Analyse de la situation politique après les élections
Les élections présidentielles dans la république démocratique bourgeoise sont un évènement nécessaire et capital pour maintenir la domination politique de la bourgeoisie sur les autres classes de la société et principalement sur le prolétariat. Elles portent au pouvoir des gérants loyaux du capitalisme.
Le système d’alternance droite-gauche qui jusqu’à présent permettait à la bourgeoisie d’assurer "démocratiquement" sa domination a été mis à mal par le développement des contradictions internes à la bourgeoisie (les affaires et la corruption) et par la lutte de classe (lutte contre la loi Travail). Les discordances sur la politique à mener se sont multipliées et accentuées au sein même des partis de gouvernement à droite comme à gauche.
L’opération Macron a été la réponse de la bourgeoisie pour surmonter cette situation. Elle a réussi momentanément à éviter la crise politique. Macron mis en avant par la bourgeoise monopoliste (fraction dominante de la bourgeoise) est devenu le candidat de toute la classe bourgeoise et a été élu. La bourgeoise en tant que classe a réussi à préserver sa domination politique.
Il ne pouvait en être autrement. Sans une classe ouvrière organisée, politiquement consciente c’est toujours la réaction qui est victorieuse. Tant que sa domination ne sera pas remise en cause par le prolétariat, la bourgeoisie se prêtera au jeu démocratique.
Sous la 5e République la tendance est au renforcement du pouvoir exécutif, le parlement est réduit à une simple chambre d’enregistrement. L’aggravation de la crise et le développement des tensions impérialistes poussent à un pouvoir exécutif fort, autoritaire. L’État impérialiste a besoin d’un dirigeant fort, qui mène des guerres, impulse un programme offensif contre les travailleurs.
L’abstention massive a montré que seules les couches dominantes de la société croient encore au système politique actuel. Mais cette abstention des couches populaires et de la classe ouvrière est d’une manière générale révélatrice d’une passivité et d’un désintérêt pour la politique en général. Par contre pour une minorité de la classe ouvrière, l’abstention est révélatrice d’un début de prise de conscience politique qui s’est traduit par le refus d’aller voter dès le premier tour, pour un quelconque candidat, refusant de céder un chantage du danger d’extrême droite. Elle n’attendait rien du jeu politique bourgeois. Mais la prise de conscience sur la nécessité d’un changement politique radical anticapitaliste n’existe pas et les illusions réformistes sur la possibilité d’aménager le capitaliste sont encore fortes.
Enfin le score de Macron et la victoire de la République En Marche aux législatives montrent la mobilisation de certaines couches sociales dominantes (bourgeoisie, cadres supérieurs) autour du programme des monopoles soutenu par Macron. La majorité des travailleurs n’a pas voté pour Macron.
Le FN et Marine Le Pen, représentant la frange réactionnaire de la bourgeoisie, capte par sa politique de haine réactionnaire et sa démagogie sociale les éléments les plus arriérés de la société, ceux qui sont les plus éloignés de la politique.
La bourgeoisie monopoliste fraction dominante de la bourgeoisie ne voulait pas porter au pouvoir de Marine Le Pen. Elle a simplement servi d’épouvantail pour permettre la victoire de Macron. Le pourcentage de voix élevé qu’a obtenu le FN montre cependant que les idées réactionnaires et chauvines sont puissantes aujourd’hui dans la société. Depuis le 2e tour des présidentielles, le FN est secoué par des contradictions internes sur la question de l’Union Européenne et de l’euro qui peuvent conduire à une crise au sein de ce parti.
La division des forces réformistes entre le PCF et la FI a entrainé leurs faiblesses même s’ils réalisent un nombre de députés plus important que lors des législatures précédentes. La FI a la volonté de remplacer le Parti socialiste, d’être hégémonique et d’être le pôle de la gauche réformiste face au PCF. Des illusions existent sur la nature de la France Insoumise chez les éléments avancés. Les dirigeants de la FI sont tous issus de courants de la gauche du PS, acteurs de la vie institutionnelle bourgeoise (voir le parcours de Mélenchon depuis Mitterrand, et Corbières, Coquerel, Simmonet qui étaient tous au PS…) Mélenchon avec un discours plus radical tente d’apparaitre comme la seule force réformiste sur la scène politique. La FI et le PCF ont utilisé les luttes sociales mais n’ont pas cherché à les développer durant les élections. Au contraire, ils ont appelé le mouvement ouvrier à faire élire leurs députés. Ils ne remettent pas en cause le système capitaliste. Ils suivent le mouvement plus qu’ils ne cherchent à l’amener à affronter le capitalisme en tant que système.
En vérité, l’Assemblée nationale ne peut pas être le lieu du combat contre le capital. Elle peut être tout au plus un reflet déformé de la lutte des classes. La majorité des députés FI ou PCF élus sont des éléments insérés dans la vie institutionnelle, habitués à cogérer avec la bourgeoisie et à participer au "dialogue social". Ces députés ne sont pas d’authentiques dirigeants de la classe pour défendre dans l’assemblée les aspirations des secteurs les plus engagés de la classe ouvrière et montrer que cette assemblée est la chambre d’enregistrement et de gestion des intérêts de la bourgeoisie. Au contraire la FI et le PCF vont utiliser le mouvement ouvrier et leurs luttes pour les dévoyer et servir leurs intérêts parlementaires et réformistes.
La victoire de Macron révèle la crise des partis institutionnels bourgeois qui se partageaient auparavant le pouvoir : le PS et LR. Mais le pouvoir de Macron et la cohésion de son groupe est fragile. C’est une solution provisoire trouvée par la bourgeoisie pour maintenir dans l’urgence son jeu démocratique. Une recomposition à sa droite comme à sa gauche est en cours et donc la possibilité de retrouver lors des élections futures une nouvelle alternance droite-gauche. Cette crise du système institutionnel bourgeois (les réformes du capital ne vont pas assez vite, sont trop limitées, ou ne parvenant pas aux résultats escomptés) a laminé les anciens partis institutionnels.
Le PS a essuyé une défaite cinglante lors des élections présidentielles. Une grande partie de son électorat s’est portée sur d’autres candidats. Cela est le résultat de cinq années de pouvoir où il a fait une politique ouvertement contre les travailleurs. Le PS n’est pas parvenu à relever la tête aux législatives malgré son maillage important sur le territoire français. Il est clair que cette faillite politique a accéléré les départs vers la REM et peut conduire à une recomposition de la gauche bourgeoise autour de la FI.
Nous sommes à une de ces périodes de crise politique de la bourgeoisie où le rapport entre les forces politiques se renouvèle. C’est aussi une période d’instabilité, d’incertitude pour la bourgeoisie et ou les travailleurs se méfient du système de représentation politique, ils peuvent cherchent des solutions hors du jeu politique traditionnel.
Les Républicains quant à eux ont subi une défaite importante aux législatives. Face au radicalisme catholique et sociétal du discours de Fillon et aux affaires de corruption, beaucoup de courants de droite ont cédé aux sirènes de la REM (notamment les courants juppéistes, centristes) et approuvent la formation d’un gouvernement d’union nationale qui est censé mettre fin aux affrontements qui ont secoué le personnel politique bourgeois.
Un gouvernement d’offensive pour le capital
Le nouveau gouvernement avec Édouard Philippe à sa tête traduit la volonté de la bourgeoisie d’accentuer et d’accélérer son offensive contre les travailleurs. Macron tente de rebâtir un personnel politique sur des bases neuves pour trouver des solutions à la crise politique interne de la bourgeoisie. Cependant, comme les précédents, ce régime est corrompu jusqu’à la moelle. Les affaires de scandales et de corruption battent leur plein (affaire de l’argent du ministère de l’Économie pour Macron, l’affaire du Modem, l’affaire Ferrand,…), les polémiques au sein même du gouvernement continuent d’exister (Bayrou-Philippe, Hulot-Travert). En effet la corruption n’est pas liée qu’au "banquier Macron" mais est un aspect du fonctionnement du système capitaliste lui‑même, voir les affaires FN, PS, LR.
Le nouveau personnel institutionnel renouvelé applique les vieilles méthodes et rabâche les mêmes idées. La "société civile" a soi‑disant remplacé la vieille classe politique mais ces dirigeants politiques qui sont au gouvernement sont des représentants directs des monopoles : M. Pénicaud au Travail, M. Blanquer à l’Éducation nationale, A. Buzyn à la Santé, F. Vidal à l’Enseignement supérieur. N’oublions pas que des postes clefs sont détenus par des représentants de la "vieille classe politique", B. Le Maire à l’Économie et J.‑Y. Le Drian comme porte-parole de l’impérialisme français,. Quant à G. Colomb à l’Intérieur, il a testé à Lyon la répression du mouvement ouvrier et populaire lors du mouvement contre la loi Travail et durant l’état d’urgence en interdisant rassemblements et manifestations. Ce gouvernement est entièrement au service des intérêts des grands monopoles capitalistes et sert l’ensemble de la bourgeoisie. Il tente de redonner une position centrale à l’impérialisme français dans le monde en soutenant le développement de son complexe militaro-industriel, en fortifiant les bases impérialistes en Afrique, en se posant comme arbitre entre Trump et Poutine.
Voilà donc un gouvernement de combat prêt à mener une offensive pour :
● Accentuer l’exploitation des travailleurs pour améliorer les profits face à la concurrence internationale.
● Développer le positionnement de l’impérialisme français dans le monde, face à la montée des tensions entre grandes puissances, à l’exacerbation de la concurrence entre monopoles.
● Réprimer les résistances qui s’opposent à cette intensification de l’exploitation et aux menées de l’impérialisme.
Quelles perspectives pour les communistes dans cette situation politique
Les mobilisations se multiplient à la CGT. Il est important de surveiller toutes les initiatives qui permettent de développer la lutte de classe. Il faut être attentif à l’évolution et soutenir l’envie de combattre. Les travailleurs doivent s’organiser pour résister. Les initiatives de solidarité avec les luttes des travailleurs doivent être soutenues et encouragées (GM&S, Goodyear, Toray… Nous sommes dans une situation nouvelle : le syndicalisme est dominé par le réformisme, en même temps la collaboration de classe est ébranlée, et face à l’offensive actuelle du capital, il n’a plus rien à proposer aux travailleurs que d’accompagner la régression sociale.
Les communistes doivent œuvrer pour donner à la lutte revendicative un caractère plus offensif et favoriser la prise de conscience anticapitaliste. Mais cette conscience ne peut se développer et se consolider qu’à travers la construction du parti d’avant-garde de la classe ouvrière, et cela, il faut le répéter même si cela peut paraitre rébarbatif ou dogmatique pour certains.
Au vu de la réalité du rapport des forces, donner au syndicalisme une perspective anticapitaliste et combattre les illusions parlementaristes est une lutte de longue haleine que doivent mener les communistes marxistes-léninistes patiemment et avec un esprit unitaire.
Rassemblement Organisé des Communistes Marxistes-Léninistes
aout 2017