Si on ne veut pas accueillir toute la misère du monde
Cessons d’en piller les richesses !
LA VOIX DES COMMUNISTES, no 24, septembre 2018 – p. 31-32
Récemment la question migratoire est revenue d’actualité par la médiatisation du navire humanitaire Aquarius qui a sauvé d’une mort certaine plus de 600 migrants dont de nombreux enfants et femmes enceintes. Jusque-là rien de radicalement neuf, étant donné que depuis 2015 de nombreuses ONG réalisent des missions de sauvetage en méditerranée. Cependant, ce qu’il y de nouveau du moins quant à sa franchise, c’est le rejet pur et simple de l’accueil des migrants de l’Aquarius par l’Italie en la personne de son ministre de l’intérieur d’extrême droite. Cependant il n’y a pas qu’en Italie que l’accueil des migrants sert de grain à moudre aux populistes et fascistes de toutes tendances. Ainsi on avait pu observer les agissements d’un groupe fasciste français à la frontière franco-italienne sur le col de l’Échelle dans les Hautes-Alpes se porter au-devant des migrants traversant les Alpes en plein hiver pour leur barrer la route et les faire s’en retourner en Italie. Ce genre d’agissement indigne, bien qu’il provienne d’un groupe fasciste connu et ait été filmé n’a cependant pas été condamné par le gouvernement français si ce n’est dans les mots. Aucun des militants d’extrême droite ayant participé à cette odieuse mascarade n’aura était inquiété.
Aux États-Unis aussi l’administration Trump accentue sa guerre à l’immigration à la frontière mexicaine. Ainsi il n’aura échappé à personne les images tragiques de ces enfants séparés de leurs parents par les gardes-frontières américains et placés dans des camps d’internement isolés de tout et sans contacts avec leurs proches en attendant d’être rejetés à la frontière.
Les politiques migratoires des États impérialistes et notamment occidentaux, européens et américains qui entretiennent dans l’opinion le rejet de l’autre, la peur de l’étranger, une invasion sous-jacente ou plus minorée d’un flux que nous ne serions pas en capacité de gérer sont un leurre qui masque l’origine réelle du problème migratoire à l’époque de l’impérialisme.
Les arguments "civilisationnels" ou raciaux de l’extrême-droite xénophobe invoquant une spoliation des habitants "de souche", les slogans populistes "America first" et autres sont clairement réactionnaires. Ils servent la bourgeoisie en sapant les bases de l’union de tous les travailleurs en tant que classe hors distinction de nationalité ou d’origine et lui permettent de neutraliser toute action unie du prolétariat contre ses exploiteurs. Ils sont à combattre avec la plus grande fermeté comme une atteinte à la conscience de classe du mouvement ouvrier. Mais il est une autre rhétorique plus douce et plus politiquement correcte qui consiste à dire que "nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde". Sous ses airs policés, cette phrase réduit au simplisme de la charité une question bien plus complexe et masque les contradictions internes de l’impérialisme.
Prenons l’exemple de la France : la France est la cinquième puissance économique mondiale pour 65 millions d’habitants seulement. Ses entreprises transnationales comme Total, Renault, Areva, etc. son présentes aux quatre coins du globe. L’État français, et ces entreprises, pille les ressources naturelles et humaines de plusieurs pays africains ex-colonies françaises. Ces pratiques néocoloniales empêchent une indépendance réelle de ces États ainsi que tout développement économique efficace des pays concernés. Toutes leurs richesses sont captées par les monopoles français, et les cadres techniques locaux qui eux aussi travaillent pour ces entreprises. Les immenses richesses naturelles couplées à une force de travail à bas cout et surexploitée produisent un énorme surprofit aux entreprises françaises qui leur sert à entretenir une couche relativement réduite d’ouvriers hautement qualifiés et une couche supérieure d’aristocratie ouvrière.
Une immense part de la richesse de la France et de ces entreprises provient donc de l’exploitation des ressources économiques de toutes sortes des pays africains mais aussi des guerres de rapines menées au Moyen-Orient comme en Syrie. Cette pratique est celle de toutes les grandes puissances impérialistes.
Il n’est donc pas difficile de comprendre que lorsque l’on s’accapare la quasi-totalité des richesses d’un pays donné ou d’un ensemble de pays, que l’on déstabilise politiquement tel ou tel État allant parfois jusqu’à la guerre pour satisfaire encore un peu plus les appétits de son capitalisme national, les populations des pays concernés se retrouvent réduites à une misère sans nom, exposées à une exploitation capitaliste sauvage et à la guerre.
En parallèle à cela les États sous domination impérialiste en Afrique mais aussi en Asie et en Amérique latine voient se développer chez eux aussi un capitalisme national qui détruit les anciennes formes d’organisation de la société aussi bien politiques qu’économiques. On voit donc se dérouler le même phénomène qu’en Europe au 19e siècle : destruction de la petite économie paysanne et artisanale remplacée par une agriculture utilisant une technique moderne entre les mains de quelques grands propriétaires fonciers et une grande industrie basée elle aussi sur une technique moderne et concentrée dans de grands centres de production. La décomposition de ce système économique fondé sur la petite exploitation agricole et l’artisanat entraine naturellement une paupérisation des habitants des pays concernés, paupérisation encore accentuée par l’oppression impérialiste subie par ces pays. Tous ces facteurs font naitre immanquablement une émigration importante de populations depuis les pays spoliés vers les puissances qui les exploitent.
La vampirisation des richesses de pays comme le Mali, la Centrafrique, le Maroc etc. par la France aspire de ce fait, comme un appel d’air, les miséreux qu’elle a créés vers la métropole impérialiste.
La vague d’immigration que connaissent l’Europe et la France actuellement est donc la conséquence directe non seulement du développement du capitalisme dans les pays d’origine de cette immigration mais aussi des pratiques impérialistes néocolonialistes des puissances européennes en Afrique et au Moyen-Orient.
La domination des puissances impérialistes va de pair avec des conflits interimpérialistes, ce qui fait que dans diverses régions du monde les populations sont victimes non pas d’une unique puissance extérieure, mais subissent l’oppression et l’exploitation qu’incarne collectivement le système impérialiste. Par ailleurs, en ce qui concerne l’Union européenne, elle constitue un bloc impérialiste, dont les États membres, grands et petits, partagent le caractère. Tout cela fait que du point de vue des victimes, les marchandages entre les États impérialistes qui se renvoient la balle entre eux où qui posent en donneurs de leçons moralisateurs les uns par rapport aux autres, sont dépourvus de sens.
Réduire cette problématique à la question de leur accueil charitable ou de leur rejet xénophobe c’est masquer les causes réelles de la situation actuelle sur la migration au niveau mondial, c’est faire le jeu de sa bourgeoisie et de l’impérialisme, légitimer leur oppression économique et politique des millions de travailleurs dans les pays opprimés.
Pour régler le "problème de l’immigration", il faut mettre fin au capitalisme. Dans la société capitaliste, les marxistes-léninistes défendent la libre circulation. Tout immigré doit pouvoir se déplacer librement et avoir les mêmes droits que les populations des pays d’accueil. Ils défendent le principe du travail égal salaire égal aussi dans le cas de l’immigration. Les intérêts de la classe ouvrière sont les mêmes quelle que soit la nationalité. Les travailleurs immigrés doivent s’organiser au sein des organisations de classe du pays : association, syndicat et parti politique. Pour cette raison, nous luttons contre toute sorte de racisme, de chauvinisme et de communautarisme.
Libre circulation pour tous les travailleurs!
Travailleurs du monde entier
unissons-nous contre le capitalisme-impérialisme!