La Russie, pays capitaliste impérialiste
LA VOIX DES COMMUNISTES, no 32, 2e semestre 2024 – p. 29-43
Un contexte qui nécessite clarté
Incontestablement, le système d’économie capitaliste s’étend sur toute la planète. Dans ce cadre, les pays se situent à différents niveaux sur une échelle de développement, et leurs caractéristiques propres varient en conséquence. Aux deux extrêmes il y a, d’un côté, les principales puissances incarnant pleinement le capitalisme monopoliste impérialiste, et de l’autre, les pays dont le "développement" est totalement soumis à l’exploitation de leurs ressources naturelles et humaines au service des puissances impérialistes. Entre les deux les situations varient, de sorte que dans certains cas les avis divergent quant à savoir s’il s’agit de pays impérialistes ou non.
On peut raisonnablement s’abstenir d’essayer de trancher cette question systématiquement pour chaque pays. Mais il est indispensable d’adopter une position claire et nette pour certains, en particulier la Chine et la Russie. Pour la Chine, la raison est évidente, puisque le débat ne se résume pas à savoir si la Chine est un pays "seulement" capitaliste ou une puissance capitaliste impérialiste. En effet le Parti communiste chinois prétend que c’est un "pays socialiste à économie de marché", et il réussit à rallier à cette idée des gouvernements, des militants et des forces politiques ‑ dont les motivations sont diverses, plus ou moins sincères. Notre analyse, bien sûr, réfute et rejette cette mascarade[1]. Pour la Russie, les apparences sont différentes, mais il est également nécessaire d’examiner les interprétations erronées et d’y opposer notre analyse.
Du point de vue économique il est généralement admis que durant la période de transformation puis de dissolution de l’URSS, le capitalisme a été rétabli en Russie. Mais les évènements récents autour de l’Ukraine ont mis en relief des divergences parmi des forces politiques soi-disant communistes, à propos du rôle politique joué par la Russie au niveau international[2]. En pratique, certains ‑ dont notamment le Parti communiste de la Fédération de Russie ‑ propagent l’idée que, dans l’intérêt de l’humanité, il serait nécessaire de se positionner en faveur de la Russie dans ce conflit qui l’oppose aux USA et à l’Union européenne.
Comme pour la Chine, nous dénonçons cette propagande malveillante. Cela dit, afin de dissiper la confusion qui règne à cet égard, il convient de fournir quelques explications.
La question des caractéristiques spécifiques d’un pays impérialiste
Afin d’analyser les caractéristiques de la Russie en tant que pays impérialiste, il convient d’abord de formuler quelques considérations au sujet de l’évolution du système impérialiste mondial depuis l’époque de son apparition.
Les traits fondamentaux de l’impérialisme restent ceux énoncés par Lénine[3] : la concentration des capitaux sous la forme de groupes monopolistiques et la concurrence entre ces groupes au niveau international; la relation intrinsèque entre la sphère économique où dominent ces groupes et la sphère politique assumée par les appareils d’État associés à eux; par conséquent la rivalité entre les capitaux qui les amène à s’affronter pour le partage et le repartage du monde par tous les moyens.
Il faut préciser que le capitalisme au stade impérialiste est un système bâti autour de groupes détenant une position monopolistique pas simplement dans un périmètre national, mais à l’échelle internationale. L’existence de groupes bénéficiant d’une situation monopolistique à l’intérieur de leur pays d’origine ne permet pas à elle seule de désigner valablement ce pays comme pays impérialiste. En outre, l’exportation de capitaux est un trait distinctif du capitalisme impérialiste, non pas considéré isolément, mais dans la mesure où elle constitue un maillon dans le processus d’accumulation élargie du capital.
Lénine souligne cette relation[4] :
Devenue capitaliste la première, et adoptant le libre-échange vers le milieu du 19e siècle, l’Angleterre prétendit au rôle d’"atelier du monde entier", de fournisseur en articles manufacturés de tous les pays, qui devaient, en échange, la ravitailler en matières premières. Au seuil du 20e siècle, on vit se constituer un autre genre de monopoles : tout d’abord, des associations monopolistes capitalistes dans tous les pays à capitalisme évolué; ensuite, la situation de monopole de quelques pays très riches, dans lesquels l’accumulation des capitaux atteignait d’immenses proportions. Il se constitua un énorme "excédent de capitaux" dans les pays avancés.
[…] Tant que le capitalisme reste le capitalisme, l’excédent de capitaux est consacré, non pas à élever le niveau de vie des masses dans un pays donné, car il en résulterait une diminution des profits pour les capitalistes, mais à augmenter ces profits par l’exportation de capitaux à l’étranger, dans les pays sous-développés. […] La nécessité de l’exportation des capitaux est due à la "maturité excessive" du capitalisme dans certains pays, où […] les placements "avantageux" font défaut au capital.
Cependant, certaines caractéristiques concrètes du système impérialiste mondial se sont modifiées.
Lénine montre par quels mécanismes s’est mise en place initialement la concentration des capitaux. Dans les conditions de l’époque, les banques ont joué le rôle central dans ce processus. Après avoir exposé des données chiffrées qui mettent en évidence l’essor des banques en matière de gestion centralisée des capitaux, il conclut[5] :
Mieux peut-être que de longs développements, ces simples chiffres montrent comment la concentration des capitaux et l’accroissement des opérations bancaires modifient radicalement le rôle joué par les banques. Les capitalistes épars finissent par ne former qu’un seul capitaliste collectif. […] En même temps se développe, pour ainsi dire, l’union personnelle des banques et des grosses entreprises industrielles et commerciales, la fusion des unes et des autres par l’acquisition d’actions, par l’entrée des directeurs de banque dans les conseils de surveillance (ou d’administration) des entreprises industrielles et commerciales, et inversement.
Et il constate :
Le remplacement du vieux capitalisme, où régnait la libre concurrence, par un nouveau où règne le monopole, entraine, notamment, une diminution de l’importance de la Bourse. […] En d’autres termes, l’ancien capitalisme, le capitalisme de la libre concurrence, avec ce régulateur absolument indispensable qu’était pour lui la Bourse, disparait à jamais.
Sa définition du capital financier synthétise ces analyses[6] :
Concentration de la production avec, comme conséquence, les monopoles; fusion ou interpénétration des banques et de l’industrie, voilà l’histoire de la formation du capital financier et le contenu de cette notion.
Ultérieurement les mécanismes de fonctionnement du capital financier se sont complexifiés. Le marché boursier reste finalement un rouage essentiel dans la circulation des capitaux. Les banques n’ont nullement perdu leur importance, mais au-delà de la fonction d’accorder des crédits aux entreprises, elles participent substantiellement à la gestion de capitaux placés en actions par l’intermédiaire de fonds d’investissement. Toutefois de tels fonds existent aussi en dehors des institutions bancaires, notamment en tant que sociétés cotées en Bourse, dites sociétés de gestion d’actifs. Certaines parmi celles-ci ont une réputation fortement négative, y compris du point de vue des grands groupes monopolistiques.
La formation des groupes monopolistiques va de pair avec le développement de l’exportation des capitaux et, parallèlement, la concurrence entre ces groupes s’étend à l’échelle internationale. Lénine observe que ces rivalités aboutissent à un partage du monde, en deux étapes[7] :
Les pays exportateurs de capitaux se sont, au sens figuré du mot, partagé le monde. Mais le capital financier a conduit aussi au partage direct du globe.
Première étape[8] :
Et, au fur et à mesure que croissait l’exportation des capitaux et que s’étendaient, sous toutes les formes, les relations avec l’étranger et les colonies, ainsi que les "zones d’influence" des plus grands groupements monopolistes, les choses allaient "naturellement" vers une entente universelle de ces derniers, vers la formation de cartels internationaux.
Deuxième étape[9] :
L’époque du capitalisme moderne nous montre qu’il s’établit entre les groupements capitalistes certains rapports basés sur le partage économique du monde et que, parallèlement et conséquemment, il s’établit entre les groupements politiques, entre les États, des rapports basés sur le partage territorial du monde, sur la lutte pour les colonies, la "lutte pour les territoires économiques ".
Et à l’époque Lénine arrive à la conclusion suivante[10] :
Pour la première fois, le monde se trouve entièrement partagé, si bien qu’à l’avenir il pourra uniquement être question de nouveaux partages, c’est-à‑dire du passage d’un "possesseur" à un autre, et non de la "prise de possession" de territoires sans maitre.
Comme pour les aspects du capital financier, la question du partage du monde ne se présente pas à l’identique actuellement, en comparaison avec l’époque des empires coloniaux. Ceux-ci n’ont pas simplement vu leurs limites géographiques modifiées. Ils ont disparus. Il faut souligner que le terme de "néocolonialisme" est, sous certains égards, trompeur. Il est pertinent pour autant qu’il indique que l’indépendance formelle n’a pas apporté aux pays concernés une indépendance authentique. Ainsi, la référence à la "Françafrique" évoque des aspects réels d’un maintien d’une colonisation non déclarée, par l’impérialisme français. Mais fondamentalement le "partage" du monde ne fonctionne plus sous la forme d’un découpage de la planète en zones réservées, et cependant il n’y a pas un retour aux accords de "non-concurrence" entre groupes monopolistiques, tels que Lénine les constatait pour la phase initiale du "partage du monde". Désormais, les flux d’investissements internationaux sont multilatéraux et fortement imbriqués. Un pays peut effectuer des investissements dans d’autres pays et simultanément recevoir des investissements en provenance de ces mêmes pays.
L’enjeu du partage du monde n’a évidemment pas disparu, mais les mécanismes par lesquels il peut se concrétiser ont évolués. Il n’y a plus guère d’accords entre grands groupes monopolistiques pour définir des limites géographiques à respecter. En période de concurrence pacifique prévaut le principe : "que le meilleur gagne". Ainsi la Chine est une source de préoccupation pour les autres puissances impérialistes, puisqu’elle réussit à capter des "parts de marché" considérables dans divers domaines et à faire en sorte que ses investissements soient accueillis favorablement par de nombreux pays.
La profonde interdépendance économique qui s’est établie entre les principaux pays et régions impérialistes, notamment avec la Chine, fait que le système capitaliste mondial est confronté actuellement à un dilemme. L’interconnexion des investissements internationaux a été pendant longtemps considérée comme bénéfique, mais s’avère problématique, puisqu’il devient de plus en plus difficile pour les "partenaires" de passer de la coopération à l’affrontement direct. Les mesures protectionnistes établies par les puissances impérialistes ne sont qu’un palliatif. Finalement se produit une perspective telle que Lénine aussi l’annonçait à son époque : une guerre entre puissances impérialistes au bout de laquelle le vainqueur impose sa loi au vaincu. C’est le cas de l’Ukraine, dans un cadre relativement restreint. Plus largement, l’Afrique subit des interventions militaires de forces qui tentent de s’imposer en différentes zones. Ces tentatives de "repartage" se font en grande partie en coordination avec des forces politiques et/ou militaires locales.
Malheureusement, face à ces réalités, des appréciations confuses et erronées persistent. Elles se sont nourries d’abord des victoires et des échecs des mouvements de libération nationale, qui ont tant bien que mal imposé la disparition ‑ à quelques résidus près, tels que les "DOM-TOM" pour la France ‑ des empires coloniaux. Par la suite sont apparues différentes théories plus ou moins élaborées. La "théorie des trois mondes" mise en avant par le Parti communiste chinois prétendait représenter le point de vue marxiste-léniniste. Samir Amin a formulé, pour les pays d’Afrique, la consigne de la "déconnexion" à l’égard des puissances impérialistes. Des penseurs au service de la grande bourgeoisie ont créé des "concepts" tels que les "pays émergents" ou le "Sud global". Selon une perception sommaire de la part de nombreux milieux soi-disant progressistes, le problème consisterait en une "mondialisation" restée confinée au "Nord" et qu’il faudrait propager cette "mondialisation" aux quatre coins de la planète. Hélas, présenté naïvement ainsi, il ne s’agirait que de l’expansion illimitée de l’économie capitaliste avec toutes ses caractéristiques dommageables.
La Russie, un pays capitaliste impérialiste, qui peine à compenser ses faiblesses
La Russie est présente au niveau international, autant politiquement qu’économiquement. Pour nous, c’est un pays qui, au-delà de sa nature capitaliste, intègre les caractéristiques de l’impérialisme. Mais ce constat doit être resitué dans une perspective historique. Les racines de la contrerévolution qui a opéré la destruction du régime de dictature du prolétariat établi par la Révolution d’Octobre 1917 datent ‑ en ce qui concerne sa mise en oeuvre planifiée ‑ de la fin des années 1950 et du début des années 1960. Dès cette époque le régime socialiste a été éliminé objectivement. S’en est suivi une période de mesures concrètes qui ont achevé l’édifice des rapports de production capitalistes. Au début de la décennie 1990 la quasi-totalité de la production relevait encore du secteur étatique. Le processus d’appropriation privée des moyens de production qui s’est déroulé durant les années 1990 à travers des mesures massives de privatisation a réalisé la base pour la transformation de la Russie en pays impérialiste.
En premier lieu on trouve en Russie, au coeur de son économie, un bon nombre de groupes industriels et financiers présentant toutes les caractéristiques de base du capitalisme monopoliste. Quelques données chiffrées présentées ci-dessous servent à donner un aperçu des dimensions.
Une liste récente établit un classement des entreprises selon leur capitalisation boursière, qui correspond à la valeur de l’ensemble des actions en circulation d’une entreprise cotée en Bourse[11]. La première place est occupée par Microsoft (3130,97 milliards de dollars US), le premier groupe français (LVMH, 415,5) vient en 19e position. Le premier groupe russe (Sberbank, 71,42) apparait à la 246e place. Dans le même ordre de grandeur, de 70 à 80 milliards, on trouve entre autres BNP Paribas, Stellantis, BMW, Volkswagen, China Telecom. Dans la fourchette de 15 à 20 milliards qui inclut les sociétés russes Polyus, Tatneft et Severstal, on trouve par exemple Repsol, NEC, Samsung, TDK, Kellogg’s, Bolloré, Nokia, Carlsberg, Philips, Dassault Aviation, Ericsson.
La capitalisation boursière n’est qu’un indicateur parmi d’autres de l’importance des grands groupes capitalistes. La structuration particulière de l’économie capitaliste en Russie ‑ résultat de l’évolution à partir de l’URSS, État socialiste ‑ fait que d’une part la composition de l’actionnariat comporte une proportion élevée de participations individuelles non cotées en Bourse et que d’autre part les exportations de capitaux se sont développées tardivement, ceci en raison aussi de l’étendue du territoire national et de la présence considérable de ressources naturelles sur le sol russe.
Dans l’article "Quelques groupes monopolistiques russes" (p. 44-51 dans le présent numéro de La Voix des Communistes) est décrit un échantillon de groupes (Rusal, Sual, Nornickel, Alrosa, Severstal), dont les caractéristiques montrent certaines limites propres à la Russie impérialiste.
Par exemple, la force d’Alrosa, dont l’activité concerne les diamants, vient du fait que ses ressources minières se trouvent essentiellement sur le territoire russe, la Russie représentant environ 31 % de la production mondiale de diamants[12]. En 2021, la production minière d’Alrosa était de 32,4 millions de carats, équivalant à 29 % de la production mondiale. En Angola, Alrosa détient une participation de 41 % dans la mine de Catoca qui représente environ 6 millions de carats par an. Il est à noter toutefois que si les sociétés minières russes de diamants génèrent environ 4,5 milliards de dollars US de revenus chaque année, ce n’est rien comparé par exemple aux revenus des exportations russes de pétrole et de gaz. Ces dernières, malgré les sanctions, ont atteint un montant de 384 milliards de dollars US en 2022.
Autre exemple, Severstal est un groupe qui intègre la chaine complète des activités dans le domaine de l’acier et des mines associées; près de 100 % des installations de production de Severstal sont basées en Russie et la société est quasiment autosuffisante en matières premières (80 % en charbon à coke, 130 % en minerai de fer) situées à proximité de ses aciéries.
Globalement, les grandes entreprises russes sont relativement peu implantées en dehors du pays. L’industrie automobile, par exemple, est confinée à l’intérieur du périmètre national.
À côté des groupes monopolistiques dont l’activité se situe dans un secteur déterminé, existent aussi des sociétés dites holdings, par l’intermédiaire desquelles les grandes capitalistes investissent dans des filières variées (voir l’article "Quelques groupes monopolistiques russes", p. 44-51 dans le présent numéro de La Voix des Communistes).
Dans ce qui suit il sera question principalement de l’Afrique en tant que région où l’examen de la présence de la Russie est particulièrement instructif.
Les éléments suivants font ressortir certains caractères particuliers de l’impérialisme russe. En résumé, on constate un mélange de développement de groupes industriels monopolistiques ‑ c’est le côté habituel de l’impérialisme ‑ et de recherche de gains matériels par la force militaire ‑ ce qui s’apparente, plus ou moins, à des méthodes mafieuses. Géographiquement, les zones d’influence sont d’abord proches de la Russie : l’Asie centrale, les Balkans, l’Europe de l’Est. Puis, à partir des années 2010, la Russie développe ses liens avec la Syrie et cherche progressivement à renforcer ses relations avec des États africains.
En octobre 2019, à Sotchi, la Russie a organisé un "sommet et forum économique et humanitaire Russie-Afrique", avec la participation de 54 États africains. 45 États étaient représentés par leur chef d’État, dont l’Angola, le Burkina Faso, la République centrafricaine, le Tchad, la Libye, Madagascar, le Mozambique, le Niger, le Nigeria, la République du Congo, le Sénégal, l’Afrique du Sud, le Soudan du Sud, le Soudan, le Zimbabwe. Un deuxième sommet, du même type, a eu lieu en juillet 2023 à Saint-Pétersbourg, avec la participation de 49 États africains. 17 États étaient représentés par leur chef d’État, dont le Burkina Faso, la République centrafricaine, la Libye, le Mali, le Mozambique, le Sénégal, l’Afrique du Sud, le Zimbabwe.
Selon le bilan officiel du sommet de 2023, "au cours des discussions, les participants ont déclaré leur engagement à construire ensemble un monde multipolaire plus juste, reposant sur l’égalité souveraine des États et sur une coopération mutuellement bénéfique".
Les explications qui suivent sont axées sur l’activité du groupe paramilitaire russe connue sous le nom de "Wagner".
Mondialement, la participation de sociétés militaires privées aux conflits armés s’est fortement accrue depuis les années 2010 [13]. Déjà antérieurement, dans le cadre des conflits dans les Balkans puis en Irak, les effectifs militaires se répartissaient dans les deux cas entre environ 20.000 pour l’armée et autant pour le personnel extérieur sous contrat. Durant la guerre de l’Afghanistan, en 2012 les effectifs de l’armée étaient d’environ 79.000, tandis que le personnel extérieur sous contrat atteignait environ 112.000. En 2013-2014 les effectifs diminuaient globalement, mais le personnel extérieur sous contrat restait prépondérant. Des statistiques pour la période 2012-2023 montrent qu’aux USA, chaque année, les dépenses militaires concernaient pour moitié les contrats extérieurs aux forces armées nationales.
Le chef du groupe Wagner, Evgueni Prigojine, a affirmé qu’il avait organisé la mutinerie des 23 et 24 juin 2023 parce qu’il s’opposait à un ordre du ministère russe de la Défense, Sergueï Choïgou, qui exigeait que tous les membres du groupe signent des contrats directement avec le ministère[14]. Cela survenait après des années de conflit entre Prigojine et le ministère. En 2017 Prigojine a été accusé d’avoir détourné des fonds provenant de contrats du ministère de la Défense, et le ministère a commencé à retenir les financements. Puis il y a eu des frictions en Syrie, en février 2018, lorsque le groupe Wagner a combattu les forces US et kurdes autour de Deir ez-Zor. Le groupe a subi des pertes s’élevant à des centaines de morts. Les commandants officiels russes en Syrie ont nié, devant leurs homologues US, que les forces attaquantes étaient les leurs, et ne les ont pas appuyées. Le conflit entre le groupe Wagner et le ministère s’est accentué lorsque Prigojine s’est plaint de plus en plus de l’incompétence du commandement militaire russe dans la guerre menée en Ukraine, affirmant que ses combattants recevaient trop peu de munitions.
République centrafricaine
En République centrafricaine François Bozizé a pris le pouvoir lors d’un coup d’État en mars 2003 [15]. Dès le début, il a été confronté à des groupes d’opposition armés contestant son autorité, notamment dans le nord et l’est du pays. Le pays avait connu des coups d’État antérieurs et l’existence continue de groupes d’opposition armés, mais durant la période de 2012 à 2014 les violences ont pris une dimension sans précédent. Initialement, l’opposition armée contre Bozizé n’a montré que des ambitions politiques et territoriales limitées, représentant des mouvements locaux défendant des intérêts communautaires plutôt étroits. Mais fin 2012 plusieurs groupes d’opposition armés ont formé l’alliance Séléka. Ces milices ont mené des attaques dans le nord-est du pays, se dirigeant vers Bangui et effectuant un coup d’État en mars 2013. Bozizé s’est enfui. Le chef de la Séléka, Michel Djotodia, s’est proclamé son successeur, mais par la suite il a perdu le contrôle de ses rangs, et les milices continuaient leurs actions violentes.
Fin 2013, des groupes d’autodéfense de villageois, présents depuis longtemps, se sont restructurés pour combattre la Séléka, sous le nom d’ "anti-balaka"[16], et ont été renforcés par d’anciens soldats de la Force Armée Centrafricaine (FACA) et des gardes présidentiels fidèles à Bozizé. Ils combattaient avec des fusils de chasse, des flèches à pointe empoisonnée et des machettes.
La France a envoyé un contingent de troupes dénommées "Sangaris". Quelque 5.600 soldats de l’Union africaine se sont déployés à la même époque. Sous la pression, Djotodia renonçait à la présidence en janvier 2014; un gouvernement de transition dirigé par la maire de Bangui, Catherine Samba-Panza, a été mis en place. La Séléka s’est retirée vers l’est du pays et les anti-balaka ont commencé à combler le vide. Les affrontements violents et les attaques entre la Séléka, les anti-balaka et la population civile se poursuivent régulièrement.
Une mission de "maintien de la paix" de l’ONU, la MINUSCA, s’est déployée. Des élections ont eu lieu en 2016, Faustin-Archange Touadéra est élu; les soldats français de l’opération Sangaris quittent le pays.
Le groupe Wagner en République centrafricaine
Le groupe paramilitaire Wagner est présent dans le pays depuis 2016, alors sous le commandement de Valery Zakharov, ancien membre des services de sécurité de l’État russe et conseiller en sécurité du président Touadéra[17]. En octobre 2017, Touadéra s’est rendu en Russie où il a demandé le soutien militaire de la Russie en échange de l’accès aux ressources d’or, de diamant et d’uranium de la RCA.
Historiquement, l’armée française est intervenue à plusieurs reprises dans le pays (dans les années 1979-1981 avec les opérations Caban et Barracuda, en 1996-1997 avec les opérations Almandin I, II et III, en 2003 avec Boali, et en 2016 avec Sangaris). En 2022 l’ambassadeur de France à Bangui a informé le ministère centrafricain de la Défense de la fin de la mission logistique (Mislog), et les dernières forces militaires françaises présentes ont quitté le pays en décembre 2022. Le conseiller du Président Touadéra déclarait à ce sujet que "le gouvernement a pris acte de ce départ et à officiellement demandé […] que cela se fasse de manière coordonnée avec nos autorités".
En janvier 2018 la Russie fournit des armes légères qui doivent équiper deux bataillons de l’armée centrafricaine[18] et pour les former, des instructeurs russes arrivent dans le pays. En 2019, avec la médiation de la Russie, le gouvernement a signé l’accord de Khartoum, parrainé par l’Union africaine, avec quatorze groupes armés contrôlant la plupart des provinces. Et fin mai 2019, un bureau de représentation du ministère russe de la Défense a été créé auprès du gouvernement centrafricain et les livraisons d’armes se sont intensifiées. À l’approche des élections présidentielles et législatives de décembre 2020, la plus haute juridiction du pays a rejeté la candidature de l’ancien président François Bozizé. Cependant, après l’exclusion de Bozizé des élections de 2020, une alliance vague de groupes armés connue sous le nom de Coalition des patriotes pour le changement (CPC), composée de six signataires de l’accord de Khartoum, a déclaré son intention de perturber les élections. Bozizé a confirmé plus tard dans un communiqué qu’il dirigeait la CPC. Après que Touadéra a remporté en 2020 un second mandat de cinq ans, les insurgés ont avancé sur Bangui en janvier dans le but de renverser le gouvernement. Une combinaison de soldats de la paix de l’ONU, de personnel de Wagner et de soldats rwandais a repoussé l’attaque. Dans les semaines suivantes, les troupes dirigées par les paramilitaires de Wagner ont mis fin au blocus exercé par les rebelles sur les voies d’approvisionnement vers la République centrafricaine en provenance du Cameroun et ont arraché le contrôle de plus de vingt villes et villages à divers groupes rebelles. En avril, les troupes gouvernementales avaient atteint la plupart des bastions rebelles.
En juillet 2023 le président Touadéra a déclaré que "la Russie avait aidé à sauver la démocratie de la République centrafricaine et à éviter une guerre civile". Les autorités préparent l’installation d’une base militaire russe dont l’implantation est officiellement confirmée en février 2024 [19]. Des terrains ont été désignés pour que les Russes y stationnent jusqu’à 10.000 soldats. En plus du groupe Wagner, la Russie compte environ 1.900 instructeurs dans le pays, aidant l’armée et d’autres services de sécurité et protégeant le président.
En juin 2023 Prigojine engage une épreuve de force ouverte avec Poutine[20]. En aout un avion avec Prigojine à son bord s’écrase, tous les passagers, parmi lesquels se trouvent les principaux dirigeants du groupe Wagner ‑ Valery Chekalov et Dmitri Outkine ‑, meurent. Le général Andreï Averyanov, du service de renseignement militaire russe[21], est chargé de réorganiser les unités du groupe Wagner, dont les effectifs seront en grande partie intégrés dans une nouvelle structure dénommée Africa Corps[22]. Début septembre 2023 Averyanov, accompagné du Colonel-général Yunus-Bek Yevkurov, vice-ministre de la Défense, a entamé une tournée d’États où le groupe Wagner était présent. Ils ont commencé en Libye, où ils ont rencontré le maréchal Khalifa Haftar[23]; ensuite ils ont poursuivi au Burkina Faso, où ils ont été accueillis par le président, le capitaine Ibrahim Traoré; puis en République centrafricaine; et au Mali où ils ont rencontré les dirigeants de la junte. Lors d’un voyage ultérieur au Niger, ils ont également rencontré le général Salifou Modi, ministre d’État et ministre de la Défense, l’un des militaires qui ont pris le pouvoir au Niger en 2023. Selon Igor Korotchenko, ancien colonel et rédacteur en chef de la revue russe Natsional’naya oborona ("Défense nationale"), l’Africa Corps "devra mener des opérations militaires à grande échelle sur le continent [africain] pour soutenir les pays cherchant à se débarrasser enfin de la dépendance néocoloniale, à nettoyer la présence occidentale et à acquérir la pleine souveraineté"[24]. Néanmoins, il ne s’agit pas d’un remplacement pur et simple du groupe Wagner par une organisation nouvelle totalement distincte. L’objectif est de contrôler mieux les déploiements des paramilitaires et d’adapter les méthodes aux contextes qui évoluent. Le fait est qu’en Russie existent des dizaines de sociétés militaires privées, dont au moins douze liées au ministère de la défense. La prise en main des activités économiques du groupe Wagner en République centrafricaine, à la différence des aspects politiques, peut s’avérer plus complexe.
[Note : La mort de Prigojine et des principaux dirigeants ayant créé le groupe Wagner a conduit à des restructurations successives des groupes paramilitaires russes intervenant en dehors de la Russie. Néanmoins l’usage courant continue à utiliser "Wagner" comme désignation générique de ces formations. C’est ce qui est appliqué aussi dans la suite du présent texte.]
Le groupe Wagner en République centrafricaine – les ressources minières
Dans le domaine économique, le groupe Wagner a établi un réseau de sociétés[25]. En Russie : M Invest, M Finans, Ferrum Mining, Broker Expert; en République centrafricaine : Lobaye Invest, Midas Resources, Diamville, First Industrial Company, Bois Rouge, Seva Security Forces; au Madagascar : Kraoma Mining, Malagasy Investment Corporation, Kraomita Malagasy.
Les activités les plus importantes de ces entreprises se situent dans le secteur minier, en République centrafricaine. En octobre 2017, avant même l’arrivée des premières troupes de Wagner, a été enregistrée la société Lobaye Invest, spécialisée dans l’extraction d’or et de diamants, notamment dans les préfectures de Lobaye et de Haute-Kotto. Midas Resources est basée en République centrafricaine tout en ayant de liens avec des sociétés connectées au groupe Wagner à Madagascar. Midas est propriétaire de concessions et de licences pour la prospection et l’extraction de minéraux, de métaux précieux et semi-précieux et de pierres précieuses. Il est arrivé que Midas travaille ouvertement avec le groupe rebelle Unité pour la paix en Centrafrique (UPC), basé dans le pays. Diamville est spécialisée dans les transactions sur l’or et les diamants, et Industrial Resources General Trading (société basée aux Émirats arabes unis, à Dubaï) gère les transactions pour le compte de Diamville. Les commerçants locaux, en République centrafricaine, vendent uniquement à Diamville sous peine de représailles. Le processus d’extraction repose généralement sur le travail manuel des mineurs en des conditions oppressives dans des mines à ciel ouvert.
D’autres activités font partie du dispositif. First Industrial Company gère une brasserie et une entreprise de production de boissons à Bangui, M Finans est à la fois société minière de métaux précieux et fournisseur de services de sécurité privée. Pour cette dernière activité, s’ajoute Sewa Security Forces. En outre il y a une société dénommée Bois Rouge. Après qu’une concession forestière pour la zone de la province de Lobaye a été accordée à une société forestière locale, cette décision a ensuite été annulée et la concession a été réattribuée à Bois Rouge.
Un cas particulier concerne le gisement d’or de Ndassima, où l’exploitation atteint le stade industriel, ce qui généralement n’est pas le cas pour les autres sites miniers en République centrafricaine. Il en sera question plus loin, à propos de la présence de la Chine en République centrafricaine.
Mali
La France est intervenue pour la première fois au Mali, en 2012-2013, dans le cadre de l’opération militaire Serval, pour repousser les forces djihadistes. L’opération avait un mandat limité et a été considérée comme un succès. La France s’est à nouveau déployée en 2014 avec un champ d’action beaucoup plus large, une zone géographique plus étendue à couvrir, et des effectifs insuffisants, atteignant un maximum de 5.100 soldats en 2020. Après les coups d’État de 2020 au Mali et de 2022 au Burkina Faso l’opération se termine en aout 2022.
En aout 2020 l’armée malienne dépose le président Ibrahim Boubacar Keïta. Une junte militaire est formée sous la direction du colonel Assimi Goïta. Un président et un gouvernement de transition sont mis en place. En mai 2021, après des divergences sur la composition du gouvernement, Goïta le dissout.
Au Mali, des sociétés minières internationales sont installées depuis longtemps et contribuent régulièrement à la croissance du secteur aurifère[26]. Le pays figure parmi les plus importants producteurs d’or sur le continent. En novembre 2021, le groupe Wagner est arrivé au Mali à la suite d’une demande du gouvernement qui cherchait un soutien militaire face aux forces djihadistes. Le groupe Wagner semblait initialement déterminé à reproduire les modèles d’extraction qui lui ont bien servi en République centrafricaine et au Soudan. Des entités liées à Wagner ont créé trois sociétés d’exploitation aurifère enregistrées au Mali au cours de l’hiver 2021 et du printemps 2022. Pourtant, aucune de ces sociétés n’a finalement obtenu l’accès aux opérations d’extraction d’or. Toujours est-il que la prospection minière russe se développe. Cependant, plutôt que de rémunérer le groupe paramilitaire avec un accès préférentiel aux sites miniers, la junte a versé à Wagner 10 millions de dollars US par mois en espèces, soit plus de 200 millions de dollars US entre décembre 2021 et juin 2023. En plus de ces sommes, il semble que le groupe pourrait également obtenir des concessions minières directement, dans le nord agité du pays, où il a aidé le gouvernement dans ses opérations militaires.
Début 2023, les paramilitaires de Wagner ont repris au moins trois mines au sud de la capitale malienne, Bamako : Balandougou, à environ 20 kilomètres de la frontière avec la Guinée; Koyoko, un site d’orpaillage voisin dans le cercle de Kangaba; et un troisième site près de Yanfolila. En novembre 2023, ils ont aidé l’armée malienne à reprendre le bastion rebelle de Kidal, une région riche en or. L’orpaillage aurait commencé dans le nord de Kidal en 2016 et, bien qu’il n’y ait pas d’exploitation minière industrielle dans la région, la région abriterait des centaines de sites d’orpaillage artisanaux informels. En février 2024 l’armée malienne et les paramilitaires russes ont investi la mine d’or d’Intahaka. Il s’agit d’un vaste site d’orpaillage artisanal situé dans le gourma malien, commune de N’Tillit, à environ 80 kilomètres du cercle de Gao, dans le nord du pays.
En novembre 2023, la junte malienne a annoncé la signature d’un protocole d’accord avec la Russie pour construire une raffinerie d’une capacité de 200 tonnes par an, ce qui en ferait la plus grande raffinerie d’or d’Afrique de l’Ouest. Dans une interview à la télévision d’État, le ministre des Raffineries, Alousséni Sanou, a déclaré que la raffinerie "nous permettra non seulement de contrôler toute la production d’or mais aussi de pouvoir appliquer correctement tous les impôts et taxes".
Parallèlement à ces avancées, la junte a autorisé les entreprises internationales d’exploitation minière de continuer à opérer dans le pays en échange de déclarations fiscales importantes. Les sociétés minières aurifères restent les plus gros contribuables de l’État, à hauteur de plus de 50 % de toutes les recettes fiscales pour 2022. Cependant selon certaines informations les mines d’or les plus productives du Mali ‑ Loulo et Gounkoto, gérées par la société canadienne Barrick Gold ‑ sont dans la ligne de mire de la Russie. Ils indiquent que d’importantes négociations sont en cours à Bamako en vue du retrait de Barrick Gold de ces deux sites.
En mars 2024, des entreprises russes ont conclu plusieurs accords avec le Mali pour la construction de raffineries d’or, la cartographie géologique et la coopération dans le domaine de l’énergie nucléaire civile; les gouvernements malien et russe ont également signé plusieurs accords de coopération dans les domaines du pétrole, du gaz, de l’uranium et de lithium.
En avril 2024 le chef de la junte, Goïta, par décret "suspend jusqu’à nouvel ordre […] les activités des partis politiques et les activités à caractère politique des associations", puis en juillet cette suspension est levée[27].
"Amitié sans limites" entre puissance impérialistes
En République centrafricaine, en 2010, les droits exclusifs d’exploitation concernant une zone d’importants gisements d’or autour de la localité de Ndassima (située à 18 km de Bambari dans la préfecture de la Ouaka) ont été attribués à la société canadienne Axmin, dans le cadre du projet aurifère Passendro pour une durée de 25 ans[28]. Cependant, en décembre 2012, la mine a été saisie par des forces rebelles de Séléka[29]. Axmin a abandonné ses opérations et a fait valoir juridiquement des circonstances de force majeure. Les rebelles ont forcé la population locale à travailler dans la mine, extrayant l’or grâce à des techniques rudimentaires.
En avril 2018, la société Lobaye Invest liée au groupe Wagner a obtenu un permis pour développer des gisements aurifères à proximité de quatre villes centrafricaines : Bangassou, Ouadda, Bria et Sam-Ouandja. Et en mars 2020 Midas Ressources, également liée au groupe Wagner, a obtenu un permis d’exploitation minière pour le gisement de Ndassima, la licence existante pour la zone au bénéfice d’Axmin a été révoquée. Axmin ayant contesté cette décision, la Chambre Arbitrale Internationale de Paris assure la médiation dans l’affaire. La concession foncière de Midas à Ndassima comprend au moins 12 autres emplacements inexploités sur un rayon de 700 km carrés. Une note de 2021 du ministre des Mines de la République centrafricaine au président faisait référence à cet arrangement et précisait que les contributions de la Russie à la sécurité nationale devaient être prises en considération.
Selon des estimations, les opérations du groupe Wagner à Ndassima seraient capables de produire jusqu’à 290 millions de dollars US d’or par an[30]. Un communiqué du ministère des Mines de la République centrafricaine de décembre 2020 indique que la valeur brute estimée des gisements d’or sur le site est de 1,7 billion de francs CFA centrafricains (XAF) (2,8 milliards de dollars US). Le groupe Wagner a transformé la mine autrefois artisanale en un complexe étendu. Aujourd’hui, la mine s’étend sur huit zones de production à différents stades de développement. Les USA ont estimé que le groupe aidait à construire le site pour une exploitation à long terme et a fortifié la mine, en construisant des ponts au niveau des rivières et en installant des canons anti-aériens montés sur camions à des endroits clés.
Le litige concernant Axmin et la mine de Ndassima n’est pas encore réglé. Un aspect intéressant concerne le fait que l’actionnariat d’Axmin est dominé par des capitaux chinois.
Les entreprises détenues et exploitées par des ressortissants chinois sont des acteurs importants dans le secteur de l’or en République centrafricaine[31]. De nombreuses entreprises chinoises exploitent des mines d’or semi-mécanisées dans tout l’ouest du pays. C’est le cas de l’entreprise chinoise Gold Coast Group, dans le village de Chingbolo, près de Bambari, à environ 400 kilomètres au nord-est de Bangui, dans le centre du pays. Une semaine seulement après le début des activités en mars 2023, elle a subi une attaque menée par un groupe d’hommes armés, ayant pour résultat la mort de neuf ressortissants chinois.
Le jour des évènements, une patrouille de miliciens chargée de protéger les lieux a vu arriver un groupe d’hommes armés décrits par les témoins comme des "soldats blancs" montrant les mêmes insignes militaires que portent souvent les groupes de paramilitaires russes. Ils ont ordonné aux miliciens de quitter la zone, en disant que désormais eux seraient responsables de la sécurité sur place. Puis ils ont poursuivi leur chemin vers la mine, et peu après, les miliciens ont entendu une forte explosion à la mine suivie de coups de feu qui ont duré plus d’une heure. Ensuite les mêmes véhicules transportant les mêmes hommes armés ont été vus quitter les lieux.
Sans fournir aucune preuve, le gouvernement centrafricain a déclaré peu après l’incident que l’attaque était un "acte terroriste" perpétré par des militants de la CPC. Leur objectif, selon le porte-parole du gouvernement Ghislain Djori, "est de décourager les investisseurs désireux de soutenir les efforts entrepris par le président de la République Faustin Archange Touadéra". Par contre un ancien combattant du groupe rebelle UPC qui a également travaillé pour le groupe Wagner en République centrafricaine, exprime un avis différent : "Les rebelles ne tuent généralement pas les étrangers, mais les kidnappent et demandent une rançon pour leur libération. C’est une attaque que seuls les Russes peuvent mener." D’ailleurs même l’Assemblée nationale centrafricaine accuse plutôt des mercenaires étrangers d’être à l’origine de l’attaque (toutefois un communiqué publié par le premier vice-président de l’Assemblée nationale, Évariste Ngamana, ne mentionne aucun pays en particulier).
Les sanctions, arme des impérialismes occidentaux
En 2014, l’annexion de la Crimée et la déstabilisation de l’est de l’Ukraine par la Russie ont donné lieu à l’adoption de sanctions par l’Union européenne, la Grande Bretagne, les USA, le Canada et d’autres États liés à l’OTAN. Ces mesures se sont poursuivies et ont été renforcées après le déclenchement de la guerre sur le territoire ukrainien, en 2022.
Ces sanctions économiques sont de différents types. Elles peuvent viser des entreprises et des individus. Il peut s’agir de limiter l’accès aux services et marchés financiers occidentaux, de soumettre à embargo certains échanges commerciaux (exportation et importation). Elles incluent l’immobilisation ou la confiscation de biens ou d’avoirs financiers.
Les possibilités de mise en oeuvre varient selon les cibles visées, et selon, à la fois, les difficultés pour trouver des dispositifs efficaces et les répercussions pouvant contrarier les initiateurs de ces sanctions.
Par exemple en 2014 au sujet d’un éventuel embargo appliqué par l’Europe concernant l’importation de nickel produit par la société russe Norsk Nickel, le directeur de la société française Eramet, concurrent de Norsk Nickel, a déclaré[32] : "Il est peu probable qu’un embargo de la part de l’Europe se concrétise, car ce serait se tirer une balle dans le pied, puisque Norilsk pourrait expédier sa production en Asie, créant ainsi une pénurie en Europe et une offre excédentaire en Asie. La conséquence serait une hausse des prix physiques en Europe et une réduction en Asie."
Dans le cas du commerce de diamants, en pratique il est impossible de garder la trace de leur origine jusqu’au bout du circuit commercial, et donc de pénaliser sélectivement la commercialisation de diamants par la Russie. Les diamants peuvent changer de mains 20 à 30 fois entre la mine et le marché. La principale complication est que 90 % de l’offre mondiale de diamants sont expédiés à l’étranger pour être taillés et polis, quel que soit l’endroit où ils ont été extraits. Après avoir transité par des pays pour être traités, les diamants russes reçoivent le statut de "mixtes". L’Inde, les Émirats arabes unis et la Belgique sont les trois plus grandes plaques tournantes où les diamants russes peuvent être transformés en diamants "mixtes".
Quant aux sanctions concernant des individus en tant qu’investisseurs, il s’agit notamment de mesures d’embargo visant des sociétés dont ils sont actionnaires au-delà de 50 %. Quand une telle mesure est prise, elle déclenche en général des manoeuvres de réaménagement des multiples structures de sociétés holding intermédiaires, de façon à escamoter l’identité de l’actionnaire final.
Les choix guerriers de Poutine contrarient les grands capitalistes russes
Le constat concernant la faiblesse de l’impérialisme russe ne repose pas seulement sur la place qu’occupe le pays dans le monde. Cette faiblesse ressort, en premier lieu, de causes internes, nationales, liées à son histoire entre 1917 et les années 1960. L’URSS authentique a édifié un secteur industriel comprenant des entreprises de grande envergure. À partir de la contrerévolution, commencée par Nikita Khrouchtchev, les rapports de production ont été progressivement orientés vers le capitalisme. En 1991, Boris Yeltsin accélère le processus. En un bref laps de temps, de brusques privatisations permettent à un petit nombre de personnes de s’approprier des pans entiers de l’appareil industriel. C’est ainsi que se mettent en place des groupes industriels importants.
De nos jours, dans le système capitaliste mondial, dans chaque secteur d’activité (automobile, appareils électroniques, pétrole…), un nombre limité de groupes, pris ensemble, dominent le marché mondial. Ces groupes se font concurrence, chacun s’efforçant de s’accaparer la plus grande part possible de son secteur et les profits correspondants. Il n’y a donc pas, communément, un seul groupe qui détiendrait le monopole exclusif de son secteur d’activité. En Russie, nombre de grandes sociétés sont en situation monopolistique au niveau national, mais la présence russe est relativement limitée au niveau international.
Le système impérialiste mondial repose sur une relation mutuelle entre la sphère économique et les États. Dans le contexte récent de concurrence interimpérialiste, la Russie se trouve être très vulnérable face aux impérialismes US et européens. Vladimir Poutine a choisi d’orienter l’affrontement sur le terrain militaire, où la Russie se trouve pour l’instant en situation favorable. Mais elle subit les conséquences des sanctions économiques mises en oeuvre par les États ennemis.
Les sanctions ont eu des conséquences de deux types.
L’obligation pour les sociétés occidentales implantées en Russie de quitter le pays, départ dommageable pour ces sociétés, offre l’occasion aux capitalistes russes de prendre possession de moyens de production dans des conditions extrêmement avantageuses. Ainsi l’administration russe, pour toutes les transactions de cessation d’actifs avec l’étranger, impose des remises considérables (couramment de 50 %) sur la valeur de ces actifs et cela après que des consultants sélectionnés par le gouvernement ont évalué l’entreprise (ce qui ouvre évidemment la porte à l’arbitraire); en outre est exigée une contribution au budget national russe d’au moins 10 % du prix[33]. Dans certains cas, les sociétés occidentales ont cédé leurs actifs en Russie pour un euro symbolique. Par ailleurs la Russie arrive à compenser partiellement les entraves imposées par les impérialismes occidentaux en renforçant ses liens avec la Chine; cependant elle s’expose ainsi à une accentuation du caractère asymétrique de ces relations, en sa propre défaveur.
Ces bouleversements dans la composition de l’actionnariat conduisent d’une part à l’apparition d’un groupe de nouveaux capitalistes bénéficiant de cette aubaine et se focalisant sur l’économie nationale. Parallèlement le gouvernement poursuit une stratégie basée sur le contrôle d’ensemble de l’économie à travers un secteur nationalisé.
D’autre part, à l’inverse de ce niveau national, les sanctions entrainent des conséquences négatives d’ampleur considérable pour les groupes monopolistiques dont les profits proviennent de leurs activités internationales. Dès le déclenchement de l’invasion de l’Ukraine, de grands capitalistes russes se sont exprimé ouvertement pour affirmer la nécessité d’arrêter immédiatement la guerre et de chercher une solution pacifique au conflit. Ils se sont adressés aussi aux gouvernements occidentaux en expliquant que, concernant la guerre, ils "n’y étaient pour rien". Mais certains ont amplifié leur critique du gouvernement russe. Parmi eux se distingue en particulier Oleg Deripaska (voir l’article "Quelques groupes monopolistiques russes", p. 44-51 dans le présent numéro de La Voix des Communistes). À la fois, il souligne les conséquences dommageables de la guerre pour l’économie nationale, et critique la politique économique suivie par le gouvernement. Sur ce deuxième aspect il vise le fait que le gouvernement favorise les investissements dans le cadre national ‑ en particulier sous la forme du secteur nationalisé au détriment des investissements privés ‑ et rejette les investissements venant de l’extérieur. En outre, évidemment, Deripaska et les autres grands capitalistes présents au niveau international sont motivés dans leur critique de la guerre parce que ‑ contrairement à ce qui se passe au niveau national ‑ ils sont sévèrement touchés par les sanctions : rétrécissement des débouchés, manque de fournitures, pression des gouvernements dans les pays où ils sont implantés (notamment s’il s’agit de coentreprise avec des sociétés occidentales)…
Voici quelques extraits de prises de position de la part de Deripaska.
En mars 2023, il intervient à l’occasion d’un Forum économique organisé en Krasnoïarsk (en Sibérie)[34] :
Je suis toujours très préoccupé par le fait que le gouvernement et le monde des affaires sont constamment en conflit. […] Le capitalisme d’État est une voie qui ne mène nulle part! Je suis horrifié de voir les ressources qui ont été dépensées au cours de l’année écoulée, manifestement gaspillées. […] Je pense que l’on peut se demander s’il n’y a pas trop d’appareil d’État et de capitalisme d’État. Nous avons besoin de plus de liberté et de concurrence.
En juillet 2023, en commentant une émission de la chaine de télévision FOX news, il écrit[35] :
Le participant au programme a parfaitement expliqué les conséquences qui ont surgi après des tentatives, même faibles, de lancer un capitalisme d’État en Amérique : à quel point cela fait reculer à la fois l’économie et la société. Dans notre pays, cette expérience dure déjà depuis une bonne quinzaine d’années, les conséquences sont également déjà visibles à l’oeil nu. Et il me semble que le moment est venu d’oublier cela, de tourner la page et de commencer une nouvelle vie normale dans un État qui vivra selon la loi, et non selon des concepts, avec des institutions fonctionnelles et une économie de marché libre.
La vision adoptée par Poutine est radicalement différente. En mars 2023 il s’adresse ‑ pour la première fois depuis le déclenchement de l’invasion de l’Ukraine ‑ aux grands capitalistes russes[36]. Les milliardaires Oleg Deripaska, Vladimir Potanine, Alexei Mordashov, German Khan, Viktor Vekselberg, Viktor Rashnikov, Andrei Melnichenko, Dmitry Mazepin participaient à la réunion. Poutine proclame :
Un entrepreneur responsable est un véritable citoyen de la Russie, de son pays, un citoyen qui comprend et agit dans son intérêt. Il ne cache pas d’actifs à l’étranger, mais enregistre les sociétés ici, dans notre pays, et ne dépend pas des autorités étrangères.
Poutine se retranche dans une position basée sur le nationalisme et l’expansionnisme géographique. Il ferme les yeux devant le fait ‑ ou est incapable de le comprendre ‑ que ce qu’il demande à ces milliardaires (ne pas cacher d’actifs à l’étranger mais enregistrer les sociétés en Russie) signifie qu’ils devraient renoncer aux mécanismes qui leur permettent d’engranger des milliards de profits.
Les conséquences de la stratégie choisie par Poutine
La situation actuelle de la Russie peut être évaluée sous différents angles. Ici nous en distinguons trois : l’économie nationale, les éléments d’économie impérialiste, la géopolitique.
Concernant l’économie nationale, certaines analyses considèrent que la Russie a résisté aux difficultés résultant de la guerre engagée en Ukraine, que l’appareil de production a redémarré et que la production ‑ selon la mesure du Produit intérieur brut (PIB) ‑ augmente. Néanmoins le montant du financement de la guerre constitue un facteur négatif de poids.
En ce qui concerne les investissements russes à l’étranger ‑ directs et indirects ‑ les répercussions de l’invasion de l’Ukraine ont entrainé une forte diminution de leur rayon d’action.
L’évolution à venir dépend d’abord de la tournure que prendra la guerre en Ukraine. Quelle qu’en soit l’issue, Poutine aura "réussi" la "déconnexion" de l’impérialisme russe de ses concurrents (alors que dans le cas de la Chine, les autres grandes puissances impérialistes ont beaucoup de mal à établir une stratégie tranchée autour de l’éventualité de réduire l’imbrication des investissements mutuelles avec la Chine). Pour le reste, selon les deux cas de figure ‑ victoire ou défaite (abstraction faite de toutes sortes de situations indécises et confuses) ‑ deux projections, évidemment hasardeuses, peuvent être faites.
En cas de défaite, la Russie sera perdant quasiment sur tous les plans. Le projet eurasien sera relégué au rang de phantasmes, ce qu’il est fondamentalement. Les groupes monopolistiques russes présents internationalement auront peu de perspectives de récupérer ce qu’ils ont perdu et de renverser la dynamique des sanctions subies (sauf ‑ hypothèse pour la forme ‑ s’ils réussissent un coup d’État en leur faveur et retournent leur vestes pour se placer dans le giron des impérialismes occidentaux). La composante mafieuse de l’impérialisme russe (décrite plus haut) devrait pouvoir persister.
En cas de victoire, la Russie aura élargie son emprise géographique, ce qui l’enrichira puisqu’en principe le capital russe est fortement présent en Ukraine. Pour les investissements internationaux les conséquences peuvent être diverses, mais le bilan global pour les groupes monopolistiques risque d’être négatif : ils resteront exposés à l’hostilité des impérialismes occidentaux et subiront l’orientation nationaliste de Poutine. Par contre il n’y a pas de signes indiquant que l’action mafieuse déployée en Afrique cesserait.
[1]. "La Chine, promoteur du multilatéralisme impérialiste"
La Voix des Communistes, no 31, 2e semestre 2023 – p. 34-45.
https://rocml.org/vdc-2023-09-no-31-p-34-45/
"La Chine impérialiste, ennemi des populations opprimées du monde"
La Voix des Communistes, no 31, 2e semestre 2023 – p. 46-61.
https://rocml.org/vdc-2023-09-no-31-p-46-61/
"La Chine peut‑elle constituer un exemple d’économie “antilibérale”?"
https://rocml.org/chine-constituer-exemple-economie-antiliberale/
[2]. "L’Ukraine, enjeu de la rivalité interimpérialiste entre USA, UE et Russie"
https://rocml.org/ukraine-rivalite-interimperialiste-usa-ue-russie/
[3]. L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, chapitre 7 :
L’impérialisme est le capitalisme arrivé à un stade de développement où s’est affirmée la domination des monopoles et du capital financier, où l’exportation des capitaux a acquis une importance de premier plan, où le partage du monde a commencé entre les trusts internationaux et où s’est achevé le partage de tout le territoire du globe entre les plus grands pays capitalistes.
https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp7.htm
[4]. https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp4.htm
[5]. https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp2.htm
[6]. https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp3.htm
[7]. https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp4.htm
[8]. https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp5.htm
[9]. https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp5.htm
[10]. https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp6.htm
[11]. (Consulté en avril 2024.)
https://companiesmarketcap.com
[12]. https://lupicinio.com/en/russia-importance-of-diamond-industry/
https://www.rivistaitalianadigemmologia.com/en/2022/01/21/will-angola-became-no-1-diamond-producer-in-the-world/
https://www.livemint.com/industry/how-sanctions-on-russia-will-change-the-diamond-trade-11709733460997.html
Les données chiffrées sont citées à titre indicatif, dans la réalité les valeurs effectives varient selon les années.
[13]. https://www.gisreportsonline.com/r/private-military-companies/
https://www.nextgov.com/digital-government/2013/05/defense-contractors-vastly-outnumber-troops-afghanistan/63995/
https://www.consilium.europa.eu/media/66700/private-military-companies-final-31-august.pdf
[14]. https://www.russiamatters.org/analysis/why-wagner-group-cannot-be-easily-absorbed-russian-military-and-what-means-west
[15]. https://ipisresearch.be/wp-content/uploads/2014/11/IPIS-CAR-Conflict-Mapping-November-2014.pdf
https://time.com/3640525/central-african-republic-conflict-anti-balaka-seleka/
https://www.crisisgroup.org/africa/central-africa/central-african-republic/russias-influence-central-african-republic
[16]. "Balaka" signifie machette dans la langue locale, le Sango. "Anti-balaka" signifie à peu près : immunisé contre les machettes, invincible.
[17]. https://mid.ru/en/foreign_policy/news/1554659/
https://riskbulletins.globalinitiative.net/wea-obs-003/01-russias-presence-in-west-africas-gold-sector.html
https://analytics.intsecurity.org/en/the-impact-of-wagner-groups-activities-on-african-states-implications-for-ukraine/
https://www.bbc.com/news/world-africa-59699350
https://afriquemedia.tv/2022/12/01/troupes-francaises-en-rca-les-dessous-dun-retrait-annonce/
[18]. https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/01/28/mali-libye-soudan-centrafrique-mozambique-recit-de-cinq-ans-d-avancee-russe-en-afrique_6111413_3212.html
https://www.crisisgroup.org/africa/central-africa/central-african-republic/russias-influence-central-african-republic
https://analytics.intsecurity.org/en/the-impact-of-wagner-groups-activities-on-african-states-implications-for-ukraine/
[19]. https://mondafrique.com/confidentiels/afrique/la-centrafrique-va-accueillir-la-premiere-base-militaire-russe-en-afrique/
[20]. https://www.francetvinfo.fr/monde/russie/mort-d-evgueni-prigojine/crash-de-l-avion-d-evgueni-prigojine-qui-etaient-les-hommes-sur-la-liste-des-passagers_5932172.html
[21]. Service de renseignement militaire russe (sigle GU, pour Glavnoye Razvedyvatel’noye Upravleniye). Fréquemment est utilisé le sigle GRU qui correspond à la dénomination en vigueur jusqu’en 2010 (Direction générale du renseignement, Glavnoye Razvedyvatel’noye Upravleniye).
[22]. https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/12/15/africa-corps-le-nouveau-label-de-la-presence-russe-au-sahel_6205937_3212.html
https://www.lemonde.fr/international/article/2023/09/28/le-marechal-libyen-haftar-recu-par-vladimir-poutine-a-moscou_6191497_3210.html
https://www.bbc.com/news/world-africa-68322230
[23]. Rongée par les divisions depuis la chute de Mouammar Kadhafi, en 2011, la Libye est gouvernée par deux administrations rivales : l’une à Tripoli, dans l’Ouest, dirigée par Abdel Hamid Dbeibah et reconnu par l’ONU, l’autre dans l’Est, incarnée par le Parlement et affiliée au camp de Khalifa Haftar.
Le gouvernement russe entretient des relations étroites avec le maréchal Haftar, qui avait eu recours au groupe Wagner dans sa tentative ratée de s’emparer de la capitale, Tripoli, d’avril 2019 à juin 2020. Cet échec avait été suivi en octobre 2020 d’un accord de cessez-le-feu, dont le respect est supervisé par une commission militaire composée de cinq officiers de chaque camp.
Depuis, des centaines de membres du groupe Wagner sont restés actifs dans l’Est, qui est aussi la zone des terminaux pétroliers, et dans le sud de la Libye, malgré le départ d’une partie de leurs effectifs vers le Mali ou vers l’Ukraine pour combattre aux côtés de l’armée russe.
[24]. https://t.me/s/igor_korotchenko/14809
https://www.agenzianova.com/fr/news/la-russia-lavora-con-la-libia-alla-creazione-di-un-corpo-militare-in-africa/
[25]. https://globalinitiative.net/wp-content/uploads/2023/02/Julia-Stanyard-T-Vircoulon-J-Rademeyer-The-grey-zone-Russias-military-mercenary-and-criminal-engagement-in-Africa-GI-TOC-February-2023-v3-1.pdf
https://home.treasury.gov/news/press-releases/jy1581
[26]. https://bloodgoldreport.com/wp-content/uploads/2023/12/The-Blood-Gold-Report-2023-December.pdf
https://riskbulletins.globalinitiative.net/wea-obs-003/01-russias-presence-in-west-africas-gold-sector.html
https://www.csis.org/analysis/tracking-arrival-russias-wagner-group-mali
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/01/28/mali-libye-soudan-centrafrique-mozambique-recit-de-cinq-ans-d-avancee-russe-en-afrique_6111413_3212.html
https://adf-magazine.com/2024/04/russia-tightens-control-of-malian-gold/
https://www.understandingwar.org/backgrounder/africa-file-april-4-2024-mali-and-russia-explore-mali’s-mineral-wealth-niger-plays
https://www.agenceecofin.com/actualites/1204-117821-lutte-anti-terroriste-des-instructeurs-et-des-equipements-militaires-russes-sont-arrives-au-niger
[27]. https://www.maliweb.net/politique/mali-le-colonel-assimi-goita-suspend-les-activites-politiques-jusqua-nouvel-ordre-3059967.html
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/07/11/au-mali-la-junte-au-pouvoir-annonce-autoriser-les-partis-politiques-a-reprendre-leurs-activites_6248458_3212.html
[28]. https://www.voanews.com/a/rebels-retain-control-mine-central-african-republic/2530046.html
https://home.treasury.gov/news/press-releases/jy1581
https://www.agenceecofin.com/or/1208-79143-centrafrique-axmin-denonce-la-reattribution-de-son-permis-minier-pour-la-mine-d-or-de-ndassima
https://southafrica.hss.de/fileadmin/user_upload/Projects_HSS/South_Africa/Dokumente/2023/GI-TOC_Russia_Study_-_Research_Report.pdf
https://bloodgoldreport.com/wp-content/uploads/2023/12/The-Blood-Gold-Report-2023-December.pdf
[29]. https://t-intell.com/2018/08/08/murder-of-journalists-exposes-russian-presence-in-the-central-african-republic/
La Séléka a été officiellement dissoute au mois de septembre 2013 par Michel Djotodia, l’un des chefs de la rébellion. Mais cette décision n’a pas eu d’effets sur les formations armées qui continuaient de contrôler d’importantes régions à l’intérieur du pays. Lors d’une réunion qui s’est tenue dans le Nord de la République centrafricaine le 11 mai 2014, la Séléka s’est dotée d’un nouvel état-major qui s’est ensuite installé dans la ville de Bambari, à 400 km de Bangui.
[30]. https://bloodgoldreport.com/wp-content/uploads/2023/12/The-Blood-Gold-Report-2023-December.pdf
https://www.crisisgroup.org/africa/central-africa/central-african-republic/russias-influence-central-african-republic
[31]. https://riskbulletins.globalinitiative.net/wea-obs-003/01-russias-presence-in-west-africas-gold-sector.html
https://www.thedailybeast.com/witnesses-accuse-russias-wagner-group-of-killing-9-chinese-miners-in-central-african-republic
https://www.rfi.fr/fr/afrique/20230319-centrafrique-9-chinois-tués-dans-l-attaque-d-un-site-minier-près-de-bambari
[32]. https://www.reuters.com/article/idUSL6N0Q53NX/
[33]. https://www.reuters.com/markets/europe/moscow-demands-bigger-discounts-foreign-companies-exiting-russia-sources-2023-08-25/
https://www.intellinews.com/russian-buyers-of-foreign-assets-seen-as-new-elite-301409
[34]. https://www.forbes.com/sites/jonathanponciano/2023/03/02/russian-billionaire-deripaska-makes-rare-critique-warns-russia-could-run-out-of-money-next-year/
https://www.business-gazeta.ru/article/585438
[35]. https://t.me/rusbrief/137280
[36]. https://www.reuters.com/world/europe/putin-urges-russias-billionaires-invest-face-sanctions-war-2023-03-16/