Contradiction du mouvement syndical
et travail politique des communistes
LA VOIX DES COMMUNISTES, no 2, décembre 2009 – p. 6-8
Avant l’ouverture du 49e congrès de la CGT, l’opposition interne à la direction confédérale personnalisée par Bernard Thibaut, les défenseurs du "syndicat de classe et de masse", se sont mobilisés pour dénoncer le passage du syndicat sur une ligne de collaboration des classes et la trahison, par ses chefs, de la CGT historique. Et il est vrai que les actes de ces derniers (ou leur inaction!), leurs déclarations dans la période récente donnent du grain à moudre aux militants combattifs pour affronter la direction confédérale.
Les militants de base, dans l’expérience de leurs luttes, découvrent en effet l’absence totale de soutien, voire le travail de sape des structures de leur syndicat, et ils se rendent à l’évidence : "On n’est pas soutenu par les structures, les dirigeants préfèrent parler dans les salons du pouvoir et du patronat que d’être avec nous sur le terrain pour renforcer nos luttes."
Cette prise de conscience ne manquera pas de s’élargir et les communistes du ROCML s’y emploient.
Des initiatives pour coordonner les courants opposés à Bernard Thibaut ont lieu.
Du jamais vu dans l’histoire de la CGT, un militant des métallos du nord, Jean Pierre Delannoy oppose sa candidature à celle de Bernard Thibaut.
Ces faits indiquent que la direction confédérale de collaboration des classes est de plus en plus contestée et que ses opposants peuvent s’appuyer sur son rejet grandissant par les ouvriers. Cette situation est positive.
En même temps, certains aspects de cette contestation qui cherche à s’organiser nous interrogent.
Que signifie par exemple la référence au syndicalisme "de classe et de masse"?
À quel moment, suite à quel tournant, la direction confédérale l’aurait-elle abandonnée, dans les textes bien sûr, mais aussi dans les faits?
Ce tournant est‑il récent ? Comment a‑t‑il pu s’imposer? Quel rôle le PCF y a‑t‑il tenu?
La reconquête de la direction de la centrale syndicale par les syndicalistes de lutte de classes est‑elle possible? Quelles en sont les conditions?
La division des organisations communistes marxistes-léninistes, l’absence d’un parti communiste révolutionnaire unique ne rend‑elle pas cette perspective inaccessible?
Quels sont la ligne et le rôle des communistes aujourd’hui, dans cette situation?
Autant de questions qui ne peuvent rester sans réponses si l’on ne veut pas rester dans la velléité et créer des illusions et des déceptions.
En ce qui concerne le ROCML, nous pensons que les communistes doivent dire la vérité. Entre eux, et au prolétariat et aux masses exploitées.
Cette vérité est selon nous la suivante :
1) La CGT est devenue un syndicat intégré aux rouages du système capitaliste. Ses structures sont dans l’ensemble dominées par l’idéologie et la pratique de la collaboration avec le patronat et le pouvoir politique bourgeois.
2) L’indépendance du syndicat à l’égard des partis politique est une fable destinée à dédouaner le rôle du PCF dans sa dégénérescence. La ligne et l’action du syndicat sont le produit de l’action des militants politiques ou influencés dans l’organisation syndicale. C’est le PCF, allié à d’anciens courants réformistes, qui a impulsé la ligne actuelle de la CGT. Ceux qui se cachent derrière l’apolitisme syndical sont des menteurs! Ceux qui les écoutent doivent ouvrir les yeux.
3) Tant qu’une organisation communiste révolutionnaire unique n’existera pas, toutes les tentatives de contestation à l’intérieur du syndicat, visant à en reprendre la direction seront vaines, marquées par les calculs et les divisions sectaires, et perméables aux différents courants réformistes même d’apparence radicale. L’existence de cette organisation communiste unique, le Parti, est la tâche centrale actuelle des communistes.
4) Les communistes militent dans les syndicats pour défendre activement les intérêts des travailleurs. Ils participent aux luttes pour les faire gagner, pour expliquer la nature et les causes des trahisons des directions des syndicats réformistes, pour faire progresser la perspective de la révolution, pour rallier à l’organisation d’avant-garde les éléments avancés du mouvement ouvrier afin que l’organisation communiste actuellement encore coupée des masses devienne le parti de la classe toute entière.
ROCML
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Quelques notes de lecture pour illustrer la différence entre
un syndicalisme de lutte de classe dirigé par le parti communiste et le syndicalisme réformiste
Parfois les ouvriers sont victorieux mais leur triomphe est éphémère. Le vrai résultat de la lutte, ce n’est pas le succès immédiat, mais l’union grandissante des ouvriers.
Karl Marx, Friedrich Engels : Le Manifeste du parti communiste
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La grève a toujours été l’arme principale du prolétaire. La grève est la manifestation la plus consciente de la lutte de classe.
(…) L’efficacité de la grève est toujours conditionnée par la combativité des grévistes. De ce point de vue la grève est une incomparable école de la lutte des classes et elle forme les meilleurs combattants du prolétariat.
(…) La violence, c’est le fait social qui résulte de la division en classes et qui ne disparaîtra qu’avec l’extinction des classes. Dès lors, tous les appels hypocrites à des méthodes "plus civilisées" ne font que désarmer la classe ouvrière devant son ennemi, la bourgeoisie armée jusqu’aux dents.
Les ouvriers en grève ne peuvent renoncer à la violence collective sans se condamner eux-mêmes à l’impuissance et à la défaite. La grève "des bras croisés" est une bêtise et une faute. Les grévistes, lorsqu’ils regroupent la majorité du personnel, ont raison d’assurer, au besoin par la violence, l’arrêt total de l’entreprise et ne doivent pas permettre à une équipe de jaunes racolés tant bien que mal de briser le mouvement.
Cette violence organisée et collective du prolétariat en lutte ne peut s’arrêter devant le fétiche du légalisme. La loi est l’expression de la domination capitaliste et le prolétariat est en rébellion légitime et permanente contre le capitalisme et ses lois. Au contraire, les grévistes parviennent plus facilement et plus rapidement à leurs fins lorsqu’ils usent de tous les moyens en leur pouvoir, sans s’arrêter aux dommages qui peuvent en résulter pour l’entreprise.
(…) La grève élève les prolétaires à la conscience de classe plus que ne saurait le faire la simple propagande.
Victorieux ou défaits, les ouvriers se rendent compte que le but, le terme de leur lutte ne peut être que la disparition totale du régime d’exploitation capitaliste.
Maurice Thorez, Les Cahiers du Bolchévisme, n° 1, janvier 1930,
publié dans Maurice Thorez – Oeuvres,
Livre deuxième, tome 1, 1930 – juin 1931, Éditions Sociales, 1950
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Le respect de la "liberté du travail" pouvait avoir un certain sens à l’époque de l’anarcho-syndicalisme qui, par la technique des minorités agissantes forçait parfois la volonté des travailleurs. Mais il y a bien longtemps que la pratique de la consultation, préalable au déclenchement d’une grève a rendu cette cause sans objet.
(…) Il serait plutôt de l’intérêt de tous que prévale l’esprit de négociation. Personne ne se déclare partisan d’un climat chargé d’orages. La réussite d’une grève ne se mesure pas au pourcentage de grévistes qui y ont participé, mais à ses résultats revendicatifs.
Mieux vaut une négociation couronnée de succès par la signature d’un accord positif que l’échec d’une grève largement majoritaire, du moins à ses débuts.
(…) En Mai 68, de la même façon qu’en 1936, il ne vint à l’esprit de personne de sévir contre les initiatives d’occupation des entreprises en grève. Ni le patronat, ni le gouvernement ne songèrent à poursuivre les syndicats des secteurs privés, publics ou nationalisés, qui prirent la responsabilité d’organiser méthodiquement l’occupation. Il est vrai que nul ne peut argüer de la moindre déprédation, de la plus minime négligence d’entretien, de la plus insignifiante manifestation de "chienlit" dans les entreprises occupées.
Georges Séguy : La Grève; 1993, Ed. L’Archipel.
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Entre la stratégie révolutionnaire qui fut celle du PCF agissant sous les directives de la 3e internationale et celle de la CGT de Séguy, un des dirigeants du P."C".F révisionniste, il y a un abîme qui se passe de tout commentaire.
Une question est toutefois posée aux syndicalistes qui s’opposent aujourd’hui à la direction actuelle de la CGT : Quelle ligne faut‑il réintroduire dans les luttes ouvrières et dans le syndicat? Celle impulsée par le Parti Communiste dans la CGTU? Ou celle imposée dans la CGT par des dirigeants du P."C".F révisionniste comme Séguy?
Le virage réformiste de la CGT ne date pas d’hier, camarades!!