en opposition en particulier avec les intérêts de l’Impérialisme américain. […] Cela a provoqué un mécontentement, que la droite, comme dans d’autres pays d’Amérique latine a instrumentalisé. Nous condamnons ce coup d’Etat réactionnaire des représentants de l’oligarchie financière bolivienne qui avec l’armée et la police, main dans la main avec l’impérialisme Yankee, veulent non seulement prendre leur revanche sur les masses populaires et les communautés indigènes, mais écraser toute velléité de progrès social et de souveraineté nationale. »

Ce genre de prise de position est associé en général à quelques réserves, pour éviter le reproche de fermer les yeux devant la réalité. Ainsi le PCOF [57]:

« Des avancées ont été réalisées. Mais elles se sont accompagnées de concessions faites par le gouvernement aux possédants, du développement du clientélisme et de la répression de mouvements de contestation qui portaient les revendications justes des indigènes, des secteurs populaires. »

D’autres, tel le NPA, expriment explicitement la vision politique correspondant à cette façon de mélanger des constats « diversifiés ». Ainsi, au sujet de la Bolivie il explique, en 2013 [58]:

« […] la mobilisation actuelle […] doit d’abord et en premier lieu imposer à Morales et au processus actuel un indispensable “coup de barre” à gauche. […] La revendication d’une “vraie nationalisation” des hydrocarbures pourrait, aujourd’hui, constituer une bannière politique autour de laquelle structurer une gauche porteuse d’une critique anticapitaliste – une gauche qui, tout en faisant bloc avec le gouvernement lorsque celui-ci s’attaque aux privilèges des élites économiques, serait également capable de proposer une voie alternative face aux renoncements de l’exécutif, comme face à la bureaucratisation rapide de la nouvelle élite politique qui a accompagné Morales au pouvoir. »

Et [59]:

« Morales qui va concourir pour un troisième mandat en 2014 se trouve plus que jamais à la croisée des chemins: renforcer le processus démocratiquement en allant plus loin contre la bourgeoisie et l’impérialisme ou risquer de voir les avancées des dix dernières années s’effondrer. »

Les perspectives de la lutte antiimpérialiste

Il faut dire que l’incapacité du régime de trouver une solution à ces casse-têtes découle intrinsèquement des principes de base qui sous-tendent le système économique ‑ capitaliste ‑ tel que le régime lui-même le maintenait en existence.

Au-delà des constats critiques, il faut se prononcer sur les perspectives possibles.

Du point de vue du marxisme-léninisme, il n’est pas admis de tricher avec la réalité. L’état actuel des choses, déterminé par les caractéristiques autant de la société bolivienne que du système capitaliste impérialiste mondial, rend illusoire ‑ c’est-à-dire irréalisable ‑ l’amorce d’une transformation allant vers l’instauration de rapports de production socialistes en Bolivie. Karl Marx a démontré que la domination des rapports de production capitalistes et le développement des forces productives qu’ils impulsent, a rendu possible le passage à des rapports sociaux dépourvus de la division en classes. Simultanément ce système capitaliste fait que le rôle d’avant-garde dans la révolution socialiste revient au prolétariat. L’état présent de la société en Bolivie ne permet pas d’aller en ce sens actuellement.

Pour analyser correctement cette question, l’expérience du mouvement communiste de l’époque de l’Internationale communiste doit être prise en considération. Elle ne peut pas fournir des réponses directes toutes faites, puisque le contexte a subi des modifications considérables depuis, à différents niveaux. Mais elle donne des repères à la réflexion justement si on met en regard les réalités objectives et subjectives de l’époque antérieure et de celle actuelle.

Le Programme de l’Internationale communiste adopté par le 6e Congrès mondial, le 1er septembre 1928, comporte une partie sur « la lutte pour la dictature mondiale du prolétariat et les principaux types de révolutions », où figurent les considérations suivantes [60]:

« Pays coloniaux et semicoloniaux (Chine, Indes, etc.) et pays dépendants (Argentine, Brésil et autres) possédant un embryon d’industrie, parfois même une industrie développée, insuffisante toutefois dans la majorité des cas pour l’édification indépendante du socialisme; pays où prédominent les rapports sociaux du moyen âge féodal ou le “mode asiatique de production” tant dans la vie économique que dans sa superstructure politique; pays enfin, où les principales entreprises industrielles, commerciales, bancaires, les principaux moyens de transports, les plus grands domaines, les plus grandes plantations, etc., sont aux mains de groupes impérialistes étrangers. La lutte contre le féodalisme et contre les formes précapitalistes de l’exploitation et la révolution agraire poursuivie avec esprit de suite, d’une part; la lutte contre l’impérialisme étranger, pour l’indépendance nationale, d’autre part, ont ici une importance primordiale. Le passage à la dictature du prolétariat n’est possible dans ces pays, en règle générale, que par une série d’étapes préparatoires, par toute une période de transformations de la révolution bourgeoise-démocratique en révolution socialiste; le succès de l’édification socialiste y est, dans la plupart des cas, conditionné par l’appui direct des pays de dictature prolétarienne. »

Deux phrases à souligner: « Le passage à la dictature du prolétariat n’est possible dans ces pays, en règle générale, que par une série d’étapes préparatoires. » Exprimée ainsi, comme une généralité, l’affirmation est justifiée dans le cas de la Bolivie. Il est du devoir des marxistes-léninistes de formuler concrètement en quoi les étapes consisteraient actuellement. « Le succès de l’édification socialiste y est, dans la plupart des cas, conditionné par l’appui direct des pays de dictature prolétarienne. » De cette affirmation, on peut déduire indirectement celle qui signifie que l’édification socialiste est impossible en Bolivie en l’absence de pays de dictature du prolétariat.

Par conséquent la tâche des communistes marxistes-léninistes est double. D’une part, impulser et conduire la lutte des masses laborieuses contre l’exploitation et l’oppression exercée par la bourgeoisie nationale et internationale. Sous cet angle l’indépendance nationale économiquement parlant est un leurre. D’autre part, préparer les conditions qui rendront possible la prise du pouvoir pour l’instauration de la dictature du prolétariat, préalable à la mise en œuvre du passage à la société socialiste.

Ces énoncés sont abstraits. Le fait est que les difficultés à surmonter sont grandes, et que les forces des marxistes-léninistes dans les différents pays sont largement insuffisantes pour passer de la volonté subjective à la capacité de porter objectivement la lutte de classe à un niveau plus élevé. Mais une chose est certaine: il est extrêmement dommageable de se rendre complice des illusions réformistes, au sujet des gouvernements « progressistes », de la « souveraineté nationale », de lʼ« antiimpérialisme » confiné à des arrangements opportunistes avec telle ou telle fraction du capital.

Et il est certain aussi que, vue de l’intérieur de la Bolivie, la voie vers la victoire de la classe ouvrière sur la bourgeoisie ne passe pas par un soutien aux efforts du MAS de retrouver une place au gouvernement, sous prétexte que ce serait une alternative préférable à la prédominance des forces réactionnaires actuellement au pouvoir.

 

Annexe

Secteur hydrocarbures

Secteur minier

Données

La Corporation minière de Bolivie (Corporación Minera de Bolivia, Comibol)

Le contexte politique durant le 20e siècle et les antécédents de la Comibol

Le secteur des coopératives

Coopératives Cerro Rico

Expropriations

Expropriations dans le secteur de l’électricité

Expropriations diverses

Emploi

Gouvernement

 

 

Secteur hydrocarbures

Exportations d’hydrocarbures [61]
(Q en millions de tonnes et V en millions de dollars US)

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Q

V

Q

V

Q

V

Q

V

Q

V

Q

V

16

2.060

16

2.291

17

3.549

13

2.135

16

3.015

17

4.149

2012

2013

2014

2015

2016 (p)

2017 (p)

Q

V

Q

V

Q

V

Q

V

Q

V

Q (p)

V

20

5.910

23

6.683

24

6.675

24

4.033

22

2.221

21

2.734

 

(p): données préliminaires.

Secteur minier

Données

Emploi secteur minier [62]
selon la catégorie des unités d’exploitation
(E: État, M: industrie privée moyenne, P: industrie privée petite, C: coopératives)

 

E

M

P

C

total

2005

117

3.100

2.350

50.150

55.717

2015 (p)

7.575

4.694

1.900

121.360

135.529

 

(p): données préliminaires.

Production de minerais concentrés (valeur, dollars US) [63]

 

 

2005

2006

2007

2008

 

 

 

industrie d’État

total

8.346.769

111.774.728

146.462.705

dont:

 

 

 

 

étain

8.346.769

111.774.728

146.462.705

zinc

cuivre

 

industrie privée
moyenne

total

347.351.187

624.852.412

783.595.111

1.279.030.956

dont:

 

 

 

 

zinc

162.742.802

365.403.663

437.074.251

546.375.337

argent

47.823.349

72.512.485

125.170.349

393.506.629

or

77.816.537

126.073.715

123.957.405

142.112.159

 

industrie privée
petite
et coopératives

total

283.441.379

517.406.391

581.727.988

585.946.473

dont:

 

 

 

 

zinc

57.137.146

201.172.281

235.927.468

162.371.677

argent

50.901.236

101.992.323

103.463.836

125.462.563

étain

84.695.710

92.048.641

78.339.001

118.733.387

 

total

 

630.792.566

1.150.605.572

1477097827

2.011.440.134

Production de minerais concentrés (valeur, dollars US) – suite

 

 

2009

2010

2011

2012

2013

 

 

 

État

total

137.285.309

206.083.492

261.111.316

232.446.681

286.316.496

dont:

 

 

 

 

 

étain

135.845.996

199.433.237

249.830.828

214.829.947

248.001.499

zinc

8.425.329

27.840.035

cuivre

1.439.313

6.650.255

8.833.218

7.146.931

9.272.238

 

industrie privée

total

1.412.255.484

1.693.936.876

2.341.818.851

1.961.507.277

1.768.896.338

dont:

 

 

 

 

 

zinc

611.192.875

753.031.234

795.944.826

611.599.502

599.479.524

argent

498.587.016

645.293.067

1.080.415.670

915.342.956

745.800.859

or (1)

112.935.680

36.322.411

80.330.502

92.673.406

111.751.168

 

coopératives

total

491.677.952

733.807.995

1.190.584.996

1.214.309.746

1.328.209.813

dont:

 

 

 

 

 

argent

128.938.338

161.006.328

288.699.536

292.240.629

252.202.838

zinc

110.676.856

138.327.547

148.285.307

139.684.644

158.174.762

or (1)

102.622.193

215.844.253

477.885.551

551.264.563

664.661.145

 

total

 

2.041.218.745

2.633.828.363

3.793.515.163

3.408.263.704

3.383.422.647

 

Note: à partir de 2009, la distinction entre catégories a été adaptée aux dispositions générales définies par la Constitution politique de l’État adoptée en 2009.

(1) Chiffres estimées pour la période 2010 à 2013.

Production de minerais concentrés (valeur, dollars US) – suite

 

 

2014

2015

2016

2017 (p)

 

 

 

État

total

315.383.836

246.019.283

237.253.250

301.222.123

 

dont:

 

 

 

 

 

étain

271.934.482

203.418.284

193.112.126

244.284.583

 

zinc

27.992.175

29.909.136

33.009.348

44.228.140

 

cuivre

12.415.355

9.885.267

9.432.989

10.891.125

 

industrie privée

total

1.854.983.849

1.498.674.725

1.758.727.090

2.384.044.375

 

dont:

 

 

 

 

 

zinc

712.185.012

618.530.708

784.525.038

1.231.144.808

 

argent

613.524.813

506.522.250

616.992.987

578.431.766

 

or (1)

243.821.472

132.946.211

106.755.478

231.541.016

 

coopératives

total

1.260.141.586

1.140.169.063

1.214.457.675

1.483.479.643

 

dont:

 

 

 

 

 

argent

213.015.863

153.417.080

127.419.557

91.820.449

 

zinc

232.631.268

208.814.419

197.794.730

248.266.414

 

or (1)

582.322.200

601.338.139

726.257.449

962.518.665

 

total

 

3.430.509.271

2.884.863.071

3.210.438.015

4.168.746.140

 

(1) Chiffres estimées pour la période 2014 à 2017.

 (p): données préliminaires.

Exportation de minerais – quantité et valeur (en kg et dollars US) [64]

 

2005

2006

2007

 

Quant.

dollars US

Quant.

dollars US

Quant.

dollars US

Total

277.651.728

546.273.094

304.793.698

1.071.544.266

387.869.889

1.385.777.196

Zinc

149.848.051

198.696.308

178.377.730

547.498.870

210.457.917

691.730.563

Étain

16.374.817

123.366.145

17.054.312

144.422.479

14.100.505

205.846.196

Or

5.358

77.712.628

6.573

126.096.510

5.566

122.906.701

Argent

399.385

92.285.077

478.999

172.118.459

520.094

223.842.366

Antimoine

5.204.111

17.678.263

5.460.366

26.776.895

3.881.303

21.215.626

Plomb

10.848.598

10.621.286

11.989.799

14.609.715

21.566.387

60.836.986

Wolfram

669.225

7.427.497

1.093.999

16.387.941

1.395.484

21.983.257

Cuivre

34.745

130.922

218.041

1.270.879

606.223

4.436.206

Bismuth

43.928

282.860

154.830

1.118.456

146.695

4.725.015

Cadmium

Fer

308

170

26.600

840

Manganèse

381.150

28.682

41.520

6.000

259.796

38.031

Autres

93.842.052

18.043.256

89.890.928

21.237.223

134.929.919

28.216.248

 

Pour les lignes du zinc au bismuth, les quantités sont exprimées en kilos fins (c’est-à-dire en matière pure), pour les lignes du cadmium au manganèse en kilos nets, pour la ligne « autres » en kilos.

Exportation de minerais – quantité et valeur (en kg et dollars US) – suite

 

2008

2009

2010

 

quantité

valeur

quantité

valeur

quantité

valeur

Total

578.810.899

1.952.204.453

644.858.182

1.853.248.706

656.906.185

2.459.458.034

Zinc

385.612.444

738.474.627

428.958.604

688.811.333

412.768.208

892.484.210

Étain

15.323.523

284.028.788

17.608.525

235.161.550

17.787.069

350.283.812

Or

5.072

142.121.970

4.019

113.548.375

3.631

142.430.227

Argent

1.110.437

525.083.778

1.324.092

609.601.416

1.275.194

799.580.625

Antimoine

3.905.068

23.848.600

2.990.072

15.514.826

4.980.096

41.928.798

Plomb

83.117.545

170.255.853

84.879.803

138.861.587

73.320.930

156.809.565

Wolfram

1.447.569

22.795.852

1.290.460

17.828.776

1.517.572

21.335.680

Cuivre

730.891

5.526.590

666.541

3.665.174

2.012.315

14.087.646

Bismuth

55.049

1.357.171

54.208

885.879

87.061

1.520.426

Cadmium

Fer

450

24

18.000

1.180

Manganèse

663.125

104.588

97.656

9.570

8.488.533

1.978.847

Autres

86.840.176

38.606.635

106.983.753

29.360.196

134.647.576

37.017.019

Exportation de minerais – quantité et valeur (en kg et dollars US) – suite

 

2011

2012

2013

 

quantité

valeur

quantité

valeur

quantité

valeur

Total

763.992.631

3.474.569.139

677.144.233

3.741.289.787

739.317.470

3.104.006.459

Zinc

426.849.200

946.453.878

373.909.442

722.642.593

399.207.370

762.374.735

Étain

17.223.152

453.810.439

16.337.024

341.231.629

16.539.362

370.147.938

Or

6.727

284.194.184

26.972

1.121.283.914

13.229

577.320.372

Argent

1.224.652

1.379.817.486

1.186.668

1.184.610.650

1.289.841

1.007.664.014

Antimoine

3.954.129

56.740.576

5.038.672

64.058.902

5.052.648

51.682.790

Plomb

99.962.933

240.968.972

77.363.109

157.396.699

78.961.603

168.298.133

Wolfram

1.417.592

19.898.879

1.345.005

18.830.070

1.580.342

30.172.999

Cuivre

3.449.262

29.252.850

9.101.759

69.945.472

8.597.702

63.530.925

Bismuth

61.659

1.620.167

10.156

221.024

20.089

388.816

Cadmium

Fer

7.100.000

1.244.545

13.348.000

899.862

2.679.978

361.053

Manganèse

10.809.993

2.584.954

2.693.715

761.340

718.660

187.335

Autres

191.933.332

57.982.208

176.783.712

59.407.633

224.656.646

71.877.351

Exportation de minerais – quantité et valeur (en kg et dollars US) – suite

 

2014

2015

2016

 

quantité

valeur

quantité

valeur

quantité

valeur

Total

797.317.225

3.945.185.325

831.299.556

2.865.924.064

912.617.331

3.074.453.735

Zinc

458.034.747

987.260.615

443.115.360

868.803.185

480.242.659

982.713.341

Étain

16.612.904

365.494.489

16.452.452

267.744.353

17.145.005

301.329.417

Or

33.793

1.382.586.159

19.978

746.262.544

19.289

769.339.984

Argent

1.346.340

833.271.906

1.313.901

667.694.320

1.341.891

731.945.138

Antimoine

4.185.540

39.042.475

3.842.758

28.660.310

2.669.041

16.973.847

Plomb

76.037.962

160.466.082

74.731.613

133.943.050

87.882.029

162.349.305

Wolfram

1.578.499

28.449.500

1.856.422

22.258.674

1.399.433

14.392.970

Cuivre

10.785.037

74.401.708

10.060.885

56.996.798

7.916.431

37.898.701

Bismuth

141.367

3.434.238

19.941

293.235

57.337

546.703

Cadmium

Fer

18.425.535

1.845.039

24.453.000

1.603.872

2.939.922

25.169

Manganèse

75.000

22.275

Autres

210.060.500

68.910.839

255.433.245

71.663.722

311.004.296

56.939.160

 

2017 (p)

 

quantité

valeur

Total

1.006.766.847

3.898.822.030

Zinc

500.803.737

1.433.873.954

Étain

16.592.473

334.084.527

Or

26.352

1.065.513.823

Argent

1.204.290

660.664.219

Antimoine

2.881.003

23.506.605

Plomb

111.168.337

256.181.265

Wolfram

1.280.384

16.727.354

Cuivre

7.283.262

43.846.549

Bismuth

76.826

772.302

Cadmium

Fer

38.330.059

799.483

Manganèse

Autres

327.120.124

62.851.948

 

(p): données préliminaires.

Exportation de métaux – valeur (en dollars US) [65]

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

 

 

Total

193.661.054

270.492.893

325.001.717

443.026.794

454.223.140

536.665.458

dont

 

 

 

 

 

 

Étain

99.572.527

118.172.945

173.110.907

228.733.755

203.632.191

289.658.505

Or

78.670.494

127.012.606

122.568.338

141.541.487

113.266.993

94.004.773

 

2011

2012

2013

2014

2015

2016

 

 

Total

1.021.201.414

687.224.402

892.622.196

1.886.913.818

1.113.248.724

1.172.461.337

dont

 

 

 

 

 

 

Étain

385.345.928

291.454.960

333.789.748

345.319.451

251.327.756

293.694.842

Or

264.971.965

90.034.157

330.810.772

1.359.203.714

723.880.158

741.946.354

 

2017 (p)

 

 

Total

1.511.855.966

dont

 

Étain

332.056.963

Or

1.058.007.578

 

(p): données préliminaires.

Investissements dans le secteur minier, en millions de dollars US [66]

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017
(p)

total

293,2

346,0

315,0

519,6

203,9

292,7

298,7

329,5

292,5

313,7

367,6

145,6

366,1

publique

5,7

6,0

46,7

41,8

112,3

73,0

60,3

110,6

141,5

106,5

187,6

104,0

113,3

privé

287,5

340,0

268,3

477,8

91,6

219,7

238,4

218,9

151,0

207,2

180,0

41,6

252,8

 

(p): données préliminaires.

La Corporation minière de Bolivie (Corporación Minera de Bolivia, Comibol) [67]

La Comibol comprend les unités suivantes:

–    Empresa Minera Huanuni – EMH (concentrés d’étain)

–    Empresa Minera Colquiri – EMC (concentrés d’étain et de zinc)

–    Empresa Minera Coro Coro – EMCC (cuivre métallique raffiné)

–    Unidad Productiva Amayapampa (oro)

–    Empresa Metalúrgica Vinto – EMV (fonte de minerais d’étain)

–    Empresa Metalúrgica Karachipampa – EMK (plomb et argent métalliques raffinés)

–    Empresa Minera Quechisla (bismuth métallique raffiné)

–    Empresa Boliviana del Oro (fonte d’or)

–    Empresa Minera Capuratas (soufre)

Il faut préciser que l’énumération inclut des installations dont le degré d’activité effective peut être limité.

Le contexte politique durant le 20e siècle et les antécédents de la Comibol

Formes initiales du coopérativisme, création de la Comibol [68]

Des formes de coopérativisme apparaissent dans les années 1929-1932, en lien avec la crise qui éclate à l’époque et entraine des fermetures de mines et des licenciements de travailleurs. Dans la ville de Potosí, il y avait plus de 10.000 mineurs au chômage qui demandaient des zones de travail. Dans la mesure où il réussissait à en obtenir, ils s’organisaient sous la forme de coopératives.

Le gouvernement de facto de José David Toro (1936-1937) crée la Banque minière de Bolivie (Banco Minero de Bolivia) dans le but d’appuyer le secteur minier. En 1945 une loi promulguée sous le gouvernement de Gualberto Villarroel prévoit que les mines abandonnées seront reprises par la BMB et que celle‑ci les transfère prioritairement au secteur privé et en affermage aux coopératives. Plus tard en 1954, dans un autre contexte, des travailleurs organisent des coopératives quand la Aramayo Mines ferme la mine dans la région de Tipuani-Tora.

En 1952, sous la première présidence de Víctor Ángel Paz Estenssoro (1952-1956, suivront deux autres, 1960-1964, 1985-1989) le secteur des mines est nationalisé. Est créée la Corporation minière de Bolivie (Corporación Minera de Bolivia, Comibol), entreprise qui exerce le contrôle de toute la chaine productive: exploration, exploitation, raffinerie (concentration et fonderie), commercialisation, exportation. Sous la présidence de Siles Zuazo (1956-1960), le gouvernement applique une politique de réduction du budget de l’État, impliquant une réduction des salaires et les licenciements de travailleurs. Les mines de Bolsa Negra et Kami sont converties en coopératives sous tutelle de la Comibol; celle-ci se limite au rôle de mono-producteur d’étain. Suit une nouvelle présidence d’Estenssoro (1960-1964). Aux élections présidentielles de mai 1964, Estenssoro se représente avec comme vice-président le général René Barrientos Ortuño. Les forces d’opposition boycottent le scrutin, Estenssoro est élu, mais en novembre Barrientos effectue un coup d’État et instaure une Junte militaire qui en mai 1965 met en place un co‑gouvernement dirigé par Barrientos et le général Alfredo Ovando Candía. En 1969 Barrientos meurt dans un accident d’hélicoptère, lui succède le vice-président Luis Adolfo Siles, lequel est renversé par un coup d’État effectué par Alfredo Ovando.

Durant cette période de dictature est imposée une restructuration de l’économie. Les travailleurs de la Comibol sont licenciés puis peuvent être réembauchés selon des modalités nouvelles, les gisements sont transférés aux coopératives ou en affermage. L’exploitation des mines Matilde et Bolívar ainsi que des résidus minières d’un certain nombre de mines est transférée à des sociétés transnationales [69]. En 1966 est créée la Empresa Nacional de Fundiciones (ENAF) qui comprend une fonderie d’étain opérant à partir de 1971 et une Fonderie d’antimoine opérant à partir de 1975 [70].

Ernesto Guevara

Après avoir disparu de la scène publique pendant un certain temps, Ernesto Guevara entre en Bolivie en franchissant la frontière sous une fausse identité en novembre 1966.

Voici comment il formule le raisonnement qui motive sa volonté d’organiser la lutte armée en Bolivie [71]:

« En Amérique latine, on lutte les armes à la main au Guatemala, en Colombie, au Venezuela et en Bolivie, et les premiers signes se manifestent déjà au Brésil. Il y a d’autres foyers de résistance qui surgissent et s’éteignent. Mais presque tous les pays de ce continent sont mûrs pour une pareille lutte, qui pour triompher exige pour le moins l’instauration d’un gouvernement de tendance socialiste. »

Des citoyens cubains, boliviens, péruviens et argentins le rejoignent, faisant un total de 47 combattants, qui agissent sous le nom d’Armée de libération nationale de Bolivie (Ejército de Liberación Nacional de Bolivia, ELN). Les affrontements armés commencent en mars 1967. Les forces boliviennes en septembre capturent un grand nombre de combattants, d’autres sont morts au combat. En octobre, Guevara est capturé avec ses partisans et est assassiné le 9 octobre.

Une succession de régimes imposés par les militaires

Ovando renonce à la présidence en 1970, lui succède un autre militaire, Juan José Torres. Le nouveau gouvernement met en place un Congrès de la COB (Centrale ouvrière bolivienne – Central Obrera Boliviana) et une Assemblée populaire qui annonce une vision socialiste pour l’État bolivien. La Comibol fait l’objet d’une réorganisation dans la perspective de redevenir le pôle dirigeant du secteur minier, reprenant les mines Matilde, Bolívar et Catavi [72].

Nouveau coup d’État en 1971, effectué par Hugo Banzer. Il se trouve progressivement en difficulté et décide en 1978 de convoquer des élections en présentant comme candidat le général Juan Pereda Asbún. Les élections se déroulent dans un contexte de fraude évidente, au point qu’elles sont annulées. Banzer déclare alors remettre le pouvoir à l’armée, et Pereda Asbún est désigné pour assumer l’exercice. Aussitôt, en novembre 1978, intervient un autre coup d’État qui instaure une junte militaire dirigée par le général David Padilla Arancibia, des élections sont convoquées pour 1979. Hernán Siles Suazo obtient le nombre de voix le plus élevé, mais aucun candidat obtient la majorité nécessaire pour être élu, il revient au Parlement de désigner le président. Est désigné le président du Sénat, Wálter Guevara Arze, pour un intérim avec pour mission de convoquer des élections. Or, en novembre 1979 le général Alberto Natusch Busch effectue à son tour un coup d’État. Son régime dissout le Congrès.

Il se produit un soulèvement populaire impulsé par la COB. La répression est extrêmement violente, marquée notamment par le massacre de Todos Santos, causant la mort de 100 personnes et 30 disparus. La résistance, au bout de 16 jours, oblige Natusch Busch à remettre le pouvoir au Congrès, lequel élit la présidente de la Chambre des députés Lidia Gueiler Tejada comme présidente par intérim, jusqu’à des élections en juin de l’année suivante.

À l’approche de l’échéance, Luis García Meza prend le pouvoir par un coup d’État. Il démissionne en 1981, lui succède le général Celso Torrelio Villa. Le secteur de l’armée lié à García Meza tente un coup d’État, qui échoue et provoque la chute de Torrelio Vila et son remplacement par le général Guido Vildoso Calderón.

En septembre 1982, la COB déclenche une grève générale, la dictature s’écroule et le pouvoir est remis à un Congrès national composé comme en 1980, celui‑ci valide les élections de 1980 et désigne Hernán Siles Suazo comme président. Celui‑ci est appuyé par Unidad Democrática y Popular (UDP), l’alliance qu’il avait formée à la fin des années 1970 entre son mouvement, le Movimiento de Izquierda Revolucionaria (MIR), ainsi que le Movimiento Nacionalista Revolucionario de Izquierda (MNR‑I) et le Partido Comunista de Bolivia (PCB).

Siles Suazo démissionne en aout 1985, lui succède Paz Estenssoro. Celui-ci émet aussitôt un décret [73] qui décentralise la Comibol, les employés de plus de 65 ans sont mis à la retraite, 27.000 sont licenciés par la Comibol ainsi que 5.000 du côté du secteur minier privé.

En 1986 la ENAF constituée en 1966 (cf. plus haut) est transformée en la Empresa Metalúrgica Vinto (EMV), qui fonctionne comme entreprise avec personnalité juridique propre et autonomie de gestion.

Comme conséquence de la réduction d’activités à la Comibol à partir de 1987, est prévu que les licenciés du district de Colquiri forment des coopératives afin de recevoir en affermage des parcelles du gisement [74]. Dans ces circonstances nait en septembre 1987 la coopérative « 26 de Febrero » comprenant 320 associés fondateurs [75].

Le code des mines adopté en 1997 [76] transforme la Comibol en une entreprise d’administration de contrats et de locations. Les mines de San Vicente, Cerro Rico, Huanuni, Colquiri et Caracoles et la Fundición de Vinto se trouvent transférées à des sociétés transnationales, tandis que Bolívar et Porco sont reprises par Sánchez de Lozada, le reste revient à des coopératives. Ultérieurement Sánchez de Lozada récupère aussi Colquiri et Vinto.

Dès 2000 la Comibol ne compte plus qu’une seule unité productive, son effectif est formé par 117 employés.

Le secteur des coopératives

Extension des zones de concessions minières
en pourcentage du total, selon les catégories, en 2007 [77]

 

nombre

Surface

 

km2

% du total

% du territoire national

Total

10.168

25.841

100

2,36

Comibol

1.763

3.288

12,72

0,30

Entreprises

1.730

9.077

35,13

0,83

Coopératives

318

531

2,05

0,05

Unipersonnel

6.357

12.945

50,10

1,18

Nombre de coopératives minières [78]:

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

816

823

828

831

840

849

862

880

893

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

911

959

1.048

1.170

1.240

1.369

1.507

1.631

1.663

1.790

1.806

1.816

Selon les commentaires du vice-ministre de Coopératives minières, en 2018 le nombre de coopératives registrées s’élevait à environ 1600, et dépassait 2000 en mai 2019 [79].

Contrats entre la Comibol et les exploitants miniers
nombre et pourcentage de la surface totale concernée, en 2005 [80]

 

Nombre

Type

km2

%

Total

128

 

489,22

100,00

Coopératives

97

affermage

184,86

37,79

Entreprises

15

4 de risques partagés,
11 en affermage

303,40

62,02

Petites entreprises,
Cerro Rico de Potosí (1)

16

affermage

0,96

0,19

 

(1): inclut la mine San Bartolomé exploitée par la Empresa minera Manquiri.

Classification des coopératives minières en contrat avec la Comibol
par quantité de production et valeur (en tonnes métriques fines et millions de dollars US),
pour 2004 [81]

 

Nombre

Quantité

Valeur

 

 

%

 

%

 

%

Total

97

100

39.582,1

100

53,3

100

> 500 tmf

12

12,4

34.349,0

86,8

34,2

64,2

100 – 385 tmf

17

17,5

4.321,3

10,9

14,7

27,6

10 à 99 tmf

24

24,7

837,1

2,1

4,0

7,5

< 10 tmf

23

23,7

74,7

0,2

0,4

0,7

sans production

21

21,6

Production des coopératives minières en contrat avec la Comibol
par rang de production et de minerai (en tonnes métriques fines), pour 2004 [82]

 

zinc

étain

argent

plomb

cuivre

wolfram

bismuth

anti-

moine

Total

32.386,3

5.441,4

212,0

1.236,0

42,4

187,2

55,5

21,3

> 500 tmf

30.273,6

3.958,2

102,6

14,6

0,0

0.0

0,0

0,0

100 – 385 tmf

1.894,6

1.047,9

85,2

1.150,7

0,0

87,4

55,5

0,0

10 à 99 tmf

198,2

404,9

20,9

70,7

42,4

87,4

0,0

12,6

< 10 tmf

19,9

30,4

3,3

0.0

0.0

12,4

0,0

8,7

Coopératives du Cerro Rico

Durant les années 1540 les Espagnols prennent connaissance des gisements du « Cerro Rico », qui se trouvent à proximité de la ville de Potosí. Celle‑ci, selon un certain document, aurait été officiellement fondée en 1545, cependant les datations sont incertaines.

Les conditions que connait la population de la région depuis l’apparition de l’exploitation minière selon les rapports de production capitalistes sont symptomatiques de la situation qui caractérise globalement le secteur des coopératives dans la société bolivienne.

Selon un constat fait en 2019 par un dirigeant de la Fédération départementale de coopératives minières de Potosí (Federación Departamental de Cooperativas Mineras de Potosí – Fedecomin), près de 10.000 personnes exercent une activité d’exploitation minière dans le périmètre du Cerro Rico [83]. La Fedecomin réunit 52 coopératives registrées, dont un peu plus de 30 disposent de zones de travail faisant partie du gisement.

Voici deux extraits d’articles de journaux datant de la période durant laquelle le MAS et Evo Morales étaient au gouvernement.

En 2010 [84]:

« Les « coopérativistes » qui recherchent des minerais au Cerro Rico font presque toutes leurs tâches à la main, dans une atmosphère contaminée par des gaz toxiques qui en tue beaucoup après seulement 10 ans de travail. Sans se laisser impressionner par l’arrivée des touristes et autres curieux, les mineurs de Potosí travaillent dans des tunnels qui, dans de nombreux cas, ne font qu’un mètre de diamètre, où ils glissent vers les veines de zinc et d’argent qu’ils exploitent avec de la dynamite, sans plus de protection que quelques mètres de distance. L’espérance de vie du travailleur de la mine de Potosí est très courte et, avec un peu de chance, certains parviennent à passer 50 ans, mais très affaiblie par la silicose, une maladie qui affecte le système respiratoire et qui est causée par les poussières inhalées. »

En 2012 [85]:

« Le Cerro Rico de Potosí continue d’être exploitée aujourd’hui, bénéficiant à quelque 15.000 mineurs de 37 coopératives qui extraient quotidiennement 2.000 à 3.000 tonnes de minerai, qui sont transformés dans des usines propres ou tiers. Le type d’exploitation est rudimentaire et prédateur en raison de la contamination causée à la fois par les déblais épais et les sables qui contiennent des résidus des réactifs utilisés. »

Expropriations

Expropriations dans le secteur de l’électricité

Dans le choix des cibles visées par des mesures de nationalisation, le secteur de l’électricité a été considéré comme particulièrement important. La principale idée directrice a été de revenir sur la politique de privatisations qui a touché le secteur dans le passé. En 1962 avait été créée la Empresa Nacional de Electricidad (Ende), société publique à capital entièrement détenu par l’État, chargée de produire et transporter de l’énergie électrique selon les objectifs fixés par un Plan national d’électrification [86].

De 1992 à 1997 des privatisations ont été mises en œuvre, selon des modalités variées. En ce qui concerne Ende, ont été créées trois sociétés mixtes dont le capital est partagé entre un apport de 50 % souscrit par les travailleurs et dont la gestion a été attribuée à des sociétés d’administration de fonds de pension, et une participation de 50 % apportée par des investisseurs privés. Il s’agit des sociétés suivantes, opérant dans le domaine de la génération d’électricité: Corani, Guaracachi, Valle Hermoso. Dans le domaine de la distribution d’électricité est constituée une quatrième société, dénommée Transportadora de Electricidad (TDE). Sur cette base, l’État transfère les actifs concernés au secteur privé moyennant de contrats de concession. Avec ce processus, Ende perdait l’essentiel de sa substance.

Les quatre entités mentionnées ci-dessus étaient parties intégrantes de Ende avant d’en être séparées moyennant le processus de privatisation des années 1990. À l’époque existaient aussi dans le secteur de l’électricité d’autres sociétés, entièrement ou partiellement contrôlées par des capitaux privés. C’est le cas des trois sociétés de distribution suivantes: Elfec, Electropaz, Elfeo.

Par la série d’expropriations mises en œuvre en 2010-2012, ces sociétés sont intégrées à Ende: Corani, Guaracachi, Valle Hermoso, Elfec, TDE, Electropaz et Elfeo, ainsi que la société de services Edeser et la société de gestion d’investissements Compañía Administradora de Empresas [87]. Par ces mesures, le gouvernement estime avoir atteint le contrôle total de la génération d’électricité, et 85 % de la transmission. Dans ce dernier domaine, les 15 % restants correspondent à une entreprise colombienne, ISA Bolivia. Dans le domaine de la distribution, opèrent aussi des coopératives, dont certaines par la suite font aussi l’objectif de mesures gouvernementales pour prendre en main les lignes qu’elles opèrent.

Il faut noter que ces expropriations et plus généralement les mesures de nationalisations mises en œuvre dans les secteurs des hydrocarbures et des ressources minières, ont entrainé des paiements d’indemnisations plus ou moins considérables selon les cas. Une estimation effectuée en 2014 indique un montant d’au moins 1,9 milliards de dollars US; par comparaison le PIB de la Bolivie cette même année s’élevait à 28 milliards [88]. Il est vrai que le gouvernement a réussi à limiter les frais en s’efforçant de contourner les procédures d’arbitrage international par des négociations avec les parties concernées. Ainsi, le groupe anglo-argentin Pan American poursuivait le gouvernement suite à l’expropriation de la société Chaco, productrice de gaz naturel. La somme demandée était de 1,5 milliards de dollars US, finalement l’affaire a été réglée par un paiement de 357 millions.

Empresa Eléctrica Corani [89].

À l’occasion de la privatisation durant les années 1990, la participation de 50 % des actions destinée au capital privé est attribuée à une société US, Dominion Energy. En 2000 Dominion Energy est remplacé par une autre société US, Duke Energy, qui à son tour en 2007 cède la participation à la société Econergy, domiciliée également aux USA. En 2008 Suez Energy South America, filiale à 100 % du groupe français GdF Suez, acquiert Econergy. C’est cette dernière société qui est visée par la nationalisation de 2010, ainsi qu’une société possédant une participation de 0,65 %, Carlson Dividend Facility (ayant pour actionnaire principal Swedfund International AB). Cette dernière cède ses actions en 2011 moyennant une transaction. Au bout su compte Ende possède alors 97,87 % du capital de Corani.

Empresa Valle Hermoso [90].

À l’occasion de la privatisation durant les années 1990, la participation de 50 % des actions destinée au capital privé est attribuée à un consortium dominé par des groupes US, représenté par Constellation Energy International Holdings en association avec Ogden Power Development Bolivia, PMDC Latin America, Energía Andina, avec en outre la participation de deux sociétés boliviennes, Andes S.A. de Petróleos et South American Corp. (lié au Banco de La Paz), ainsi qu’une contribution de Fondelec (un fonds d’investissement constitué en association avec la Banque interaméricaine de développement) [91]. Dans la structure organisationnelle mise en place, cette participation dans Valle Hermoso est gérée par une société dénommée The Bolivian Generating Group (BGG). En 2002 un autre groupe US, Panamerican Investments, se substitue aux actionnaires d’origine de BGG, en acquérant 82 % du capital à travers une filiale Centurion Capital S.A. [92]. Ainsi Panamerican est le principal actionnaire affectée par la nationalisation de BGG en 2010.

Empresa Guaracachi [93]

À l’occasion de la privatisation durant les années 1990, la participation de 50 % des actions destinée au capital privé est attribuée à un groupe US, Energy Initiatives Power, qui la gère au moyen d’une société Guaracachi América Inc. constituée à cet effet[94]. En 1999, Guaracachi América accroit sa participation dans Guaracachi à 50,001 % et devient actionnaire de contrôle. En 2003 Guaracachi América est cédé à Bolivia Integrated Energy Ltd. (BIE), filiale du groupe britannique Integrated Energy Ltd. (IEL). En 2005, BIE est repris par le groupe britannique Rurelec par l’intermédiaire d’une filiale, Birdsong Overseas Ltd.

Transportadora de Electricidad (TDE) [95]

À l’occasion de la privatisation durant les années 1990, la totalité des actions est attribuée à un consortium composé du groupe espagnol Unión Fenosa par l’intermédiaire de sa filiale internationale Unión Fenosa Desarrollo y Acción Exterior S.A. (U.F.Acex) ainsi que des d’investisseurs associés. Dans la structure organisationnelle mise en place, le contrôle de TDE est gérée par une société dénommée Red Eléctrica de Bolivia Ltd. (REB). En 2002, le groupe espagnol Red Eléctrica de España (REE), par l’intermédiaire de sa filiale Red Eléctrica Internacional (REl), acquiert 99 % des actions détenues par REB, devenant ainsi le nouvel opérateur de TDE avec 99,94% du capital. L’actionnaire majoritaire de REE est la Sociedad Estatal de Participaciones Industriales (SEPI), d’Espagne, avec 20 %. En 2012 le gouvernement bolivien exproprie les actions détenues par REE.

Electropaz, Elfeo [96]

Avant la période de privatisions des années 1990, le secteur de l’électricité en Bolivie était dominé par deux grandes entreprises. Outre la société publique Ende, opérait une société à capitaux canadiens, la Compañía Boliviana de Energía Eléctrica (Cobee) ‑ Bolivian Power Company (BPCo) ‑ créée en 1925, ce à quoi s’ajoutaient des petites coopératives de génération et distribution subventionnées par l’État ainsi que des autoproducteurs. En 1994 l’énergie produite par Ende correspondait à 70 % du total national. Ende disposait du monopole pour la vente de courant à deux distributeurs également publics: Cooperativa Rural de Electrificación (CRE) et Empresa de Luz y Fuerza Eléctrica Cochabamba (Elfec). Cobee disposait du monopole pour la génération, transmission et distribution de courant à La Paz, Viacha et Oruru et comptait pour 27 % de la production. À la suite de la règlementation établie par le gouvernement concernant les différentes activités dans le domaine de l’électricité, Cobee crée deux filiales, División de Distribución de La Paz (Electropaz) et Empresa de Luz y Fuerza de Oruro (Elfeo), chargées des lignes de transmission et distribution. En 1995, Cobee cède ces deux sociétés au groupe espagnol Iberdrola, et se recentre ainsi sur la génération d’électricité.

En 2012, le gouvernement nationalise Electropaz et Elfeo. Iberdrola opère en Bolivie à travers la société holding Iberbolivia de Inversiones S.A., dont elle détient 63,4 %. Le reste est détenu par le fonds Paz Holding, auquel participent entre autres General Electric Capital et Mission Funding Epsilon). Iberbolivia détient 89,55 % des actions de Empresa de Electricidad de La Paz (Electropaz), Banco Santander en détient 10 %. Quant à Empresa de Luz y Fuerza de Oruro (Elfeo), Iberbolivia en détient 92,8%.

En même temps, sont nationalisées deux autres filiales de Iberdrola: Edeser dont Iberbolivia détient 89,39 % et Cadeb dont Iberbolivia détient 93,49%. Empresa de Servicios Edeser S.A., est une société de services dans le secteur de l’électricité créée par Iberdrola en 1996; Edeser est alors intégré dans Ende. Quant à Electropaz, en 2013 sa raison sociale est changée de Electricidad de La Paz S.A. (Electropaz) à Distribuidora de Electricidad La Paz (Delapaz).

Empresa de Luz y Fuerza Eléctrica (Elfec) [97].

Compañía de Luz y Fuerza Eléctrica Cochabamba S.A. est créée en 1908. En 1918 Simón I. Patiño, principal capitaliste du secteur minier par l’exploitation de l’étain, acquiert 59,54 % du capital de Elfec. En 1962 Elfec est nationalisée, les actions sont transférées à Ende par création d’une société mixte Elfec S.A.M. En 1980 les coopératives d’électrification de la vallée de Cochabamba décident de charger Elfec de l’administration et de l’entretien de leurs lignes de distribution, en contrepartie les sociétaires des coopératives reçoivent des actions de Elfec. La composition du capital de Elfec est alors la suivante: Ende 72,15 %, Municipalité de Cochabamba 20,30 %, autres Municipalités 3,42 %, particuliers 4,13 %. En 1995 l’État cède toutes ses actions (celles de Ende et des municipalités) de Elfec à des investisseurs privés. C’est l’entreprise Emel S.A. du Chili qui est choisie, Elfec reprend le statut de S.A. et est rattaché à Emel Overseas, filiale de Emel. En 1996 une partie des actions est attribuée à l’ensemble des travailleurs (Emel Overseas 91,85 %, travailleurs 5,08 %, autres privés 3,07 %). En 1997 Elfec est scindé en deux par la création de Empresa de Ingeniería y Servicios Integrales Cochabamba S.A. (Integra S.A), dont le capital est réparti entre les mêmes actionnaires selon la même composition. Toujours en 1997, Power Markets Development Company (PMDC), filiale du groupe PP&L (qui depuis 1995 est chapeauté par une société holding PP&L Resources) prend le contrôle de Emel. Emel procède à une augmentation du capital, laquelle est majoritairement souscrite par PMDC Chile Desarrollo de Recursos Ltda, filiale de PMDC, qui acquiert ainsi une participation de 25,05 % au capital de Emel. En outre PMDC achète des actions détenues par d’autres sociétés associées et des filiales de Emel et amène sa participation dans un premier temps à 66,8 %, puis 85,4 % et finalement 95,4 %. Ainsi en 1999 PP&L Chile Energía Ltda et PMDC Chile Desarrollo de Recursos Ltda détiennent respectivement 57,90 % and 37,50 % du capital de Emel. Par ailleurs PMDC change de nom et devient PP&L Global. En 2000, PP&L Resources Inc. change de dénomination en PPL Corp., PP&L Global Inc. devient PPL Global Inc. Cette même année, Emel Overseas transfère à PPL Global sa participation de 92,12 % dans Elfec et Integra. En 2007, la filiale de PPLG à laquelle ces sociétés sont rattachées, PPLG Bolivia Holding Company Ltd, change de dénomination en Luz del Valle Inversiones S.A. C’est en fait un élément d’une transaction qui opère le transfert de la participation de PPLG dans Elfec et Integra aux travailleurs et dirigeants de ces deux entités. Elle passe par un montage financier faisant intervenir des sociétés domiciliées au Panama et aux iles Cayman qui aboutit à ce qu’une société Luz del Valle S.A. enregistrée en Bolivie prend le relais de la société domiciliée aux iles Cayman, Luz del Valle Inversiones, laquelle disparait. En 2008 l’opération trouve une prolongation en ce que Cooperativa de Telecomunicaciones Cochabamba (Comteco) acquiert 56,66 % des actions de Luz del Valle et par là 52,20 %, des actions de Elfec.

En 2010 l’administration publique déclenche une investigation concernant les comptes de Elfec. En 2012, Elfec est nationalisé, les 92,12 % du capital détenus par Luz del Valle sont transférés à Ende. Les 7,88 % restants appartiennent à des investisseurs privés mineurs.

Expropriations diverses

Entel. En mai 2008, l’État acquiert 100 % des actions de Entel, filiale du groupe Telecom Italia.

Expropriation de propriétés foncières. En février 2009 le gouvernement exproprie 36.000 hectares de terres à des grands propriétaires fonciers (dont la famille US Larsen Metenbrink) accusés de tenir en servage des autochtones guaranis.

Fancesa. En septembre 2010 est effectuée la nationalisation de la cimenterie Fancesa, du groupe mexicain Chihuahua et de l’entrepreneur bolivien Samuel Doria Medina.

Sabsa. En février 2013, le gouvernement exproprie les actions de l’entreprise Servicios de Aeropuertos Bolivianos S.A. (Sabsa), filiale du consortium espagnol Abertis/Aena.

Emploi

Voici un tableau montrant la composition, en pourcentages, de la population selon sa condition d’activité, selon des données du 4e trimestre de 2016 [98].

population

en % de la population totale

 

 

 

 

 

en % de Purb

 

 

urbaine

68,9

 

en % de PET

 

PAT

54,2

78,7

 

en % de PEA

PEA

30,6

 

56,4

 

POC

29,2

 

 

95,5

PIOC

1,4

 

 

4,5

PEI

23,6

 

43,6

 

PANT

14,7

21,3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

en % de Prur

 

 

rurale

31,1

 

en % de PET

 

PAT

23,8

76,6

 

en % de PEA

PEA

17,4

 

72,9

 

POC

17,2

 

 

99,2

PIOC

0,1

 

 

0,8

PEI

6,5

 

27,2

 

PANT

7,3

23,4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

total urbaine + rurale

68,9 + 31,1 = 100

 

en % de PET

 

PAT

54,2 + 23,8 = 78

 

 

en % de PEA

PEA

30,6 + 17,4 = 48

 

61,5

 

POC

29,2 + 17,2 = 46,4

 

 

96,7

PIOC

1,4 + 0,1 = 1,5

 

 

3,1

PEI

23,6 + 6,5 = 30,1

 

38,6

 

PANT

14,7 + 7,3 = 22

 

 

 

Légende:

Purb: population urbaine; Prur: population rurale.

PAT: Population en âge de travailler. C’est l’ensemble des personnes de 10 ans ou plus des deux sexes et qui résident habituellement dans le pays, ayant les capacités physiquement et intellectuellement pour exercer une activité économique.

PANT: Population non PAT.

PEA: Population économiquement active. Elle est composée des personnes âgées de 10 ans et plus, qui ont travaillé au moins une heure dans la semaine de référence, ou sans avoir travaillé ont leur contrat de travail en vigueur. Elle comprend également les personnes sans emploi qui ont effectué une quelconque démarche de recherche d’emploi au cours de la période de référence ou qui attendent le début de l’activité économique dans laquelle elles s’insèrent de manière saisonnière.

PEI: Population économiquement inactive. C’est la population qui n’est pas insérée au marché du travail. Elle comprend les femmes au foyer, les étudiants, les personnes qui ne travaillent pas et ne recherchent pas d’emploi, les retraités, pensionnés, rentiers.

POC: Population employée. Elle est composée de personnes âgées de 10 ans et plus, qui ont travaillé au moins une heure dans la semaine de référence, ou sans avoir travaillé ont leur contrat de travail en vigueur et reprendront le travail quand la cause de leur absence temporaire perdra effet. Les personnes qui, pendant la semaine de référence, temporairement ne travaillaient pas en raison de congés, d’autorisation ou du manque de matériel sont également considérées comme occupées.

PIOC: Population sans emploi. Elle est composée de personnes âgées de 10 ans et plus qui, au cours de la semaine de référence, ont déclaré qu’elles n’avaient pas travaillé au moins une heure, ont activement cherché du travail au cours des quatre dernières semaines précédant la semaine de l’entretien et se sont déclarés disponibles pour travailler.

Gouvernement

Plan national de développement

Plan national de développement « Bolivie digne, souveraine, productive et démocratique pour le bien-vivre – Lignes directrices stratégiques – 2006‑2011 [99]

Présentation

[…]

L’objectif est de parvenir à une coexistence équilibrée et à une complémentarité dans l’équité de l’Économie d’État, de l’Économie Communautaire ‑ qui repose sur des processus de production impulsés par des organisations sociales et communautaires, des micro- et petits-entrepreneurs et artisans, des organisations économiques paysannes, des organisations productives, des communautés et des associations urbaines et rurales ‑, de l’Économie Mixte et de l’Économie Privée.

[…]

La formation de la matrice productive nationale

La dimension économique du Plan national de développement (PND) contribuera à la transformation de la matrice productive pour changer le modèle actuel exclusif d’exportation dans le secteur primaire.

La structure de la matrice productive nationale est constituée de deux groupes de secteurs: les secteurs stratégiques générateurs d’excédents et les secteurs générateurs d’emplois et de revenus. De manière transversale, se trouvent les secteurs d’infrastructure pour la production et le soutien à la production.

Les secteurs stratégiques sont constitués par les hydrocarbures, l’exploitation minière, l’électricité et les ressources environnementales, qui préservent le caractère de nationalité car ils englobent les ressources naturelles, récupérées et reconnues comme patrimoine de l’État. Ils nécessitent un niveau élevé d’investissements en technologie, sont à forte intensité de capital et ont à leur tour une grande capacité à générer des excédents.

Cette caractéristique implique la nécessité que l’État soit le protagoniste du développement au moyen de la création ou la refondation de sociétés d’État qui favorisent le développement de ces secteurs, maximisent l’excédent économique, son appropriation, son utilisation et sa distribution à travers le réinvestissement ainsi que des investissements et des transferts à d’autres secteurs qui composent la matrice productive et la matrice socio-communautaire, en optimisant leur utilisation pour diversifier l’économie et améliorer le bienêtre social dans un contexte d’équilibre avec l’environnement.

Les deux piliers du développement, les hydrocarbures et l’exploitation minière, correspondent à l’activité extractive basée sur la production de ressources non renouvelables. Les deux secteurs génèrent une rente pour l’exploration et l’exploitation, ainsi que pour leur industrialisation.

Les générateurs d’excédents sont d’une rentabilité élevée et donc attractifs pour le capital étranger. En ce sens, est proposée une politique de traitement à l’égard des investissements étrangers qui offre une sécurité juridique et des règles claires en ce qui concerne sa contribution à l’État et à la société.

Les hydrocarbures, spécialement le gaz naturel, se distinguent comme étant des ressources de caractère stratégique dans la région d’Amérique latine et au niveau mondial. Pour cette raison, la présence effective de l’État dans le cycle de production est requise dans le pays.

Les hydrocarbures et l’exploitation minière sont à forte intensité en capital, requièrent d’importants investissements à long terme, de la technologie et une main-d’œuvre spécialisée, et ont des liaisons limitées avec le reste de l’appareil productif national. Pour ces raisons, le pays nécessite des alliances stratégiques avec le secteur privé national et international et avec d’autres nations afin d’établir des critères de performance pour générer des circuits vertueux entre l’État et les sociétés transnationales.

Discours politique du gouvernement

Álvaro García Linera: Le « capitalisme andino-amazonien »(extraits) [100]:

Le triomphe électoral du Mouvement pour le socialisme (MAS) et d’Evo Morales […] la décolonisation de l’État et la mise en place d’un nouveau modèle économique marqueront, dès le premier jour, le gouvernement de la gauche indigène qui vient d’entamer un processus de changement irréversible pour le prochain demi-siècle.

[…] nos forces seront fondamentalement dirigées vers la mise en œuvre d’un nouveau modèle économique que j’ai appelé, provisoirement, « capitalisme andino-amazonien ». En d’autres termes, la construction d’un État fort destiné à réguler l’expansion de l’économie industrielle, à extraire ses excédents et à les transférer vers le milieu communautaire pour favoriser des formes d’auto-organisation et de développement mercantile proprement andines et amazoniennes.

Durant les 50 années à venir, prédominera en Bolivie l’économie familiale structurelle, base des dernières rébellions sociales; le défi est de savoir quoi en faire. Le nationalisme révolutionnaire des années 1950 pensait que la communauté disparaitrait et que tout le monde deviendrait industrieux, moderne, capitaliste et salarié, mais cela ne s’est pas produit et, à l’heure actuelle, le monde moderne ne représente qu’entre 7 % et 15 % de l’économie et de la population économiquement active (PAE). Aujourd’hui, nous pensons qu’au moins, nous pouvons concevoir un modèle pour que la sphère communautaire cesse d’être intégrée de manière brutale à l’économie industrielle, pour éviter que la sphère moderne exploite la sphère communautaire et lui enlève toute son énergie, pour favoriser au contraire le développement autonome de celle‑ci. Pour cela nous comptons sur l’État et sur le surplus des hydrocarbures nationalisés.

Le triomphe du MAS ouvre une possibilité de transformation radicale de la société et de l’État, mais pas dans une perspective socialiste (du moins à court terme) comme le propose une partie de la gauche. Actuellement, il y a deux raisons qui ne permettent pas d’imaginer la possibilité d’un régime socialiste dans notre pays. D’une part, il existe un prolétariat minoritaire démographiquement et inexistant politiquement; et le socialisme ne se construit pas sans prolétariat. Deuxièmement: le potentiel communautaire agraire et urbain est considérablement affaibli. Au cours des 60 dernières années, on a vu un recul de l’activité communautaire productive et une érosion des liens communautaires. Il existe toujours une communauté, mais celle‑ci a implosé intérieurement en se réduisant à des structures familiales. […]

Entretien avec Álvaro García Linera: « Evo symbolise l’effondrement d’un imaginaire restreint à la subalternité de los indigènes », par Maristella Svampa et Pablo Stefanoni (extrait) [101]:

Je crois que le concept de capitalisme andino-amazonien a résisté à son épreuve du feu et je le considère comme un concept théoriquement honnête et complet, de ce qui peut être fait aujourd’hui. Il ne fait pas de concessions aux radicalismes idéalistes avec lequel on a voulu lire le processus actuel, à la manière de James Petras, car il interprète la possibilité des transformations en Bolivie non pas à partir du désir ni de la seule volonté. Le socialisme ne se construit pas par décret ni par désir, il se construit par le mouvement réel de la société. Et ce qui se passe actuellement en Bolivie est un développement particulier dans le cadre d’un développement général du capitalisme. La Bolivie est capitaliste au sens marxiste du terme, bien que pas pleinement capitaliste et c’est sa vertu. Cette particularité du capitalisme local qui combine des processus de subsomption formelle et de subsomption réelle, nous l’avons appelé capitalisme andino-amazonien. Cela peut être frustrant pour les lectures idéalistes, mais je pense que c’est un concept intellectuellement honnête qui a résisté au débat et à la réalité. Ce n’est pas que c’est ce que l’on veut, notre objectif; ce que nous disons, c’est que les possibilités de transformation et d’émancipation de la société bolivienne vont en ce sens: à rééquilibrer les formes économiques non capitalistes avec les formes capitalistes, à favoriser ces formes non capitalistes afin que, au fil du temps, elles génèrent des processus de communarisation amplifiée qui permettent de penser à un post-capitalisme. Le post-néolibéralisme est une forme de capitalisme, mais nous pensons qu’il contient un ensemble de forces et de structures sociales qui, avec le temps, pourraient devenir post-capitalistes.

Notes

[Les citations textuelles de paroles et d’écrits sont traduites par nous à partir des sources originales en espagnol.]

 

 


[1]. Produit intérieur brut aux prix du marché (PIB).

C’est un agrégat représentant, pour un État donné et durant une période donnée, le résultat final de l’activité de production des unités productrices résidentes.

Le PIB peut se définir de trois manières. La définition qui correspond le mieux à la compréhension intuitive est la suivante:

Le PIB est égal à la somme des valeurs ajoutées brutes des différents secteurs institutionnels ou des différentes branches d’activité, augmentée des impôts moins les subventions sur les produits.

Cela avec la définition suivante pour valeur ajoutée:

La valeur ajoutée représente le solde du compte de production. Elle est égale à la valeur de la production diminuée de la consommation intermédiaire.

Les deux autres manières de définir le PIB correspondent exactement au même concept, mais font référence à des rubriques de comptabilité différentes.

[2]http://www.cbparis.org/article-23004360.html

[3]https://www.initiative-communiste.fr/articles/international/bolivie-evo-morales-reelu-triomphalement/

[4]https://www.initiative-communiste.fr/articles/international/coup-detat-reactionnaire-teleguide-par-limperialisme-us-en-bolivie-evo-morales-renverse-evonoestassolo-evoelmundocontigo-franciaconevo/

[5]http://cercles.communistes.free.fr/rcc/publi.php?idArticle=2019_11_11_bolivie

[6]https://cgtvillejuif.org/2019/11/bolivie/

[7]. Voici quelques indications concernant les sociétés transnationales impliquées.

– British Petroleum (BP).

En 1908 William Knox D’Arcy crée la Anglo-Persian Oil Company pour exploiter un champ pétrolifère en Perse. En 1925 une concession de prospection en Iraq est accordée à la Turkish Petroleum Company, dont la Anglo-Persian Oil détient 47,5 % du capital; en 1927, un gisement est découvert qui marque le développement du champ de Kirkouk. En 1935 la Anglo-Persian Oil change sa dénomination en Anglo-Iranian Oil Company. En 1951, en Iran, l’industrie du pétrole est nationalisée, mais en 1954 le gouvernement accepte une association avec un consortium nommé Iranian Oil Participants, dans lequel la Anglo-Iranian Oil détient 40 %, les bénéfices étant partagés à parties égales entre l’Iran et le consortium. En 1954 également, la Anglo-Iranian Oil change sa dénomination en British Petroleum. Durant la période 1971-1973, BP subit des mesures de nationalisation en Iran et en Libye.

– Amaco.

L’origine d’Amaco remonte à la création de la Standard Oil, aux USA en 1870. La Standard Oil est dominée par la famille Rockefeller: John Davison Rockefeller possède alors en propre 26,67 % du capital initial, la famille dans son ensemble 40 %. En 1911, suite à l’adoption d’une règlementation anti-trust, la Standard Oil est divisée en 34 sociétés, dont la Standard Oil of Indiana, laquelle en 1925 change sa dénomination en Amaco.

– Shell.

En 1833, Marcus Samuel Sr établit à Londres, à partir d’une boutique d’antiquités, une entreprise commerciale qui importe des marchandises venant d’Asie et exporte vers l’Extrême-Orient des produits industriels et des textiles. La société porte alors le patronyme de son patron, Samuel. Au cours des années 1880, ses deux fils, Marcus Jr et Sam, prennent le relais. Marcus Samuel propose aux Rothschild, qui ont fait l’acquisition de champs pétroliers russes près de Bakou en mer Noire, une solution économique pour écouler leur production en Asie: un navire à vapeur, dont les cales sont conçues pour transporter du pétrole brut en vrac. En 1897, les frères Samuel rebaptisent leur entreprise Shell Transport and Trading Company. En 1907, la société néerlandaise Royal Dutch Petroleum et la Shell Transport fusionnent, l’entreprise est rebaptisée Royal Dutch Shell.

– Enron.

Le groupe Enron a été constitué par la réunion de deux groupes US, InterNorth et Houston Natural Gas.

En 1901 est constituée la Houston Oil Company. Par la suite, la Houston Oil établit deux filiales, Houston Pipe Line Company et Houston Natural Gas Corporation, lesquelles en 1957 sont réunies en tant que Houston Natural Gas. Par ailleurs, en 1930, est créée la Northern Natural Gas Company. En 1980, la Northern Natural Gas change sa dénomination en InterNorth, Inc., mais maintient une division nommée Northern Natural Gas Company.

En 1985 InterNorth acquiert la Houston Natural Gas. Le groupe constitué ainsi s’appelle initialement HNG/InterNorth, en 1986 la dénomination est changée en Enron.

– Yacimientos Petrolíferos Fiscales (YPF) (cf. également note 10 , Repsol)

YPF a été constitué en Argentine comme entreprise d’État en 1922. En 1985, est mise en œuvre l’ouverture aux capitaux privés, puis à partir de 1989 le secteur des hydrocarbures est soumis globalement à une dérégulation. En 1992, YPF est transformé en société anonyme. Las actions de YPF S.A. sont réparties entre l’État (51 %) et les provinces où se trouvent les gisements (39 %), les membres du personnel pouvant par ailleurs acquérir des actions dans la limite de 10 %; simultanément la loi prescrit que l’État et les provinces cèdent conjointement au moins 50 % des actions de l’entreprise.

Pluspetrol S.A.

Pluspetrol, dont le siège se trouve en Argentine, débute ses opérations en 1976. Cette société est contrôlée par une société holding domiciliée aux Pays‑Bas, Pluspetrol Resources Corporation N.V.

– Pérez Companc

En 1946 Jorge et Carlos Pérez Companc créent en Argentine la Compañía Naviera Pérez Companc S.A., puis en 1968 la Petrolera Pérez Companc S.A. En 1972 le groupe débute ses activités dans le secteur des hydrocarbures en obtenant une concession attribuée par YPF. En 2002 la branche Énergie du groupe, PeCom Energía, est vendue au groupe brésilien Petrobras.

– Petrobras

Petrobras est créée en 1953 sous la présidence de Getúlio Vargas, en tant qu’entreprise publique. Initialement, Petrobras détient le monopole des opérations d’exploration et production de pétrole ainsi que d’autres activités liées. Cependant ce monopole est révoqué en 1997.

[8]. Une chronologie documentée de ces évènements se trouve ici (en espagnol):
http://histmove.ouvaton.org/pag/pre/pag_005/es/chro.htm

[9]. Décret Nationalisation des hydrocarbures 28701, 1er mai 2006.
https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-28701.html

[10] Repsol (cf. également note 7 , YPF)

En Espagne, en 1986, l’Institut national des Hydrocarbures (INH) crée la société Repsol S.A. dans le cadre d’une restructuration du secteur pétrolier national. Entre 1989 et 1997 s’effectue un processus de privatisation, à l’issue duquel l’État n’est plus actionnaire de Repsol. Parmi les actionnaires de Repsol se trouvent alors Banco Bilbao Vizcaya (BBV) avec 7 %), La Caixa avec 5 % et le groupe mexicain Pemex avec environ 5 %.

En 1999, Repsol acquiert 97,46 % des actions du groupe argentin YPF, puis, au cours de l’année 2000, porte sa participation à environ 99 %. Est ainsi constitué, en Argentine, Repsol-YPF. Durant la décennie suivante, Repsol vend 25,46 % du capital de Repsol-YPF au groupe Petersen, de la famille argentine Eskenazi, et 17,09 % à d’autres investisseurs.

En 2001 Repsol-YPF porte sa participation dans Andina à 50 % en reprenant celles de Perez Companc et Pluspetrol, et créée alors Repsol-YPF Gas Bolivia.

En 2012 la participation de Repsol est expropriée à hauteur de 51 % du capital de YPF. Repsol détient ainsi 6,4 %, et maintient une représentation au directoire de l’entreprise. Pour la poursuite de l’exploitation pétrolière, l’État cherche un associé. Le groupe public mexicain Pemex, qui est avec 9,4 % le second actionnaire en importance de Repsol, est intéressé. Il exerce son influence sur Repsol pour faire en sorte que le litige résultant de l’expropriation soit réglé en 2014.

[11]. Voici quelques indications concernant les sociétés transnationales impliquées.

– Total.

En 1924 est créée la Compagnie française des pétroles (CFP) à l’initiative de l’État, elle est introduite en Bourse à partir de 1929. En 1929, l’Iraq Petroleum Company succède à la Turkish Petroleum Company qui possédait une concession en Irak. L’IPC est un consortium composé principalement des partenaires suivants, chacun participant à hauteur de 23,75 %: Anglo-Persian Company, Royal Dutch Shell, CFP, et une association de sociétés US. En 1953, est instaurée la marque Total, la dénomination CFP disparait officiellement au profit de Total en 1991. En 1999, Total rachète le groupe belge Petrofina, et devient TotalFina; en 2000, TotalFina rachète Elf Aquitaine, et devient TotalFinaElf; la dénomination Total est reprise en 2003.

Total est présent en Bolivie depuis 1994.

– British Gas (BG).

En 1972 le gouvernement britannique fusionne les commissions régionales dans le domaine du gaz en un seul organisme appelé British Gas Company. En 1986, le secteur est privatisé, ce qui aboutit en 1997 à la séparation de British Gas en trois parties distinctes, à savoir Centrica, BG Group, et National Grid. BG Group est acquis par Shell en 2016. La société nommé British Gas actuellement est une filiale de Centrica.

BG Bolivia a été constitué en 1999 en tant que filiale de BG Group.

– Vintage Petroleum

Vintage Petroleum a été créé en 1983. En 2005 la société est intégrée dans Occidental Petroleum.

Occidental Petroleum Corp. est un groupe US, qui englobe deux filiales, Occidental Oil and Gas Corp. (la plus importante) et Occidental Chemical Corp. Il a été fondé en 1920. En 1956 Armand Hammer ‑ qui dans les années 1920 avait été le premier homme d’affaires à nouer des liens avec l’URSS ‑participe à un investissement lié à des explorations menées par Occidental Petroleum aux USA, en 1957 il devient président du groupe. En 1966 la Occidental Petroleum démarre l’extraction de pétrole en Libye, après l’arrivée au pouvoir de Kadhafi elle négocie un accord avec le régime en 1970.

[12]http://olca.cl/oca/bolivia/mineras019.htm

[13]https://elpotosi.net/nacional/20160216_sindicato-de-mineros-de-amayapampa-piden-el-traspaso-de-mina-de-oro.html

[14]. Décret 29117, 1er mai 2007.
https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-29117.html

[15]https://rebelion.org/los-cooperativistas-mineros-y-el-mas/

[16]https://rebelion.org/los-cooperativistas-mineros-y-el-mas/

[17]. Loi des Mines et de la Métallurgie 535 du 28 mai 2014, publiée le 2 juin 2014.
https://www.lexivox.org/norms/BO-L-N535.html

[18]. Décret suprême 2892.
https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-N2892.html

[19]. Code des Mines, 17 mars 1997.
https://www.lexivox.org/norms/BO-L-1777.html

[20]https://rebelion.org/los-cooperativistas-mineros-y-el-mas/

[21]. Manquiri opère en San Bartolomé depuis 2008. À l’origine c’était une filiale de la société américaine Coeur d’Alene Mines (dont la dénomination a été changée en Coeur Mining en 2013), puis Manquiri a été reprise en 2018 par Ag-Mining Investments.

[22]. Loi 845, 24 octobre 2016.
https://www.lexivox.org/norms/BO-L-N845.html

[23]. Loi 1140, 26 décembre 2018.
https://www.lexivox.org/norms/BO-L-N1140.html

[24]https://siip.produccion.gob.bo/repSIIP2/formPib.php

[25]https://www.paginasiete.bo/economia/2016/5/1/empleos-empresas-publicas-crecieron-veces-decada-95065.html
https://datos.bancomundial.org/indicador/SL.TLF.TOTL.IN?locations=BO
https://www.opinion.com.bo/articulo/economiía/gobierno-anuncia-11-mil-empleos-empresas-publicas/20120228011000406204.html

[26]. Population en âge de travailler – C’est l’ensemble des personnes de 10 ans ou plus des deux sexes et qui résident habituellement dans le pays, ayant les capacités physiquement et intellectuellement pour exercer une activité économique.

[27]. Population économiquement active – Elle est composée de personnes âgées de 10 ans et plus, qui ont travaillé au moins une heure dans la semaine de référence, ou sans avoir travaillé, ont leur contrat de travail en vigueur. Elle comprend également les personnes sans emploi, mais qui ont effectué une quelconque démarche de recherche d’emploi au cours de la période de référence ou qui attendent le début de l’activité économique dans laquelle elles s’insèrent de manière saisonnière.

[28]https://www.econstor.eu/bitstream/10419/176624/1/2017-01.pdf

[29]https://www.alianzaporlasolidaridad.org/axs2020/wp-content/uploads/Estudio-violencia-y-trabajo-informal.pdf

[30]https://www.lostiempos.com/actualidad/pais/20180412/ine-171-ninos-adolescentes-forma-parte-poblacion-economicamente-activa

[31]https://mundo.sputniknews.com/america-latina/201908031088249669-evo-morales-asegura-que-bolivia-sera-potencia-economica-en-dos-decadas/

[32]https://mundo.sputniknews.com/america-latina/201803011076692084-morales-litio-mercado/

[33]https://www.opinion.com.bo/articulo/el-pais/evo-dice-bolivia-es-socialista-marxista-pide-ser-expulsado-oea/20120312170200408130.amp.html

[34]https://www.europapress.es/internacional/noticia-morales-dice-temer-atentado-contra-papa-ser-anticapitalista-antiimperialista-20150714051533.html

[35]https://www.jornada.com.mx/ultimas/politica/2019/11/16/cai-en-la-trampa-el-golpe-se-urdio-en-la-embajada-de-eu-evo-3185.html

[36]https://www.telesurtv.net/news/bolivia-evo-lidera-argentina-celebracion-estado-plurinacional-20200122-0025.html

[37]https://www.jornada.com.mx/ultimas/politica/2019/11/16/cai-en-la-trampa-el-golpe-se-urdio-en-la-embajada-de-eu-evo-3185.html

[38]https://lostiemposdigital.atavist.com/la-compleja-relacion-entre-mas-fencomin

[39]https://elpais.com/economia/2013/01/22/agencias/1358891412_041408.html

[40]https://www.opinion.com.bo/articulo/el-pais/mallku-cree-evo-quot-caer-aacute-barrido-traici-oacute-n-quot-garc-iacute-linera/20180916172300626347.amp.html

[41]. Álvaro García Linera: « El “capitalismo andino-amazónico” ».
Le Monde diplomatique (édition chilienne), janvier 2006.
https://www.lemondediplomatique.cl/2006/01/el-capitalismo-andino-amazonico

[42]Maristella Svampa et Pablo Stefanoni: « Entrevista a Álvaro García Linera: “Evo simboliza el quiebre de un imaginario restringido a la subalternidad de los indígenas” », Observatorio Social de América Latina (Osal), année VIII, Nº 22. Buenos Aires, Clacso, septembre 2007.
http://bibliotecavirtual.clacso.org.ar/ar/libros/osal/osal22/AC22SvampaStefanoni.pdf

[43]. « García Linera nacionaliza la mina Colquiri »
Los Tiempos Digital, 20/6/2012.
https://www.lostiempos.com/actualidad/economia/20120620/garcia-linera-nacionaliza-mina-colquiri

[44]. Álvaro García Linera: « La resolución consensuada de las contradicciones en el seno del pueblo – De la nacionalización de Colquiri a la contención de acciones golpistas desestabilizadoras ».
La Migraña – Revista de análisis político, Vicepresidencia del Estado Plurinacional de Bolivia, Année 1, n° 3, décembre 2012.
https://www.academia.edu/26412731/Nacif_-_Industrializacion_del_Litio_Bolivia_La_Migraña_2012_.pdf

[45]https://histoireetsociete.wordpress.com/2019/11/24/avec-ou-sans-evo-la-bolivie-va-reprendre-sa-revolution-democratique-dit-evo-morales/

[46]http://www.granma.cu/mundo/2020-02-26/candidato-presidencial-del-mas-denuncia-privatizacion-del-litio-como-objetivo-de-golpistas-en-bolivia-26-02-2020-14-02-29

[47]Ce site est une émanation de l’U.S. Southern Command (SouthCom), un des Combatant Commands (CoComs) au sein du Département de Défense. Le SouthCom est en charge de la zone Amérique centrale, Amérique du Sud, Caraïbes, dont le canal du Panama.

[48]. « Amenazas Transnacionales » – « Empresas chinas explotarán litio boliviano ».
https://dialogo-americas.com/es/articles/empresas-chinas-explotaran-litio-boliviano/
« Los orígenes del proceder de la República Popular China en Latinoamérica y el Caribe ».
https://dialogo-americas.com/es/articles/los-origenes-del-proceder-de-la-republica-popular-china-en-latinoamerica-y-el-caribe/

[49]https://lta.reuters.com/articulo/domesticNews/idLTAKBN14C2AC

[50]https://rebelion.org/los-cooperativistas-mineros-y-el-mas/

[51]https://rebelion.org/los-cooperativistas-mineros-y-el-mas/

[52]https://www.lostiempos.com/actualidad/economia/20161022/ley-revierte-areas-cedidas-cooperativas-privados

[53]https://www.lostiempos.com/actualidad/economia/20161022/ley-revierte-areas-cedidas-cooperativas-privados

[54]http://www.mineria.gob.bo/documentos/PSDIMM%202016-2020.pdf

[55]. Cette exhortation de la part de Morales devrait rendre plus prudents ceux qui, outre le soutien politique qu’ils lui apportent, expriment une admiration de sa personnalité. Exemple: « […] la capacité de travail et résistance d’Evo est proverbiale, quelques minutes de sommeil dans l’inconfort le plus grand lui suffisent pour repartir […]. »

https://histoireetsociete.wordpress.com/2019/11/12/il-est-difficile-de-reellement-comprendre-ce-qui-se-passe-en-bolivie-et-pourtant-nous-avons-des-lecons-a-en-tirer/

[56]http://www.pcof.net/nous-condamnons-le-coup-detat-en-bolivie/

[57]http://www.pcof.net/nous-condamnons-le-coup-detat-en-bolivie/

[58]https://npa2009.org/content/où-va-la-bolivie-de-morales%E2%80%89-une-révolution-en-débat

[59]https://npa2009.org/node/37318

[60]http://321ignition.free.fr/pag/fr/lin/pag_003/1928_09_01_IC_VI_Programme.htm

[61]https://ibce.org.bo/images/ibcecifras_documentos/CIFRAS-724-Bolivia-Exportaciones-Hidrocarburos_.pdf

[62]http://www.mineria.gob.bo/revista/pdf/20170817-10-15-28.pdf

[63]http://www.mineria.gob.bo/revista/pdf/20190111-12-1-14

[64]http://www.mineria.gob.bo/revista/pdf/20190111-12-1-14

[65]http://www.mineria.gob.bo/revista/pdf/20190111-12-1-14

[66]http://www.mineria.gob.bo/revista/pdf/20190111-12-1-14

[67]. Loi des Mines et de la Métallurgie 535 du 28 mai 2014, publiée le 2 juin 2014.
https://www.lexivox.org/norms/BO-L-N535.html
http://www.comibol.gob.bo/index.php/contacto/empresas-comibol
http://www.comibol.gob.bo/index.php/2-uncategorised?start=12
http://www.comibol.gob.bo/index.php/convocatoria/materiales-comercalizados-por-empresas

[68]http://biblioteca.clacso.edu.ar/Bolivia/cedla/20171006044652/pdf_236.pdf
https://migrana.vicepresidencia.gob.bo/articulos/mineria-tropiezos-y-desafios/

[69]https://www.lapatriaenlinea.com/?t=nacionalizacion-y-reversiones-mineras&nota=97626

[70]vinto.gob.bo/?page_id=96
http://www.redescuela.org/WikiEscuela/JuanJoseTorresGonzales

[71]https://www.marxists.org/francais/guevara/works/1967/00/tricontinentale.htm
https://www.marxists.org/espanol/guevara/04_67.htm

Citation original:

En América Latina se lucha con las armas en la mano en Guatemala, Colombia, Venezuela y Bolivia y despuntan ya los primeros brotes en Brasil. Hay otros focos de resistencia que aparecen y se extinguen. Pero casi todos los países de este continente están maduros para una lucha de tipo tal, que para resultar triunfante, no puede conformarse con menos que la instauración de un gobierno de corte socialista.

[72]https://www.lapatriaenlinea.com/?t=nacionalizacion-y-reversiones-mineras&nota=97626

[73]. Décret suprême nº 21060, 29 aout 1985.
https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-21060.html

[74]. Décret suprême n° 21377 du 25 aout 1986, qui concerne la restructuration de la Comibol (cf. article 24).
http://www.gacetaoficialdebolivia.gob.bo/normas/buscar/21377

[75]https://kaosenlared.net/bolivia-colquiri-alcances-de-la-nacionalizaci-n/

[76]. Code des Mines, 17 mars 1997.
https://www.lexivox.org/norms/BO-L-1777.html

[77]http://biblioteca.clacso.edu.ar/Bolivia/cedla/20171006044652/pdf_236.pdf

[78]http://www.mineria.gob.bo/documentos/rendiciondecuentas2017.pdf

[79]https://www.sce.bo/reportan-crecimiento-de-30-en-numero-de-cooperativas-mineras-de-bolivia/

[80]http://biblioteca.clacso.edu.ar/Bolivia/cedla/20171006044652/pdf_236.pdf

[81]http://biblioteca.clacso.edu.ar/Bolivia/cedla/20171006044652/pdf_236.pdf

[82]http://biblioteca.clacso.edu.ar/Bolivia/cedla/20171006044652/pdf_236.pdf

[83]https://elpotosi.net/local/20190513_reportan-que-10-mil-personas-trabajan-en-el-cerro-rico-de-potosi.html

[84]https://www.americaeconomia.com/negocios-industrias/bolivia-las-alternativas-para-el-futuro-de-cerro-rico

[85]https://www.opinion.com.bo/articulo/potosi-202-aniversario/luces-sombras-explotacion-cerro-rico/20121110005000437504.amp.html

[86]https://www.ende.bo/historia

[87]https://www.elperiodico.com/es/economia/20121229/evo-morales-expropia-cuatro-filiales-de-iberdrola-en-bolivia-2283467

[88]https://www.brasildefato.com.br/2019/11/12/article-or-bolivias-lithium-and-the-urgency-of-a-coup

[89]https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-24046.html
https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-25727.html
https://www.revistaei.cl/2007/02/07/bolivia-duke-energy-vende-empresa-de-energia-corani-y-abandona-el-pais/
https://www.noticiasfides.com/economia/compania-norteamericana-vendio-activos-de-la-empresa-electrica-corani-103796
https://www.sec.gov/Archives/edgar/data/1243443/000130817909000077/gsu2008drfenfiling.htm
https://www.lostiempos.com/actualidad/economia/20111216/ende-compra-acciones-corani
https://www.opinion.com.bo/articulo/el-pais/ende-compra-acciones-socio-minoritario-corani/20111216002500389269.amp.html

[90]https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-24048.html
https://sec.report/Document/0000073902-96-000004/
https://www.researchgate.net/profile/Gover_Barja_Daza/publication/44921835_Inversion_y_productividad_en_la_industria_boliviana_de_la_electricidad/links/00b7d52200be59afb9000000/Inversion-y-productividad-en-la-industria-boliviana-de-la-electricidad.pdf
https://appweb.asfi.gob.bo/reportes_asp/rmi/tarjeta.asp?c=51842
https://www.noticiasfides.com/economia/electricas-valle-hermoso-y-corani-mejor-que-guaracachi-en-semestre-123944

[91]https://www.noticiasfides.com/nacional/sociedad/medio-millon-de-dolares-para-ganar-195840

Voici quelques détails concernant l’identité des groupes impliqués.

Constellation Energy International Holdings est la société holding du groupe Baltimore Gas & Electric Co, domicilié aux USA.

Ogden Power Development Bolivia (OPDB) est la filiale locale du groupe Ogden Corp., domicilié aux USA. L’affiliation de OPDB passe par une filiale de ce groupe, Ogden Projects, Inc. (OPI), dont la filiale Ogden Energy, Inc. (OEI) contrôle OPDB. En 2001, Ogden Corp. deviendra Covanta Energy Corp. En 2002, Covanta se déclare en faillite, en 2004, le groupe est reprise par Danielson Holding Corp., autre groupe US.

PMDC Latin America est une filiale de Power Markets Development Company (PMDC), dont la société mère, au moment de la privatisation en juin 1995, est dénommée PP&L Resources, Inc. Le groupe PP&L venait de procéder à une restructuration en avril de la même année: auparavant, la société tête du groupe était Pennsylvania Power & Light Co. (PP&L), dont PP&L Resources était une filiale. En 1997 PMDC changera de nom en PP&L Global et en 2000 PP&L Resources, Inc. deviendra PPL Corp. La participation de PP&L Resources dans Valle Hermoso est réalisée par la constitution d’une filiale PMDC Energía. Par ailleurs le groupe détient aussi une participation indirecte dans Valle Hermoso en tant que partie prenante du Fondelec à travers PMDC Energy Ltd. Ultérieurement PMDC Latin America deviendra PMDC International Holdings.

Energía Andina est une société péruvienne (différente d’une autre société du même nom, constituée en 2008).

[92]. Dans la transaction, C&O Bolivia, auparavant filiale de Constellation Energy, est reprise par Centurion. En dehors de Centurion, seul Energía Andina reste comme autre actionnaire.

https://sec.report/Document/0001021408-03-003472
https://www.evh.bo/images/memorias/evh/evh-2004.pdf
https://www.asfi.gob.bo/images/VALORES/Emisores/Prospectos/2010/Pagares/ProspectoMarcoPAN.pdf

[93]. Décret suprême nº 24047, 29 juin 1995.
https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-24047.html
https://www.italaw.com/sites/default/files/case-documents/ita0386_0.pdf
http://senaforo.net/2011/11/23/fob1004/

[94]Energy Initiatives Power, Inc. (EIP) est une filiale du groupe General public utilities Corp. En 1996 ce dernier modifie sa dénomination sociale et devient GPU, Inc., tandis que EIP est renommé en GPU International.

En 2003 GPU est intégré par un processus de fusion dans le groupe First Energy Corp.

https://www.sec.gov/Archives/edgar/containers/fix010/40779/0000040779-96-000062.txt
https://www.firstenergycorp.com/about/company_history.html

[95]http://www.endetransmision.bo/etr/files/memorias/memoriaanual/2005/memoria2005.pdf
https://cedla.org/publicaciones/ieye/una-reforma-con-pocas-luces-privatizacion-del-sector-electrico-boliviano
https://elpais.com/economia/2012/05/01/actualidad/1335896866_946647.html
https://elpais.com/economia/2012/05/01/actualidad/1335887717_799794.html
https://www.elperiodico.com/es/economia/20120501/bolivia-expropia-la-filial-de-red-electrica-espanola-en-bolivia-1733242

Initialement, le capital de Red Eléctrica de Bolivia Ltd. (REB) était reparti entre Unión Fenosa ACEX (44 %), AIG-GE Capital Latin American Infrastructure Fund (46 %) et Banco Central Hispano (BCH) (10 %). (ACEX: la filiale international du groupe espagnol Unión Fenosa; BCH: banque espagnole; AIG-GE Capital LAIF: un fonds d’investissement constitué principalement par deux groupes US, à savoir American International Group et GE Capital Corp.)

Par la suite Unión Fenosa accroit sa participation à 80 %, avec Banco Santander Central Hispano (BSCH) et Inversiones Illimani comme autres actionnaires, ces derniers détenant 10 % chacun. (BSCH était le résultat de l’absorption de BCH par Banco Santander, autre banque espagnole, en 1999.) Inversiones Illimani était une société contrôlée par Raúl Garafulic, entrepreneur bolivien dans le secteur des médias avec Illimani de Comunicaciones S.A.

En 2002, au moment de la cession de REB à Red Eléctrica de España (REE), la répartition du capital de REB était la suivante: Unión Fenosa 69 %; la société bolivienne Mercurio, du groupe Garafulic, 20 %; BSCH 10 %; employés de la société 1 %.

https://ddd.uab.cat/pub/infanu/22392/iaUNIFENa1997ispa.pdf
https://mercado.com.ar/empresas-negocios/union-fenosa-invierte-en-bolivia/
https://cincodias.elpais.com/cincodias/2002/07/01/empresas/1025690349_850215.html
http://www.wiphala.org/saqueo.htm

[96]https://cedla.org/publicaciones/ieye/una-reforma-con-pocas-luces-privatizacion-del-sector-electrico-boliviano
https://www.elmundo.es/america/2012/12/29/noticias/1356790788.html
https://www.comunicacion.gob.bo/?q=20121229/gobierno-nacionaliza-empresas-distribuidoras-de-electricidad-de-la-paz-y-oruro
https://elpais.com/economia/2012/12/29/actualidad/1356793606_328689.html
https://www.opinion.com.bo/articulo/el-pais/electropaz-llama-ahora-delapaz-anuncian-nivelacion-tarifas/20130319164700465816.html

[97]Gustavo Rodríguez Ostria: Energía eléctrica y desarrollo regional – ELFEC en la historia de Cochabamba (1908-1996); ELFEC, Cochabamba, 1997.

https://cedla.org/publicaciones/ieye/una-reforma-con-pocas-luces-privatizacion-del-sector-electrico-boliviano
http://hrudnick.sitios.ing.uc.cl/mercados/distribucion/Horizontal_archivos/page0004.htm
http://anecdotariocochabamba.blogspot.com/2011/08/la-fundacion-de-elfec.html

Décret suprême n° 6264, 26 octobre 1962: http://www.gacetaoficialdebolivia.gob.bo/normas/buscar/6264

Décret suprême n° 24024, 7 juin 1995: https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-24024.html

https://www.noticiasfides.com/economia/-privatizacon-de-la-distribucion-de-energia-electrica-107003

Décret suprême n° 1178, 29 mars 2012: https://www.lexivox.org/norms/BO-DS-N1178.html

https://www.lostiempos.com/especial-multimedia/20171030/papeles-panama-actas-develan-nombres-offshore-del-caso-comteco-elfec
https://edictos.organojudicial.gob.bo/Home/Detalle/13192
https://www.bbv.com.bo/Media/Default/Archivos/Fichas/VID_CAR.PDF
https://www.bbv.com.bo:11113/Content/Uploads/PROSELFECV.pdf

[98]https://bolivia.unfpa.org/sites/default/files/pub-pdf/Caracteristicas_de_Poblacion_2012.pdf
http://enlace.comunicacion.gob.bo/index.php/2017/05/01/en-bolivia-96-de-cada-100-habitantes-urbanos-y-99-de-cada-100-habitantes-rurales-estan-ocupados/

[99]Plan nacional de desarrollo “Bolivia digna, soberana, productiva y democrática para vivir bien” – Lineamientos estratégicos 2006-2011.

(Documents divers nº DS29272, 12 septembre 2007: https://www.lexivox.org/norms/BO-MISC-DS29272.html)

Citation originale:

El objetivo es lograr la convivencia equilibrada y la complementariedad con equidad de la Economía Estatal, la Economía Comunitaria –que se asienta en procesos productivos, impulsados por organizaciones sociales, comunitarias, y micro y pequeños empresarios, artesanos, organizaciones económicas campesinas, organizaciones productivas, comunidades, y asociaciones urbanas y rurales–, la Economía Mixta y la Economía Privada.

[…]

Capítulo IV

Bolivia productiva

Sección 4.1

La formación de la matriz productiva nacional

La dimensión económica del Plan Nacional de Desarrollo (PND) contribuirá a la transformación de la matriz productiva para cambiar el actual patrón primario exportador excluyente.

La estructura de la matriz productiva nacional está formada por dos grupos de sectores: los estratégicos generadores de excedente y los generadores de empleo e ingresos. De manera transversal se encuentran los sectores de infraestructura para la producción y apoyo a la producción.

Los sectores estratégicos están integrados por hidrocarburos, minería, electricidad y recursos ambientales, que resguardan la nacionalidad porque abarcan los recursos naturales, recuperados y reconocidos como patrimonio del Estado. Requieren elevadas inversiones en tecnología, son intensivos en capital y a su vez tienen gran capacidad para generar excedentes.

Esta característica plantea la necesidad de que el Estado sea protagonista del desarrollo mediante la creación o refundación de empresas estatales que promuevan el desarrollo de estos sectores, maximice el excedente económico, su apropiación, uso y distribución a través de la reinversión además de inversiones y transferencias a otros sectores que componen la matriz productiva y la matriz sociocomunitaria, optimizando su uso para diversificar la economía y mejorar el bienestar social en un contexto de equilibrio con el medio ambiente.

Los dos pilares del desarrollo, hidrocarburos y minería, corresponden a la actividad extractiva basada en la producción de recursos no renovables. Ambos sectores generan una renta para exploración y explotación, y también para su industrialización.

Los generadores de excedente son de alta rentabilidad y por lo tanto son atractivos para el capital extranjero. En este sentido, se propone una política de tratamiento a la inversión extranjera que otorgue seguridad jurídica y reglas claras sobre su aporte al Estado y a la sociedad.

Los hidrocarburos, en especial el gas natural, se destacan por ser recursos de carácter estratégico en la región latinoamericana y a nivel mundial. Por este motivo, en el país se requiere la presencia efectiva del Estado en el ciclo productivo.

Los hidrocarburos y la minería son intensivos en capital, requieren grandes inversiones a largo plazo, tecnología y mano de obra especializada, y tienen limitados encadenamientos con el resto del aparato productivo nacional. Por estas razones, el país necesita alianzas estratégicas con el sector privado nacional e internacional y con otras naciones a objeto de establecer criterios de desempeño para generar circuitos virtuosos entre el Estado y las empresas transnacionales.

[100]Álvaro García Linera: El “capitalismo andino-amazónico”
Le monde diplomatique, édition chilienne, janvier 2006.
https://rebelion.org/el-capitalismo-andino-amazonico/

Citation originale:

El triunfo electoral del Movimiento al Socialismo (MAS) y de Evo Morales […] la descolonización del Estado y la implementación de un nuevo modelo económico marcarán, desde el primer día, al gobierno de la izquierda indígena que acaba de iniciar un proceso de cambio irreversible para el próximo medio siglo.

[…] nuestras fuerzas se encaminarán fundamentalmente a la puesta en marcha de un nuevo modelo económico que he denominado, provisoriamente, « capitalismo andino-amazónico ». Es decir, la construcción de un Estado fuerte, que regule la expansión de la economía industrial, extraiga sus excedentes y los transfiera al ámbito comunitario para potenciar formas de autoorganización y de desarrollo mercantil propiamente andino y amazónico.

En los siguientes 50 años predominará en Bolivia la economía familiar estructural, base de las últimas rebeliones sociales; el desafío es qué hacer con ella. El nacionalismo revolucionario de los años ’50 pensaba que la comunidad desaparecería y que todos se volverían industriosos, modernos, capitalistas y asalariados, pero eso no ocurrió y, en la actualidad, el mundo moderno representa sólo entre el 7% y 15% de la economía y de la población económicamente activa (PEA). Hoy pensamos que, al menos, podemos idear un modelo para que lo comunitario deje de estar subsumido de manera brutal a la economía industrial, evitando que lo moderno exprima y quite todas sus energías a lo comunitario, potenciando su desarrollo autónomo. Para ello contamos con el Estado y con el excedente de los hidrocarburos nacionalizados.

El triunfo del MAS abre una posibilidad de transformación radical de la sociedad y el Estado, pero no en una perspectiva socialista (al menos en corto plazo), como plantea una parte de la izquierda. Actualmente hay dos razones que no permiten visualizar la posibilidad de un régimen socialista en nuestro país. Por un lado existe un proletariado minoritario demográficamente e inexistente políticamente; y no se construye socialismo sin proletariado. Segundo: el potencial comunitarista agrario y urbano está muy debilitado. En los últimos 60 años se ve un retroceso de la actividad comunitaria productiva y una erosión de los lazos comunitarios. Sigue habiendo comunidad, pero ésta ha implosionado internamente en estructuras familiares.

[…]

[101]Maristella Svampa et Pablo Stefanoni: « Entrevista a Álvaro García Linera: “Evo simboliza el quiebre de un imaginario restringido a la subalternidad de los indígenas” », Observatorio Social de América Latina (OSAL), année VIII, Nº 22. Buenos Aires, CLACSO, septembre 2007.

http://bibliotecavirtual.clacso.org.ar/ar/libros/osal/osal22/AC22SvampaStefanoni.pdf

Citation originale:

Creo que el concepto de capitalismo andino-amazónico ha resistido su prueba de fuego y lo considero un concepto teóricamente honesto y comprensivo de lo que puede hacerse hoy. No le hace concesiones a los radicalismos idealistas con los que se ha querido leer el proceso actual, estilo James Petras, porque interpreta la posibilidad de las transformaciones en Bolivia no a partir del deseo ni de la sola voluntad. El socialismo no se construye por decreto ni por deseo, se construye por el movimiento real de la sociedad. Y lo que ahora está pasando en Bolivia es un desarrollo particular en el ámbito de un desarrollo general del capitalismo. Bolivia es capitalista en el sentido marxista del término, aunque no plenamente capitalista y esa es su virtud. A esa particularidad de capitalismo local que combina procesos de subsunción formal y subsunción real lo hemos llamado capitalismo andino-amazónico. Puede ser frustrante para las lecturas idealistas pero creo que es un concepto honesto intelectualmente, que ha resistido el debate y la realidad. No es que sea lo que uno quiere, nuestro objetivo; lo que decimos es que las posibilidades de transformación y emancipación de la sociedad boliviana apuntan a esto. A reequilibrar las formas económicas no capitalistas con las capitalistas, a la potenciación de esas formas no capitalistas para que, con el tiempo, vayan generando procesos de mayor comunitarización que habiliten pensar en un poscapitalismo. El posneoliberalismo es una forma de capitalismo, pero creemos que contiene un conjunto de fuerzas y de estructuras sociales que, con el tiempo, podrían devenir en poscapitalistas