Quelques éléments historiques[1]
Le résumé qui suit reprend des éléments formulés sur la base de recherches historiques. Leur degré de véracité peut donc osciller, entre fait certain, hypothèse, ou erreur. Néanmoins la science prévaut d’emblée sur les constructions mentales fabriquées de toutes pièces dans l’objectif de "prouver" ce qu’on veut affirmer comme "vrai" (comme le fait le sionisme, dont il est question plus loin).
Voici la configuration de la région à l’époque de la sortie des Hébreux d’Égypte vers le nord, sous la conduite de Moise (vers le XIV-XIII av. n. è. :
Au cours de leur déplacement, les Hébreux soumettaient des peuples installés sur les territoires qu’ils atteignaient. C’est probablement au XIIe siècle av. n. è. qu’est né le royaume d’Israël. Des conflits internes conduisaient vers 930 av. n. è. à une division en deux Royaumes séparés : Israël au nord, Juda au sud.
En 924 av. n. è. les Égyptiens envahissaient Juda et Israël. Aux IXe et VIIIe siècles av. n. è. l’Empire assyrien, qui dominait alors la région, constituait la principale menace pour les royaumes hébreux. Israël et Juda tombaient bientôt sous son joug. En 612 av. n. è. la puissance assyrienne cédait la place à l’Empire néo-babylonien. En 539 av. n. è. le roi perse Cyrus s’emparait de Babylone. Puis la sphère d’influence perse et donc les royaumes juifs étaient conquis par les Grecs. Les Juifs se soulevèrent, créant en 142 av. n. è. le royaume indépendant de Judée, dont l’existence fut de courte durée : En 63 av. n. è. il était intégré à l’Empire romain.
Dès le début du IVe siècle de n. è. la plupart d’entre les Juifs avaient quitté leurs territoires pour le Proche-Orient ou les rivages méditerranéens, s’installant aux grands carrefours commerciaux et dans les cités portuaires. Ce processus est connu sous le nom de diaspora et s’est perpétué durant des siècles à l’échelle mondiale.
Les prétentions territoriales de la part des sionistes
L’interprétation de l’histoire concernant le peuple juif, du point de vue sioniste, se présente essentiellement sous deux variantes.
Benjamin Netanyahou
Parlant d’Israël, il se réfère aux territoires de Judée et Samarie. Grossièrement, il reste ainsi dans la perspective des royaumes d’autrefois. Toutefois il adopte naturellement une vision artificielle, faisant comme si le cours de l’histoire intervenu depuis trois millénaires n’aurait en rien modifié la signification du point de référence initial[2] :
Le peuple juif n’est pas un occupant dans sa propre terre, y compris dans notre capitale éternelle Jérusalem ni en Judée et Samarie.
Et il n’hésite pas à prononcer des affirmations mensongères, comme par exemple au sujet d’un éventuel démantèlement des implantations de colons en Cisjordanie[3] :
Il est impossible de déraciner une implantation dans la Terre d’Israël, ni des Juifs ni des Arabes, nous ne déracinons pas les gens.
La "Terre promise" dans tout son étendu
Selon la Thora [Bible][4] :
Genèse 15:18 :
L’Éternel conclut avec Abraham une Alliance, en disant : "J’ai octroyé à ta race ce territoire, depuis le torrent d’Égypte jusqu’au grand fleuve, le fleuve d’Euphrate."
C’est sur cette sentence divine que se basent les sionistes le plus intransigeants face à la réalité réelle.
Le "torrent d’Égypte" est interprété comme désignant le Nil. Les frontières Est et Ouest sont donc déterminées précisément respectivement par l’Euphrate et le Nil. Dieu n’a pas daigné se prononcer sur les frontières Nord et Sud. Au Nord, les sionistes assument qu’évidemment c’est la côte méditerranéenne. Au Sud, ils procèdent en tirant une ligne droite. Le point de départ de cette ligne à l’Est, c’est l’embouchure du Chatte al-Arab qui forme la trajectoire finale combinée de l’Euphrate et du Tigre. À l’Ouest, la détermination du point de départ de cette ligne est moins évidente. Ce qui s’appelle le Nil est un tronçon de fleuve qui suit deux fleuves distincts, le Nil bleu (qui a sa source en Éthiopie) et le Nil blanc (qui a sa source sur le bord Nord du lac Victoria en Ouganda). Les deux derniers se rejoignent au Soudan et forment le Nil. Même les sionistes les plus doctrinaires ne peuvent prétendre aller aussi loin au-delà de l’Égypte. Ils choisissent de façon plus ou moins arbitraire (qui semble être situé autour du centre de l’empire antique de l’Égypte, Louxor).
Voici ce que cela donne :
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L’autrice du post est Nili Kupfer-Naouri. Voici quelques indications concernant le personnage[5].
Naouri réside actuellement à Jérusalem, où elle dirige le cabinet d’avocat NN, spécialisé dans le conseil et encadrements des nouveaux immigrants. Parmi les fonctions qu’elle assume :
– déléguée aux institutions sionistes du Likoud (le parti politique du Premier ministre Benyamin Nétanyahou)
– membre de la Présidence du Comité d’action sioniste (dans le cadre de l’Organisation sioniste mondiale),
Son père est Jacques Kupfer (1946‑2021), qui a assumé de nombreuses fonctions dans des organisations sionistes :
– membre exécutif du Congrès sioniste mondial
– présidence de l’organisation juive de jeunesse BETAR en France
– présidence de Herout France (Herout : "Liberté", Parti nationaliste israélien, fondé en 1948 par Menahem Begin, héritier de l’Irgoun et du parti sioniste révisionniste de Vladimir Jabotinsky)
– directeur de l’Agence juive
– président adjoint du Likoud mondial
Message que Jacques Kupfer a écrit Aux betarim de la 1re heure À tous les membres du Betar Aux membres du Bne Zeev Aux membres du Front des Étudiants Juifs Aux membres du Herouth et du Likoud de France Aux membres de l’Adkah Aux membres d’Israel is Forever Vous avez changé le visage du mouvement en France. Vous avez combattu et vous avez toujours su défendre le drapeau d’Israël. Dans un de ses textes, Jabotinsky revient sur la légion juive et les grandes réalisations du mouvement et de la légion durant la 1re guerre mondiale. Il déclare que les soldats de la Légion juive peuvent à juste titre se placer devant une glace, être fiers de leur bataille et se saluer. Vous aussi mes amis, vous avez combattu sans jamais reculer devant l’ennemi; ni dans le combat physique ni dans l’idéologie sioniste flamboyante et grandiose, et le tout avec fierté. Vous avez toujours tenu très haut notre bannière et vous avez modifié l’aspect du judaïsme français. Alors vous aussi vous pouvez vous regarder avec fierté et vous saluer. À vous tous mes frères de combat, j’étais fier d’avoir la chance de présider nos mouvements. À vous tous un grand Tel Hai! Jacques Kupfer |
Note à propos de "À vous tous un grand Tel Hai!" Le site de Tel Hai a été fondé en 1916 par un groupe de gardes du Hashomer. Après la Première Guerre mondiale, Tel Hai et d’autres localités de Galilée ont souffert de la révolte arabe contre les Français. En janvier 1920, deux membres de Tel Hai ont été tués lors d’une attaque arabe, et le 1er mars, six autres sont morts lorsque des centaines d’Arabes attaquèrent la colonie. Parmi les victimes se trouvait Yosef Trumpeldor, le jeune commandant des gardes. Tel Hai fut abandonné, mais les batailles ne cessèrent que quelques mois plus tard, après quoi les colons revinrent reconstruire leurs maisons. Depuis lors, Tel Hai est un symbole d’héroïsme. Trumpeldor aurait exclamé "Il est bon de mourir pour notre pays" avant de mourir, et Tel Hai est devenu un cri de ralliement pour la résistance juive. |
Nili Kupfer-Naouri est Coordinatrice de l’association "Israel Is Forever", fondée par son père. Après le décès de celui-ci en 2021, elle en a pris la succession. Cette association veut "mobiliser les forces sionistes francophones". Le coordinateur Haïm Berkovits écrit dans un éditorial publié en janvier 2024 : "La seule place d’un Juif est sur la Terre d’Israël." Kupfer-Naouri a publié un message sur Facebook qui dit : "Le glas de la galout a sonné! Juifs de France, d’Europe, du monde : il est temps de rentrer à la Maison." (Galout, qui signifie "Exil", ‑ ou aussi Tefutzah, qui signifie "dispersé" ‑ sont des mots employés pour désigner la diaspora.)
L’activité de Kupfer-Naouri est étroitement associée au rôle que joue Bezalel Smotrich, ministre des Finances, et membre du Parti sioniste religieux. Les deux, tout en promouvant la vision du "Grand Israël" dans son intégralité, suivent une stratégie pragmatique. Dans l’immédiat ils mettent en avant l’objectif d’un Israël aux frontières inspirées par le mandat attribué à la Grande Bretagne après la 1re Guerre mondiale.
À titre d’exemple, on peut rappeler le déroulement d’une soirée de gala organisée à Paris le 19 mars 2023 par l’association "Israel is forever".
Sur l’image de gauche on voit, à la tribune, Kupfer-Naouri et Smotrich. L’image de droite montre de plus près la figure qui schématiquement désigne les frontières d’une Israël "agrandie" selon la vision des présentateurs.
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La carte réelle correspondante est celle reproduite ci-dessous.
| Le mandat de Palestine accordé à la Grande-Bretagne lors de la conférence de San Remo en 1920 comme région d’un foyer national juif |
Zone approximative dans laquelle les Juifs espéraient établir un foyer national | |
Région séparée de la Palestine par la Grande-Bretagne en 1921, donnée à l’émir Abdullah et nommée Transjordanie | |
Région cédée par la Grande-Bretagne au mandat français de Syrie en 1923 |
Le texte de la Thora pris à la lettre
Le récit donné par la Thora (Bible) ne constitue pas une documentation rapportant des faits historiques avérés. En effet les textes bibliques recueillent ce que transmet une tradition orale porteuse des souvenirs venant de loin dans le temps, des ancêtres du peuple d’Israël. Mais la Thora sert de référence aux adeptes de la "Grande Israël" et il convient de s’y référer pour mettre en évidence les tenants et les aboutissants de ceux-là. Voici quelques passages essentiels pour la compréhension du sujet traité ici. (La Torah se divise en cinq livres : la Genèse, l’Exode, le Lévitique, les Nombres et le Deutéronome.)
Genèse 15:18
Ce jour-là, l’Éternel conclut avec Abraham une Alliance, en disant : "J’ai octroyé à ta race ce territoire, depuis le torrent d’Égypte jusqu’au grand fleuve, le fleuve d’Euphrate."
Genèse 17:8
"À toi et à ta race après toi, je donnerai le pays où tu séjournes, tout le pays de Canaan, en possession à perpétuité, et je serai votre Dieu."
Deutéronome 7:1
"Lorsque l’Éternel, ton Dieu, t’aura fait entrer dans le pays dont tu vas prendre possession, et qu’il chassera devant toi beaucoup de nations, les Héthiens, les Guirgasiens, les Amoréens, les Cananéens, les Phéréziens, les Héviens et les Jébusiens, sept nations plus nombreuses et plus puissantes que toi."
Deutéronome 7:2
"Lorsque l’Éternel, ton Dieu, te les aura livrées et que tu les auras battues, tu les dévoueras par interdit, tu ne traiteras point d’alliance avec elles, et tu ne leur feras point grâce."
Deutéronome 20:16
"Mais dans les villes de ces peuples dont l’Éternel, ton Dieu, te donne le pays pour héritage, tu ne laisseras la vie à rien de ce qui respire."
Ces paroles de Dieu sont censées justifier l’idée que l’État d’Israël actuel incarne ‑ partiellement ‑ la patrie de tous les Juifs du monde. Mais elles servent aussi aux sionistes comme archétype à suivre dans leur action salvatrice : annihiler au sens littéral du terme les Palestiniens présents sur la terre promise.
Juillet 2025
[1]. https://books.openedition.org/septentrion/48734
[2]. Benjamin Netanyahou, [@netanyahu], "The Jewish people are not occupiers in their own land, including in our eternal capital Jerusalem nor in Judea and Samaria, our historical homeland.", X.
[3]. https://www.i24news.tv/fr/actu/international/moyen-orient/1562781258-la-judee-samarie-est-notre-patrie-notre-terre-netanyahou
10 juillet 2019.
[4]. On trouve sur Internet diverses pages montrant de façon exhaustive les textes de la Bible, inutile d’indiquer un lien particulier.
[5]. https://www.docdroid.net/yKEA5gQ/nili-kupfer-naouri-pdf
[6]. https://hassidout.org/barouh-dayan-haemet-jacques-kupfer-74-ans-a-quitte-ce-monde-le-26-tevet-5781-10-janvier-2021/