L’Union européenne
un consortium au service des impérialismes européens
et un ennemi
des classes ouvrières d’Europe et des peuples du monde

Dans une contribution intitulée A PROPOS DES ÉTATS-UNIS D’EUROPE écrite en 1915, le grand théoricien et stratège communiste LÉNINE rétorquait ceci aux idéalistes qui avançaient le mot d’ordre politique immédiat des ÉTATS-UNIS RÉPUBLICAINS D’EUROPE [1] :

« Du point de vue des conditions économiques de l’impérialisme, c’est-à-dire de l’exportation des capitaux et du partage du monde par les puissances coloniales « avancées » et « civilisées », les États-Unis d’Europe sont, en régime capitaliste, ou bien impossibles, ou bien réactionnaires ».

Plus loin il ajoutait :

« Les États-Unis d’Europe, en régime capitaliste, équivaudraient à une entente pour le partage des colonies. Or, en régime capitaliste, le partage ne peut avoir d’autre base, d’autre principe, que la force. Un milliardaire ne peut partager le « revenu national » du pays capitaliste avec qui que ce soit, autrement qu’ »en proportion du capital » (…). »

Enfin, Lénine ajoutait encore :

« Des ententes provisoires sont possibles entre capitalistes et entre puissances. En ce sens, les États-Unis d’Europe sont également possibles, comme une entente des impérialistes européens… Dans quel but? Dans le seul but d’étouffer en commun le socialisme en Europe, de protéger en commun les colonies accaparées contre le Japon et l’Amérique (…). »

Ces considérations, appliquées aux configurations actuelles du système impérialiste mondial en crise, gardent toute leur vérité scientifique et permettent d’analyser et de comprendre la nature et les fonctions de cette « entente » que représente l’UE, et le rôle de ses institutions.

L’Union Européenne est un consortium, une entente réactionnaire entre impérialismes européens ayant pour buts :

Le partage du monde pour l’exportation des capitaux
et l’extension des marchés de marchandises

Ce partage se fait dans des confrontations avec les autres impérialismes internationaux, anciens et nouveaux (émergents). Chaque État impérialiste s’entend et rivalise avec les autres pour l’accès aux matières premières des pays dominés, pour vendre les marchandises et les services de ses monopoles nationaux, pour exporter ses capitaux, pour surexploiter le prolétariat local de ces pays.

Après la deuxième guerre mondiale, les USA ont trouvé en Europe de l’Ouest affaiblie par les destructions un espace favorable à l’exportation de leurs capitaux  et à la constitution d’un pacte militaire, l’alliance atlantique, contre l’URSS et les démocraties populaires. En même temps alliés et rivaux, des pays impérialistes européens ont travaillé pour s’émanciper de la tutelle étasunienne pour réaliser leurs propres intérêts. En France, la fraction des monopoles représentée politiquement par De Gaulle a agi dans ce sens. Après l’effondrement de l’URSS et des pays du Pacte de Varsovie retournés au capitalisme, l’UE constitue toujours le moyen d’affirmer les intérêts propres des pays capitalistes européens concurrents des USA, tout en collaborant avec eux pour contrer les impérialismes nouveaux et émergents qui s’opposent à leurs intérêts communs.

Au sein même de l’UE, les puissances capitalistes dominantes (Allemagne, France) imposent leurs intérêts aux autres États européens. Généralement, ils s’unissent mais en même temps ils rivalisent en fonction de leurs propres intérêts nationaux et de leur force respective.

Concernant le partage du monde, les évènements internationaux de ces dernières années (Libye, Syrie…) illustrent que l’unité de façade entre les impérialismes occidentaux en confrontation avec les impérialismes émergents ne tarde jamais à se lézarder.

L’incapacité à construire une politique militaire européenne commune exprime leurs contradictions.

Ainsi, l’Allemagne et la France ont intérêt à diriger ensemble les rapports économiques sur l’ensemble du continent, mais l’une et l’autre rivalisent pour en assurer le leadership. Leurs contradictions en Europe et dans le monde se manifestent à propos de chaque évènement.

Les institutions politiques et économiques de l’UE (Commission européenne, Conseil de l’UE, Conseils des ministres, parlement, Banque Centrale Européenne, institut monétaire européen) ont pour rôle de fixer les lignes communes des impérialismes dominants et d’arbitrer les conflits qui les dissocient. Comme organisme financier suprême, la Banque Centrale Européenne joue un rôle majeur en régulant les activités économiques à l’intérieur de l’Europe et en influençant les échanges avec l’extérieur de la zone euro. L’Euro est l’instrument monétaire qui permet au capital financier d’agir sur les politiques économiques au sein de l’espace européen et sur les échanges avec les puissances concurrentes.

Les institutions élues de l’UE ne sont que des chambres d’enregistrement des décisions prises par les architectes des politiques dictées par les intérêts du capital financier de source européenne.

Pour résumer, l’UE est une entente entre pays impérialistes d’Europe pour dominer et exploiter les peuples et les prolétaires des autres parties du monde, en unité et en contradiction avec les USA et les autres puissances impérialistes anciennes et récentes. Elle est une ennemie des peuples et de la paix entre les peuples.

Au sein même de l’Europe, l’unité est circonstancielle. Seuls commandent les intérêts des monopoles nationaux des pays impérialistes qui la composent.

L’exploitation maximale, l’oppression politique et idéologique
exercée sur les classes ouvrières d’Europe

Instrument d’oppression et d’exploitation des peuples non européens, l’UE est en même temps un instrument de l’oppression et de l’exploitation des peuples et des prolétariats des pays d’Europe, y compris ceux des pays impérialistes dominants.

Ces pays, comme l’ensemble du système impérialiste mondial sont aujourd’hui plongés dans une crise générale inextricable.

Tous les pays de l’UE, aussi bien les plus puissants comme la France ou l’Allemagne que les plus pauvres comme ceux de l’ex Comecon sont confrontés à cette crise et cherchent des solutions dans le cadre communautaire.

Les organismes supranationaux de l’UE ont pour mission de défendre les intérêts des monopoles d’Europe dans le monde, mais aussi à l’intérieur de l’Europe elle-même et dans chaque pays de cet espace.

Au travers des décisions prises par ses institutions, l’UE impose aux  pays et donc aux travailleurs de ces pays, des régressions sociales catastrophiques.

La méthode « classique » pour redresser les taux de profit des capitaux sans augmenter les prix des marchandises (car il faut être compétitifs), c’est de réduire le prix de la force de travail, c’est-à-dire les salaires directs (fiche de paie) et différés (pensions, protection sociale, services publics).

Toutes les directives européennes visent ce but : accroitre l’exploitation du travail, paupériser le prolétariat pour, comme ils disent, relancer la croissance. Ainsi, en France, l’État distribue des dizaines de milliards d’Euros aux patrons (CICE, BPI, pacte de responsabilité) afin de muscler leur trésorerie et d’accroitre la rentabilité du capital, tandis qu’en même temps il augmente les impôts, bloque les salaires, et taille dans les « dépenses sociales ».

Toutes les catégories de travailleurs exploités et en premier lieu les ouvriers constatent et supportent toutes ces attaques.

Pour mieux les faire accepter, les gouvernements successifs de droite et de gauche se retranchent derrière les directives de l’UE qu’ils prétendent être contraints d’appliquer malgré eux, alors qu’ils en sont tous les coauteurs.

Lénine avait raison : les États-Unis d’Europe sont bien, par nature, REACTIONNAIRES.

Comment affronter cette machine réactionnaire ?

Deux stratégies se présentent habituellement : la changer de l’intérieur, ou en sortir.

Changer l’UE de l’intérieur est la politique des réformistes et des prétendus communistes. Il serait possible, selon eux, d’infléchir dans un sens moins douloureux les politiques réactionnaires des bourgeoisies européennes et même, pourquoi pas, de réforme en réforme, la soustraire aux règles du capitalisme-impérialisme, c’est-à-dire de la dictature du capital financier. Ils appliquent là les mêmes dérives que celles qu’ils pratiquent dans chaque État. Ici, en France, il s’agit du P“C”F, du Front de gauche, des altermondialistes, des trotskistes…

Réactionnaire dans ses gènes, il n’est pas possible de transformer l’UE. Autant vouloir transformer une crotte de chien en mousse au chocolat!

Alors il faut en sortir? C’est le point de vue des BBR gaullistes et des franchouillards du PRCF. Pour eux, sortir de l’Europe est le début nécessaire d’un processus de renaissance nationale et progressiste. La France (capitaliste) n’aurait d’autre salut que de regagner son indépendance vis-à-vis des USA auxquels l’Europe serait inféodée, et vis-à-vis de l’Allemagne hégémonique. Ils oublient simplement que la France est un pays impérialiste pour lui-même d’abord, et que tant que la bourgeoisie restera au pouvoir elle restera un pays impérialiste réactionnaire à l’intérieur et belliciste à l’extérieur. Outre qu’une « indépendance » retrouvée ne changerait rien au sort des prolétaires, les relents cocardiers de la politique de ces patriotes de gauche renforcent malheureusement les slogans chauvins d’autres forces, ultraréactionnaires celles-là.

Pour le ROCML, l’UE est une machine de guerre et d’exploitation des peuples et des classes ouvrières. Cette machine, il faut la détruire. Et pour la détruire, il n’y a pas d’autre moyen que de battre les bourgeoisies au pouvoir dans chaque État, pour les soustraire aux mécanismes qui ont conduit à sa construction. Sortir la France de l’UE n’est pas en soi gênant. Mais sans changer le système économique capitaliste et la nature du pouvoir d’État, la bourgeoisie française appliquera toute seule, sans besoin de directives européennes, les mêmes recettes que l’UE applique pour résoudre les problèmes inextricables liés à la crise.

Ou bien les bourgeoisies européennes déchirées par leurs intérêts inconciliables détruiront elles-mêmes leur UE, ou bien les classes ouvrières victorieuses dans un ou plusieurs États résoudront elles-mêmes cette question. Dans l’intérêt des prolétaires, cette fois.

Quelle tactique
pour les élections parlementaires européennes du 25 mai ?

Il est bien sûr hors de question d’aller renforcer l’illusion qu’il est possible de transformer l’UE de l’intérieur.

Les organisations qui ont formé le ROCML ont appelé en 2005 à boycotter le référendum sur le Traité Constitutionnel Européen parce qu’il donnait plus de force aux bourgeoisies européennes pour mener leur politique réactionnaire au service des monopoles et du capital financier.

Aujourd’hui, le ROCML constate qu’il n’existe pas en France une force politique ayant pour but de détruire l’Europe capitaliste et capable d’affaiblir de l’intérieur ses structures politiques. En conséquence, pour les élections du 25 mai 2014, il n’appellera à voter pour aucune des listes présentées. Celles de droite, et d’extrême droite, c’est évident, mais pas plus celles de gauche ou de la gauche de la gauche, car toutes diffusent l’idée fausse qu’une autre Europe est possible et que le parlement de Bruxelles pourrait permettre d’avancer dans ce sens.

Affaiblir et détruire l’Europe impérialiste ne pourra se faire que par le développement des luttes prolétariennes anticapitalistes dans chacun des pays, par l’établissement de structures internationalistes pour coordonner ces luttes économiques et politiques, avec comme objectif la conquête du pouvoir dans l’un ou plusieurs pays d’Europe.

Le Rassemblement Organisé des Communistes Marxistes-Léninistes.

Le 10 mai 2014.

 


[1]. Lénine, À propos du mot d’ordre des États-Unis d’Europe (1915); Oeuvres, tome 21; Paris, Éditions sociales, 1960; p. 351-355, ici p. 352, 353, 354.