Le mouvement communiste en Palestine 1919‑1949
En Palestine se constitua dans la première moitié des années 1920 un Parti communiste, en lien avec l’Internationale communiste dirigée par le PC(b)US. De façon particulièrement marquée, la réalité confrontait ses militants au problème essentiel du point de vue du marxisme-léninisme: comment faire prévaloir les intérêts fondamentaux de la classe ouvrière dans le cadre du combat contre l’impérialisme mondial. Les contradictions qui traversent ce système sont multiples, et mener à bien la lutte pour la révolution prolétarienne nécessite qu’elles soient prises en compte correctement. C’est le cas notamment en ce qui concerne la question du droit des nations à disposer d’elles-mêmes. Ce texte vise à fournir quelques éléments historiques relatifs au cas de la Palestine.
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Écrit: janvier 2003
Dernière modification: 30 septembre 2007
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Entre deux guerres mondiales impérialistes
L’orientation au sujet du sionisme
L’activité au sein du mouvement ouvrier
Conflits aigus dans le monde, divisions dans le mouvement
La Ligue de Libération nationale
La LLN et le mouvement ouvrier
Bref aperçu des positions prises par les mouvements trotskistes
Parti communiste syrien, Parti communiste libanais
Entre deux guerres mondiales impérialistes
L’orientation au sujet du sionisme
Globalement, au sujet du sionisme et de la population juive, le Parti communiste palestinien a maintenu jusqu’en 1943 l’objectif de la cessation de l’immigration juive et de l’interdiction des achats de terres par les Juifs. Cependant, il refusait d’adopter la perspective du départ des immigrants déjà installés et se fixait la tâche d’organiser les ouvriers arabes et juifs dans la lutte contre l’impérialisme, en considérant que les intérêts des ouvriers juifs n’étaient nullement en contradiction avec ceux des ouvriers arabes. Les attaques qu’il lançait contre le gouvernement mandataire britannique étaient conformes à cette position. Ainsi le Parti accusa celui-ci de « ne pas aider à donner du travail et du pain aux immigrants, encore moins de la terre »[1], et il dénonça la menace que présentait l’immigration comme étant dirigée non seulement contre les ouvriers et paysans arabes mais également contre les ouvriers juifs, car « elle sert comme moyen de faire grandir les rangs des chômeurs et de faire baisser les salaires »[2]. Le Parti jugeait que le seul moyen de garantir le libre développement de la minorité juive dans le pays consistait à lutter contre l’impérialisme et le sionisme et à assurer que dans l’insurrection révolutionnaire à venir, les ouvriers juifs participent à la lutte pour l’indépendance nationale. Le même type d’argumentation était appliqué à la situation en Allemagne après l’instauration du régime national-socialiste. Le Parti affirmait que les Juifs en Allemagne, comme d’ailleurs dans les autres pays, ne devaient pas chercher leur salut dans l’immigration en Palestine, mais qu’ils devaient rester dans leur pays d’origine et y participer à la lutte aux côtés des ouvriers.
Une brochure publiée par le Parti en octobre 1935, intitulée « Une déclaration du PCP: Pour l’alliance entre tous les Arabes et leurs amis contre l’ensemble des impérialistes »[3] affirmait que l’objectif immédiat devait être « la destruction du sionisme », « l’arrêt immédiat de l’immigration et le désarmement de tous les sionistes ». Selon ce texte, la communauté juive en Palestine jouait un « rôle fasciste », et les ouvriers juifs constituaient une « aristocratie ouvrière ». Le Parti appelait néanmoins « les ouvriers et paysans juifs » à se joindre à son combat. Par conséquent, le Parti rejetait toute idée d’activité commune avec des groupes sionistes, quelle que soit leur tendance. Il faut cependant noter que cette attitude fut infléchie après l’attaque de l’Allemagne national-socialiste contre l’URSS; le Parti se déclara alors prêt à reconnaitre certaines « organisations nationales » de la communauté juive.
Quant aux propositions britanniques successives, le Parti était hostile au plan de partition formulé par la Commission Peel en 1937, mais interpréta le Livre blanc publié en 1939 comme un premier pas, obtenu par la lutte, vers la libération totale de la Palestine.
L’activité au sein du mouvement ouvrier
L’activité du PCP, dans une première période, était principalement concentrée dans le domaine syndical, parmi les ouvriers juifs. Son attitude à l’égard de la Histadrut (“Organisation générale des travailleurs hébreux en Eretz Israël”, constituée in 1920) connut des fluctuations. Le Parti incluait des composantes hostiles à la Histadrut; il établit néanmoins au sein de celle-ci la “Fraktzia” (“fraction”), en novembre 1922[4]. Il s’agissait d’obtenir que les syndicats affiliés à la Histadrut soient dissociés des fonctions économiques et coopératives liées au projet sioniste, et s’ouvrent à des adhérents arabes. La Fraktzia se basait sur le principe de la participation aux organismes sionistes et donc aux élections concernant les organes dirigeants de la Histadrut, tout en exigeant que celle-ci dans son ensemble soit transformée en fédération de syndicats professionnels territoriaux.
En 1919 avait été créée l’“Association des ouvriers des chemins de fer” (“Railway Workers’ Association” ‑ RWA), organisant uniquement des travailleurs juifs. En janvier 1922 une résolution adoptée par le Conseil de la Histadrut confirma le principe de l’organisation des travailleurs sur la base de “sections nationales” de même que le maintien de l’affiliation de la RWA à la Histadrut. Vers fin 1923 des militants du Poalei Tziyon Smol (cf. plus loin, la section Parti Communiste Palestinien) prirent le contrôle de ce syndicat, qui changea son nom en “Syndicat des ouvriers des chemins de fer, postes et télégraphes” (“Union of Railway, Postal and Telegraph Workers” ‑ URPTW). Ils déclarèrent le Syndicat comme international, c’est-à-dire ouvert à la fois aux travailleurs arabes et juifs, et demandèrent que la Histadrut adopte la même orientation, en transférant ses fonctions dans le domaine de la colonisation et des coopératives à un organisme séparé.
Le PCP intervenait au sein de ce syndicat de même que d’ailleurs dans la Histadrut en général. Mais en avril 1924, une réunion de la direction de la Histadrut décida que les communistes devaient être exclus de ses organisations. Le seul vote négatif venait d’un délégué des ouvriers des chemins de fer de Jérusalem, membre du Poalei Tziyon Smol. Le Parti de son côté appuyait la demande que l’URPTW se libère de l’emprise des sionistes. Mettant en avant l’objectif de l’unité syndicale entre Juifs et Arabes, ses membres au sein de l’URPTW organisèrent notamment en mai 1924 une réunion commune avec quelques dirigeants syndicalistes arabes engagés dans des négociations avec ce syndicat. À cette réunion fut présent Moshe Ungerfeld, membre du PCP et par ailleurs membre du comité central de l’URPTW et du comité spécial chargé de la question de l’organisation commune (entre Juifs et Arabes). Cet évènement entraina la décision prise par la direction de la Histadrut d’exclure de l’URPTW pour un an, sept membres communistes. La direction de l’URPTW ne suivait pas la décision d’expulser systématiquement les communistes, mais elle vota la suspension de M. Ungerfeld comme membre du comité central.
L’URPTW recrutait effectivement des travailleurs arabes, et en novembre 1924 il fut décidé que tous les organes élus devait être composés à nombre égal d’adhérents juifs et arabes, chacun des deux groupes choisissant ses propres représentants. Des Arabes furent cooptés au comité central. En février 1925 fut tenu à Haïfa une réunion du conseil de l’URPTW qui comprenait les neuf membres du comité central avec en outre neuf Juifs et sept Arabes représentant les branches. Trois des principaux dirigeants de la Histadrut (David Ben Gourion, Yitzhak Ben Tzvi et Chaim Arlosoroff) y étaient présents. La question principale à l’ordre du jour concernait les relations du syndicat avec la Histadrut. Par une majorité de 18 contre 7 fut proclamée la création d’un syndicat territorial et international ouvert à tous les travailleurs des chemins de fer, des postes et télégraphes indépendamment de leur appartenance ethnique, religion et nationalité. Les neuf membres juifs du comité central votèrent tous pour. Les délégués confirmèrent à l’unanimité l’exclusion du comité central de M. Ungerfeld. Sept Arabes figuraient parmi les membres du comité central nouvellement élu.
Jusqu’au printemps 1925, les communistes continuaient à appeler les travailleurs arabes à rejoindre l’URPTW. Par exemple en décembre 1924 des articles dans Haïfa (périodique en arabe du Parti, paraissant depuis automne de l’année) soulignaient qu’autant les sionistes que les dirigeants nationalistes arabes voyaient avec inquiétude les travailleurs arabes rejoindre l’URPTW et qu’ils menaient campagne contre l’unité et la solidarité entre travailleurs ainsi réalisées[5]. Et en janvier 1925, un autre article revint sur le sujet[6]:
En nous retirant du syndicat, nous renforcerions la position des sionistes en son sein. Ils accueilleraient avec satisfaction notre retrait, suite auquel ils ne seraient plus confrontés à une opposition interne à leurs activités politiques […] Nous devons nous efforcer à prendre la direction du syndicat et le transformer en une organisation qui défendra les intérêts de tous les travailleurs qu’ils soient Arabes ou Juifs. Il y a un grand nombre de camarades juifs ayant une expérience considérable dans la conduite d’un syndicat, et qui sont prêts à nous aider loyalement et sincèrement.
Or, au printemps 1925 la plupart des travailleurs arabes quittèrent l’URPTW. En août, l’URPTW expulsa définitivement 13 militants communistes, même le Poalei Tziyon Smol ayant finalement voté en ce sens. Dans cette même période apparût un nouveau groupe au sein des ateliers des chemins de fer de Haïfa. Fin février fut organisée une réunion avec environ 200 travailleurs des chemins de fer de Haïfa et par la suite, en jonction avec les travailleurs arabes quittant l’URPTW à cause de ses orientations sionistes, cette initiative déboucha sur la constitution en été 1925 de la “Société des ouvriers arabes de Palestine” (“al‑Jamiyyah al‑Umal al‑Arabiyya al‑Filastiniyya” ou “Palestinian Arab Workers Society” ‑ PAWS)[7], laquelle s’enregistra formellement auprès des autorités britanniques. Dans les années qui suivirent, la PAWS étendit sa sphère d’influence, au delà de Haïfa, à Jaffa et Jérusalem.
Vers cette époque, le Parti commençait peu à peu à développer son activité en direction des ouvriers arabes. Il réussissait à en organiser un certain nombre à Jérusalem et à Haïfa. Pour le jour du premier mai 1925, dans Haïfa parût une convocation à une réunion publique. L’année suivante, pour la même occasion, une grève fut organisée réunissant dans l’action des ouvriers arabes et juifs. Après que ses membres eurent été expulsés de la Histadrut, le Parti établit un mouvement syndical nommé en hébreu “Ihud” (“Union”)[8] dans le but de promouvoir l’unité des travailleurs juifs et arabes. Y participaient, outre les communistes, des adhérents de la Histadrut ainsi que des membres du Gdud Haavoda (cf. plus loin, la section Parti Communiste Palestinien). La branche de l’Ihud à Tel-Aviv était dirigée par Leopold Trepper (il était entré au PCP en 1925, puis sera expulsé de la Palestine par les Britanniques en 1929; il organisera entre 1938 et 1942 le réseau de renseignement antifasciste connu comme “Orchestre rouge”). En décembre 1926 fut tenue une conférence de l’Ihud, à laquelle assistèrent 85 délégués, dont 16 arabes, avec à leur tête deux communistes arabes, Rafiq Jabbour et Abdul Ghani al‑Karmi[9]. Le mouvement disparut cependant peu après.
Au départ, la PAWS insistait sur son caractère arabe et reconnaissait statutairement l’adhésion uniquement à des Arabes. Or, parmi ses dirigeants figurait Farid Kamil qui avait été membre du comité central de l’URPTW et qui plaidait pour un syndicat apolitique et international acceptant les Juifs comme membres pleins et entiers. Il n’arrivait pas, dans un premier temps, à faire prévaloir sa position, quitta la PAWS, refit un passage à l’URPTW mais retourna finalement à la PAWS qui au bout du compte se montrait favorable à la perspective de son intégration au sein d’une nouvelle organisation unitaire incluant tous les travailleurs des chemins de fer, à condition qu’elle soit indépendante de la Histadrut. En janvier 1930, dans l’espoir de jeter les bases d’un mouvement ouvrier arabe plus large, la PAWS convoqua à Haïfa un congrès des travailleurs arabes en Palestine, le premier de ce genre[10]. 61 délégués étaient présents, affirmant parler au nom d’environ 3000 travailleurs. La moitié venaient de Haïfa, et presque la moitié parmi ces derniers représentaient les travailleurs des chemins de fer. Mais il y avait aussi des participants de Jérusalem, Jaffa et d’autres villes provenant d’une variété de métiers. Un certain nombre de syndicalistes arabes qui appartenaient au PCP ou étaient proches de lui, contribuèrent à l’organisation du congrès, mais il était largement sous contrôle des syndicalistes non communistes, plutôt conservateurs, qui avaient fondé la PAWS. Le congrès déclara son opposition à l’immigration juive et au sionisme, et son soutien à l’indépendance de la Palestine en tant qu’État arabe. Il décida d’établir un mouvement ouvrier à l’échelle nationale pour défendre les intérêts et les droits des travailleurs arabes. Cependant, même après ce congrès, la PAWS restait une organisation dont la base était essentiellement limitée à Haïfa et aux travailleurs des chemins de fer. L’organisation des travailleurs des chemins de fer établie à Haïfa, affiliée à la PAWS, s’appelait désormais “Syndicat arabe des ouvriers des chemins de fer” (“Arab Union of Railway Workers” ‑ AURW). Dans les années qui suivirent, celui-ci allait utiliser d’autres désignations, du moins en Anglais, comme par exemple “Railway Arab Workers’ Trade Union”.
Quant à l’URPTW, il tint son 6e congrès en été 1927 (année au cours de laquelle eut lieu également le 3e congrès de la Histadrut auquel pour la première fois des Arabes furent autorisés à assister) et se prononça finalement par une courte majorité en faveur du principe de “l’organisation conjointe” sur la base de sections nationales. Cette décision fut mise en œuvre à travers de nouveaux statuts adoptés en février 1928. À cette occasion l’organisation changea son nom en “Syndicat national des ouvriers des chemins de fer, postes et télégraphes en Palestine” (“National Union of Railway, Post and Telegraph Workers in Palestine” ‑ NURPTW).
Dans la période de préparation du 7e congrès du NURPTW, prévu pour mai 1931, la question de l’unité continuait à être débattue. Poursuivant la position de concessions à ceux qui étaient réticents vis-à-vis du sionisme, le congrès décida que les adhérents juifs du syndicat resteraient intégrés directement à la Histadrut, tandis que les membres non-juifs, arabes et autres, devraient rejoindre les “clubs généraux d’ouvriers” que la Histadrut était en train de mettre en place, en attendant que soit créée une fédération internationale incluant tous les travailleurs de Palestine sans considération de religion ou d’ethnie. Le nom du syndicat fut modifié une fois de plus en “Syndicat international des ouvriers des chemins de fer, postes et télégraphes en Eretz Israël” (IURPTW).
Un tract diffusé par le PCP en juin 1931 commentait le congrès de la manière suivante[11]:
Le congrès des travailleurs des chemins de fer qui vient de se conclure à Tel-Aviv fut une nouvelle manœuvre dangereuse de la part des dirigeants social-impérialistes de la Histadrut. Durant 12 années, ces dirigeants ont fait échouer toute tentative d’une véritable organisation des travailleurs des chemins de fer. Durant 12 années, cette bande de dirigeants, avec Ben Tzvi à leur tête, a servi les autorités impérialistes par une trahison constante des intérêts des travailleurs des chemins de fer. Durant 12 années, ils se sont opposées à l’unité et à la fraternité authentique entre travailleurs des chemins de fer arabes et juifs, en imposant aux travailleurs arabes le sionisme, l’ennemi du travailleur arabe, et en éloignant les travailleurs arabes de toute possibilité d’organisation. Durant 12 années chaque travailleur ‑ arabe ou juif ‑ qui prenait des positions visant à défendre les intérêts des travailleurs et établir une organisation de classe, internationale et anti-impérialiste a été manu militari licencié, expulsé de la Histadrut et remis aux mains de la police impérialiste. […] Et subrepticement, au dernier congrès, ces dirigeants nationaux-sionistes de la Histadrut, ces loups sauvages serviteurs de l’impérialisme, ceux dont “l’activisme” à lui seul est responsable du fait que les travailleurs du chemins de fer sont jusqu’à aujourd’hui dans un état effroyable, livrés à toutes formes d’exploitation et de répression ‑ ces dirigeants se sont transformés en agneaux innocents et s’appellent eux-mêmes un “syndicat international”.
Des intrigues du même type se poursuivaient à d’autres niveaux au sein de la Histadrut. En mai 1932 fut créée l’“Association des ouvriers d’Eretz Israël”, selon sa désignation en hébreu (“Brit Poalei Eretz Yisrael”) ‑ en arabe l’organisation se nommait “Syndicat des ouvriers de Palestine” (“Ittihad Ummal Filastin”), le nom officiel en Anglais était “Association des Travailleurs Palestiniens” (“Palestine Labour League” ‑ PLL). L’objectif était de recruter et organiser des travailleurs arabes sous les auspices de la Histadrut. La PLL (dénommé “Israel Labour League” après la création de l’État d’Israël) allait continuer d’exister jusqu’en 1959 lorsque la Histadrut décida d’admettre directement les Arabes comme membres entiers.
À ce sujet, le PCP réitéra à cette époque sa dénonciation de la Histadrut[12]:
Après avoir étouffé les grèves des travailleurs arabes, les dirigeants de la Histadrut tentent de canaliser un petit nombre de travailleurs arabes vers une organisation de la Histadrut. L’objectif de la PLL, qui a été ressuscitée à Haïfa, de même que de l’IURPTW consiste à organiser une certaine portion de travailleurs arabes dans une organisation dont la fonction est de fournir une couverture internationaliste aux efforts de la Histadrut en vue de la “conquête” [du travail], et de détourner le travailleur arabe de la voie vers l’établissement de sa propre organisation de classe afin de l’atteler au char du chauvinisme et du sionisme.
En particulier à Jaffa, les communistes intervenaient activement dans la lutte de la PAWS contre les piquets sionistes organisés pour imposer la politique de la “conquête du travail”. On peut noter que la Histadrut jouait sur différents tableaux pour déployer sa stratégie du “travail hébreux”, parfois par des voies détournées. Ainsi elle se servit du fait qu’aux côtés des travailleurs arabes originaires de Palestine même, il y avait des travailleurs immigrants venant du Hawran (région de Syrie) et, dans une moindre mesure, d’Egypte. Cette situation caractérisait entre autre la main d’œuvre employée par les ports de Jaffa et de Haïfa. À Haïfa par exemple, la PAWS fit parvenir une pétition au gouvernement pour protester contre la concurrence exercée par l’immigration originaire du Hawran. La Histadrut ne manqua pas de se saisir de ces tendances nationalistes, en demandant l’interdiction de l’immigration de travailleurs arabes non palestiniens ainsi que l’expulsion de ceux déjà présents, avec pour argument que cela permettrait de faire avancer l’unité entre les travailleurs juifs et arabes palestiniens. Lors de la révolte arabe de 1936, les sionistes y ajouteront un autre argument, à l’adresse des autorités britanniques. En effet, en 1937, devant la Commission Peel, Moshe Shertok (Sharett), qui fut à la tête de l’Agence Juive de 1933 à 1948, déclara[13]:
La présence d’un nombre substantiel de juifs aurait eu un effet dissuasif très efficace [concernant la grève des chemins de fer]. […] Lorsque la crise éclata ‑ le 9 aout ‑ et des centaines de cheminots arabes se mirent en grève, il y avait de nombreux facteurs militant contre cela et qui les ramenèrent à la raison et au travail, mais un de ces facteurs, c’était que nous avons mobilisé quelques douzaines de conducteurs d’engin juifs que nous avons mis à disposition du Gouvernement et ils étaient prêts à prendre le relais. […]
[Lors de la grève du port de Haïfa] les travailleurs juifs étaient en mesure de maintenir les services de chargement et déchargement. Ils étaient sur place et pouvaient le faire. À Jaffa ils n’étaient pas sur place et ne pouvaient pas le faire.
Le 10 avril 1936 des représentants de divers secteurs du mouvement ouvrier arabe en Palestine se réunirent de nouveau, cette fois à Haïfa, pour jeter les bases d’une fédération syndicale arabe pour toute la Palestine. Y assistèrent notamment Abd al‑Hamid Haymur, secrétaire de la PAWS, Sami Taha qui deviendra par la suite le principal dirigeant de l’organisation, Khalil Shanir, l’un des principaux dirigeants arabes du PCP, et aussi des militants ayant des contacts avec les groupes impliqués dans la révolte armée.
Le Parti continuait ses efforts dans la double direction du travail dans les organisations ouvrières existantes combiné avec la fondation de nouvelles organisations là où il n’y en avait pas. Il concentrait ses efforts en particulier sur les travailleurs des chemins de fer et des ports, ainsi que ceux dans les secteurs du bâtiment et de l’imprimerie. Parmi les établissements visés on peut mentionner la Société d’Électricité de Palestine, la Compagnie de Potasse de Palestine, la Iraq Petroleum Company à Haïfa. À Jaffa, le Parti réussit à mettre en place le “Syndicat des ouvriers du transport”.
L’éclatement de la deuxième guerre mondiale stimulait le développement industriel. Vers le milieu de 1941, le gouvernement et l’armée britannique étaient devenus les plus grands employeurs de main-d’œuvre arabe dans le pays. Jusqu’à cette époque, la classe ouvrière arabe, peu nombreuse, avait embrassé essentiellement quelques secteurs comme les chemins de fer, les ports de Jaffa et Haïfa, l’industrie du bâtiment, les organismes gouvernementaux dans le domaine des travaux publics, les compagnies pétrolières internationales (Iraq Petroleum Company, Shell Oil Company, Consolidated Refineries), et aussi des occupations saisonnières dans l’industrie des agrumes. Quant aux employeurs juifs, ceux-ci avaient toujours refusé d’employer des Arabes, avec quelques rares exceptions comme la Société d’Électricité de Palestine et la Compagnie de Potasse de Palestine.
Au cours des années 1930 le mouvement syndical arabe s’était retrouvé progressivement paralysé. Mais l’AURW avait repris son activité en 1940‑1941 et vers la fin 1941 la PAWS à laquelle il adhérait commençait également à étendre sa base de militants et son influence. Dès cette époque, son principal dirigeant était S. Taha. La PAWS était une organisation assez souple. Il était possible pour les militants du PCP d’assumer la direction de bon nombre parmi les nouvelles branches, croissant rapidement, qui naissaient en 1942. Seule sa section de Haïfa avait survécue à la fin des années 1930, mais la PAWS réorganisa alors son ancienne branche de Jaffa (qui était en fait dirigée par Kh. Shanir) et celle de Jérusalem (où l’influence du Parti était très forte), et s’implanta à Nazareth (également sous l’impulsion du Parti) ainsi qu’à Naplouse et à Bethléem. Au congrès de la PAWS de 1941 à Jaffa, Abd Allah al‑Bandaq et Emil Habibi assuraient en tant que délégués l’intervention du Parti. À la fin de 1942, le nombre total de membres de la PAWS était officiellement évalué à 5000 membres.
Simultanément, à Haïfa, où prédominait la direction de la PAWS autour de S. Taha, un groupe de communistes et militants de gauche dirigés par Bulus Farah auquel participait entre autre Emil Touma établit une organisation syndicale entièrement indépendante. B. Farah avait adhéré au PCP en 1934 et avait été envoyé à Moscou pour formation. Il était rentré en Palestine en 1938 et était rapidement devenu le centre autour duquel se rassemblaient des communistes arabes mécontents du secrétaire du Parti, Radwan Hassan al‑Hilu (qui avait pris cette fonction en 1934), puis avait été exclu du comité central du PCP en 1940. En 1942 le groupe de B. Farah fonda un club à Haïfa sous le nom de “Rayons de l’espoir” (“Shua al‑Amal”). Le PCP établit de son côté un club nommé “Club du peuple” (“Nadi al‑Shab”). En novembre 1942 la coalition organisée autour du club Rayons d’espoir créa la “Fédération des Syndicats et sociétés ouvrières arabes” (“Federation of Arab Trade Unions and Labour Societies” ‑ FATULS). Cette organisation gagna l’adhésion de syndicats de différents grands sites de la région de Haïfa (dont l’Iraq Petroleum Company, les Consolidated Refineries qui venaient d’entrer en service, et les installations de la Shell Oil Company, ainsi que des Ateliers navals, des Organismes de Travaux publics et des camps militaires), mais aussi ailleurs, notamment à Nazareth. Vers la fin de l’année, le Département du travail britannique estimait que le FATULS comptait environ 1000‑1500 adhérents, comparé à l’effectif de la PAWS au plan du pays, d’environ 5000, et le nombre de cotisants à la PLL généreusement évalué à 500. Quant au Parti, il condamna cette « activité scissionniste » et continuait à appeler les ouvriers arabes à s’organiser dans la PAWS.
Après un intervalle de 12 années, fut tenu une deuxième conférence générale des ouvriers arabes, le 22 janvier 1943 à Jaffa, réunissant 40 délégués représentant trois sociétés d’ouvriers importantes de Haïfa, Jaffa et Jérusalem, ainsi qu’un certain nombre de groupes plus petits. Parmi les principaux intervenants, un nombre considérable étaient des membres du Parti. Une résolution condamna la FATULS, en l’appelant à rejoindre la PAWS. En juillet 1943 fut tenu à Haïfa une troisième conférence, d’envergure plus grande, à laquelle assistèrent 300 délégués affirmant représenter 30 000 ouvriers. Là aussi, les discours principaux étaient présentés par des membres du Parti.
Il y eut à certains moments au sein du Parti une tendance attribuant à la communauté juive en Palestine un rôle progressiste majeur dans le développement économique et social du pays. Mais en 1937 le problème prit une dimension particulière avec l’établissement par le comité central, de la Section juive, laquelle fut mise en place lors d’une réunion des comités juifs locaux de Jérusalem, Haïfa et Tel-Aviv. À ce moment-là, R. al‑Hilu, secrétaire général du Parti, était en prison. La décision fut prise par Simha Tzabari, adjointe de R. al‑Hilu, et Farjallah al‑Hilu (dirigeant du Parti communiste libanais envoyé en Palestine pour la durée de l’emprisonnement de R. al‑Hilu) et approuvée par le Secrétariat du Parti. Comme secrétaire de la Section fut désigné Hanoch Brozaza. Celui-ci, pendant les évènements de l’année 1936, ne s’était pas opposé à l’orientation du Parti favorable à l’insurrection arabe, mais dans sa nouvelle fonction il allait imprimer une orientation différente aux activités de la Section, dans le sens de la reconnaissance de l’existence de « cercles progressistes au sein du sionisme » et de l’application d’un « entrisme » vis-à-vis des organisations sionistes. En juin 1938, S. Tzabari, rédactrice en chef du nouveau journal du Parti, en hébreu, Kol Haam (La Voix du peuple), ayant été arrêtée, H. Brozaza en prit la direction. Un an après la formation de la Section, les divergences s’étaient développées au point que le contact de la Section juive avec le Parti fut coupé.
La Section s’efforçait à promouvoir « l’entente » entre Juifs et Arabes, en considérant que cela impliquait l’acceptation du développement de l’immigration juive en Palestine. Elle insistait pour affirmer que les Juifs en Palestine constituaient une nation et qu’ils avaient à faire valoir des revendications nationales progressistes. Ces positions étaient qualifiées « d’absolument incorrectes » par le Parti. La Section visait en particulier à mettre en œuvre une politique rassemblant tous les opposants aux projets de partition, y compris les révisionnistes sionistes. Elle fut ainsi amenée à prendre la défense de ces derniers contre la répression qu’ils subissaient, exercée par les Britanniques en coopération avec les autres courants du mouvement sioniste. Par exemple en juin 1938, elle diffusa un tract condamnant l’exécution d’un révisionniste accusé d’activités terroristes. En contradiction avec la position du Parti, la Section condamna le Livre blanc de 1939, en le qualifiant de « document impérialiste » conduisant à « l’approfondissement de la haine entre Juifs et Arabes »[14].
Le comité central dissout la Section en décembre 1939. Les protagonistes de la Section se mirent alors à publier clandestinement, à partir du mois de juin 1940, un bulletin sous le nom de Dapei Spartakus (Les Pages de Spartakus), et en août ils tinrent un « congrès » au cours duquel ils annoncèrent leur séparation d’avec le Parti. Le nouveau groupe se dota d’un journal intitulé Haemet (La Vérité). En juin 1942, il se dissout et rejoignit les rangs du Parti.
Conflits aigus dans le monde, divisions dans le mouvement
Au cours d’un plénum élargi tenu en janvier 1943, R. al‑Hilu se prononça en faveur d’une révision de la tactique appliquée par le Parti. Selon lui, la trêve déclarée par le Parti vis-à-vis du gouvernement britannique et des sionistes n’avait amené aucune réaction positive de leur part. Il proposa d’annuler la décision (qui avait été prise alors qu’il était en prison, sans le consulter) de mener parmi la population arabe la propagande en faveur du recrutement pour l’armée britannique. Parallèlement, R. al‑Hilu rejeta l’idée de la création au sein de l’armée britannique d’une Brigade juive, défendue notamment par Shmuel Mikunis (secrétaire général adjoint du Parti depuis 1936, et nommé rédacteur en chef de Kol Haam en remplacement de H. Brozaza). Par ailleurs, il proposa de dissoudre la Fraktzia, le groupe syndical du Parti au sein de l’organisation des travailleurs juifs. Il attaqua à la fois la Histadrut et la direction sioniste à cause de leurs tentatives « d’isoler la Yishuv [communauté juive] du mouvement antifasciste » et appela à l’abandon du “front populaire” au sein de la population juive[15]. Cependant, les avis au sein du plénum étaient divergents à tel point que les participants, afin d’éviter une division, chargèrent le comité central de trancher la question. Les recommandations de R. al‑Hilu devinrent rapidement la nouvelle ligne du Parti. La Fraktzia fut dissoute.
C’est dans ce contexte que fut tenu le Premier Congrès des Ouvriers arabes des Camps militaires, le 4 avril 1943. Les intervenants communistes attaquaient la Histadrut et décrivaient ses efforts d’organiser les ouvriers arabes comme visant à semer la division, tout en se déclarant favorables à une action ensemble avec les « ouvriers juifs honnêtes » et à la mise en place de comités conjoints entre Juifs et Arabes.
À l’occasion des actions déployées par la Histadrut pour la journée du 1er Mai, R. al‑Hilu s’opposa à la participation du Parti. Sh. Mikunis était parmi les partisans de l’idée de se joindre sans réserves aux actions revendicatives de la Histadrut. Certains membres des comités du Parti à Haïfa et Tel-Aviv passèrent outre les instructions du Parti et furent exclus, tandis que le Parti organisa une manifestation distincte.
Le 10 mai 1943, la Histadrut lança une grève dans les camps militaires, pour des augmentations de salaires, sans consulter les organisations syndicales arabes. Bien qu’étant d’importance mineure, cette question agit comme déclencheur d’une scission au sein du Parti. En absence de R. al‑Hilu, le secrétariat prit la décision de soutenir la grève et d’appeler Arabes et Juifs à y participer. R. al‑Hilu cependant était en désaccord avec cette position et réussit à la renverser. Mais l’opposition était forte au sein du Parti, notamment le groupe de Haïfa autour de B. Farah ainsi que le comité de Tel-Aviv étaient favorables à la participation. Finalement, R. al‑Hilu préconisa une position de compromis: les ouvriers arabes auraient pour consigne de ne pas participer à la grève, tandis que le choix resterait libre pour les membres juifs du Parti. La PAWS s’opposa effectivement à la grève, et les ouvriers arabes la boycottèrent.
R. al‑Hilu et les dirigeants qui le soutenaient annoncèrent alors la dissolution des sections de Tel-Aviv et de Haïfa et adressèrent à Sh. Mikunis et à Pnina Feinhaus, tous les deux membres du comité central, un avis les informant qu’ils étaient exclus du Parti. En réaction, Sh. Mikunis forma son propre « comité central provisoire ». Le 29 mai eut lieu la dernière réunion commune des dirigeants des deux factions opposées. Simultanément apparût un tract en Arabe daté du 29 mai, signé au nom du comité central du Parti, proclamant le PCP comme « un parti national arabe dans les rangs duquel se trouvent des Juifs acceptant son programme national » et accueillant favorablement la dissolution de l’Internationale communiste, en tant que mesure ouvrant le chemin vers l’entrée d’éléments nationaux[16]. R. al‑Hilu refusa de reconnaitre cette prise de position comme émanant du Parti. Elle était en fait l’initiative de certains individus, dont les membres du comité central A. al‑Bandaq et Y. Armani, ainsi que E. Habibi et Tawfiq Toubi, ce dernier appartenant au groupe de B. Farah.
Certaines sources[17] affirment qu’en 1942 A. al‑Bandaq, entré au comité central du PCP en 1936, a eu affaire avec un représentant du Hashomer Hatzair (Le Jeune Gardien), une organisation fondée en Pologne en 1913‑1914 et dont des membres avaient immigré en Palestine à partir de 1919. Les éléments d’information avancés sont les suivants. Aharon Cohen, chargé par le Hashomer Hatzair du travail en direction des Arabes, prit contact avec le groupe autour du Club du peuple, lié au PCP, et en particulier avec A. al‑Bandaq. Il discuta avec celui-ci l’idée de lancer un journal de propagande antifasciste parmi la population arabe et même de l’aider à fonder un parti socialiste arabe œuvrant au rapprochement entre Juifs et Arabes. Début 1944 A. Cohen et A. al‑Bandaq formulèrent un projet de programme pour un tel parti, la démarche restant cependant sans suite.
Pour tenter de trouver une solution face aux menaces d’éclatement, le Parti fit appel au Parti communiste syrien et son dirigeant, Khaled Bakdash, pour obtenir son appréciation concernant les divergences en jeu. Ce dernier semble avoir préconisé que les communistes arabes s’établissent en tant qu’organisation communiste nationale indépendante sans adopter une dénomination faisant explicitement référence au communisme[18]. Meer Masad, membre du comité central du Parti syrien et beau-frère d’A. al‑Bandaq, fut détaché en Palestine pour analyser la situation. Il arriva aux mêmes recommandations que Kh. Bakdash.
Quant à R. al‑Hilu, il avait essayé de maintenir le PCP comme parti unissant communistes arabes et juifs. Dans un premier temps, il était parvenu à réunir autour de lui plusieurs anciens membres juifs du comité central, mais finalement il décida de cesser toute activité politique.
La Ligue de Libération nationale
Pendant quelques temps, les communistes arabes continuaient à apparaitre sous le nom du PCP, mais au début de 1944 fut adoptée la désignation “Ligue de libération nationale” (“Usbat al‑Taharrur al‑Watani”). Ses principaux dirigeants étaient B. Farah, E. Habibi et A. al‑Bandaq qui venaient du PCP, T. Toubi et E. Touma qui participaient au groupe Rayons de l’espoir de B. Farah, ainsi que Fuad Nassar qui avait pris part à la révolte de 1936‑1939 en liaison avec le PCP. Après la décision du Parti de prendre une position favorable vis-à-vis du Livre Blanc britannique de 1939, il refusa l’ordre d’abandonner le combat. La LLN fut autorisée à publier à partir de mai 1944 son journal al‑Ittihad (L’Unité).
La “Charte nationale”[19] (document non daté) adoptée par la LLN formulait comme objectifs « un gouvernement démocratique garantissant les droits de tous les habitants sans distinction », la résistance à l’immigration sioniste et aux transferts de terres ainsi qu’à l’établissement d’un État juif. Elle soulignait l’importance de renforcer « l’industrie, l’agriculture et le commerce nationaux ». Tout en mettant en avant la « distinction entre sionisme et habitants juifs », elle stipulait que l’adhésion à l’organisation était « ouverte à tous les citoyens arabes ». Par ailleurs, dans leurs prises de position en direction des syndicats, les dirigeants de la LLN prenaient soin d’expliquer que le devoir du mouvement ouvrier était « de soutenir l’économie nationale dans l’étape actuelle de la lutte de libération nationale »[20]. Quant à ses orientations fondamentales, la LLN vint à considérer la tradition musulmane comme composant positif du mouvement national. L’Islam et le marxisme étaient déclarés compatibles et la LLN tentait même de trouver dans les principes religieux islamiques une justification pour sa propre idéologie[21].
Dès sa création, la LLN s’opposait à toute forme de partition de la Palestine. Elle se prononçait pour un État arabe indépendant, au sein duquel la minorité juive disposerait des mêmes droits que les autres citoyens. Lors des auditions organisées par l’UNSCOP (United Nations Special Committee on Palestine) en été 1947, la LLN se contenta de remettre un mémorandum, dans lequel elle réaffirmait ses positions. Peu avant l’adoption du projet de partition de 1947, la LLN condamna encore cette perspective comme « complot impérialiste » qui aurait pour seul résultat de « fournir à l’impérialisme anglo-américain une tête de pont servant à contrecarrer le mouvement de libération nationale du peuple arabe »[22].
Cependant, lorsque la perspective de la partition territoriale se concrétisa, des divisions se manifestèrent au sein de la LLN. En particulier, E. Touma, dans une lettre (document toutefois non signé, parvenue au département international du comité central du PC(b)US par l’intermédiaire du ministère de la Sécurité d’État ‑ MGB) exposa sa critique relative au discours de Andreï Gromyko du 14 mai à l’ONU. Au cours d’une réunion qui se tint au début de décembre 1947, le comité central de la LLN se scinda en deux groupes: l’un comprenant six de ses membres, autour de B. Farah et E. Touma, contre le soutien au plan de partition; l’autre formé par les cinq restants, autour de F. Nassar, E. Habibi et T. Toubi, en sa faveur. Les informations à cet égard ont été rapportées par le secrétaire général du Parti communiste syrien, Kh. Bakdash, à l’ambassadeur d’URSS à Beyrouth, Daniil Solod. Kh. Bakdash avait rencontré E. Touma et F. Nassar, venus à Beyrouth pour des « consultations avec les Partis communistes syrien et libanais ». Selon Kh. Bakdash, F. Nassar « menace de former un autre parti en rétablissant l’appellation de communiste ». Kh. Bakdash « leur a conseillé de cesser les débats à l’intérieur de la Ligue et de ne se prononcer pour le moment ni pour ni contre la partition de la Palestine, car une scission dans les conditions actuelles ne fera qu’affaiblir le mouvement démocratique en Palestine »[23]. Le comité central décida alors de convoquer une réunion de la LLN pour trancher les divergences entre les deux groupes. Celle-ci se tint à la mi-décembre, mais sans la participation de la majorité qui la boycotta; ce qui permit à la minorité dirigée par F. Nassar de l’emporter et de faire prévaloir l’approbation du plan de partition. La position défendue par F. Nassar devient la ligne officielle de la LLN en février 1948. La LLN prit donc position en faveur de l’établissement de deux Etats, en argumentant que « d’autres solutions, bien qu’étant préférables, ne sont pas praticables à l’heure actuelle »[24]. Au bout du compte la LLN finit par affirmer qu’il existe « une nationalité juive séparée » dans le pays et en déduit la « reconnaissance des droits des deux nations à l’autodétermination jusqu’à la séparation et l’établissement d’États indépendants »[25].
La LLN et le mouvement ouvrier
La fondation de la LLN début 1944 constituait l’aboutissement du processus impulsé par le groupe oppositionnel qui avait lancé la FATULS au cours de sa lutte contre la direction du Parti. Dans ce nouveau contexte les dirigeants de la FATULS, qui étaient maintenant également à la tête de la LLN favorisaient l’activité au sein de la PAWS. Le journal al‑Ittihad, portant le sous-titre « La voix des ouvriers arabes en Palestine », était édité par E. Touma au nom de la FATULS. La plupart des articles concernant le mouvement ouvrier étaient rédigés par B. Farah, l’un des fondateurs de la LLN, membre du comité central et du secrétariat de la FATULS.
En 1943‑1944 se développait au sein de la PAWS une opposition de gauche proche des thèses de la FATULS. Elle prit son essor à partir de deux sections qui étaient dirigées par des communistes, celle de Nazareth et celle de Jaffa, dont les secrétaires étaient respectivement F. Nassar et Kh. Shanir. Les communistes contrôlaient alors également les organisations de la PAWS à Jérusalem et Gaza ainsi qu’un certain nombre de branches plus petites, tandis que la direction centrale était tenue par l’organisation de Haïfa. S. Taha, le dirigeant de la PAWS, gardait le contrôle des branches rurales qui lui assuraient la majorité. Cela poussait la LLN à agir en faveur d’une scission.
La PAWS s’opposait activement aux actions de la Histadrut, notamment en perturbant les manifestations de la PLL, lors de la journée du Premier Mai en 1944, à Jaffa et à Jérusalem, en distribuant des tracts dénonçant les « laquais du sionisme ». Elle attaqua la Histadrut pour avoir obtenu que la conférence annuelle du Labour Party britannique, récemment tenue, adoptât une résolution en soutien d’un État juif en Palestine et du « transfert » de la population arabe de Palestine vers les pays voisins[26]. Et lorsqu’en été 1945 les travailleurs des postes et télégraphes tinrent une conférence nationale qui élut un comité exécutif composé de trois Arabes et trois Juifs, le journal de la LLN al‑Ittihad écrivit[27]:
La coopération entre les travailleurs arabes et juifs des postes et télégraphes est une preuve manifeste de la possibilité de l’action conjointe à chaque lieu de travail.
Une Conférence syndicale mondiale se tint à Londres du 6 au 17 février 1945. La PAWS y envoya S. Taha ainsi que Hanna Asfur, un avocat qui agissait comme conseiller juridique de la PAWS au cours des années 1930‑1940. B. Farah devait y participer au nom de la FATULS, mais suite à des obstacles administratifs qui lui étaient opposés par le gouvernement britannique, il arriva après le début de la conférence et ne pouvait y assister qu’à titre d’observateur. Une conférence ouvrière se tint à Naplouse le 5 aout 1945, à laquelle participèrent 17 organisations ouvrières affirmant représenter 15 000 ouvriers arabes. La question de la nomination d’une délégation pour la conférence syndicale mondiale qui devait se tenir à Paris, à la suite de celle de Londres, donna lieu à des positions contradictoires. Il fut décidé de nommer à nouveau S. Taha et H. Asfur, ce qui amena les représentants des branches de Jérusalem, Jaffa et Gaza à se retirer en guise de protestation. Quelques jours plus tard, ces derniers publièrent une déclaration annonçant leur démission de la PAWS et leur intention de tenir un congrès ouvrier pour élire une délégation pour Paris. Ce congrès se tint le 19 aout avec la participation des trois grandes branches qui en avaient pris l’initiative, ainsi que huit autres plus petites. En outre, il y avait des représentants de la FATULS, du Syndicat des ouvriers de l’Iraq Petroleum Company, de celui des Consolidated Refineries, ainsi que de divers petits syndicats qui pour la plupart étaient restés en dehors des deux organisations rivales. Le congrès constitua le “Congrès des ouvriers arabes” (“Arab Workers Congress” ‑ AWC) et élut un comité exécutif comprenant les dirigeants de la PAWS de Jérusalem, Jaffa et Gaza, F. Nassar qui dirigeait la PAWS de Nazareth, B. Farah qui était secrétaire de la FATULS, ainsi que Mukhlis Amer qui était membre du comité central de la LLN. En septembre, la propriété du journal al‑Ittihad fut transférée au comité exécutif de l’AWC.
Ce congrès constitutif de l’AWC désigna B. Farah et M. Amer comme délégués pour la conférence syndicale mondiale de Paris. Celle-ci se tint du 3 au 8 octobre 1945, et vota, le premier jour, la constitution de la “Fédération syndicale mondiale” (FSM). La délégation de l’AWC, comme d’autres délégués arabes, soutenait avec succès la désignation du communiste libanais, Mustafa al‑Ariss (qui avait participé à la fondation du mouvement syndical libanais dans les années 1920), en tant que représentant pour le Proche Orient au sein de l’exécutif de la FSM, au détriment de la candidature d’un délégué de la Histadrut.
Huit mois après son établissement, l’AWC tint un 2e congrès consacré essentiellement à la discussion d’un projet de statuts, lesquels furent adoptés. Tout en définissant comme objectif de l’AWC l’organisation et l’unité des ouvriers arabes en Palestine, ils déclarèrent son intention d´ »œuvrer pour la coopération et la solidarité de tous les ouvriers palestiniens indépendamment des questions de nationalité, couleur, religion ou convictions politiques »[28]. Toutefois, les positions de l’AWC comprenaient des résolutions appelant à l’arrêt de l’immigration. L’AWC poursuivait une politique tentant d’établir des comités d’action conjoints entre Arabes et Juifs pour défendre des revendications économiques communes sur le lieu de travail. Même lorsqu’il critiquait l’action des ouvriers juifs dans les camps de l’armée, où les Arabes constituaient la majorité, il argumentait dans le sens qu' »il n’y a pas de différences entre les ouvriers arabes et juifs » et que son opposition à l’action de certains contremaîtres juifs « n’était pas liée au fait qu’ils étaient juifs mais à leur tendance politique ». Il défendait l’idée de grèves communes entre Arabes et Juifs. Lorsqu’en 1946 éclata une grève des employés du Département des Postes et Télégraphes, qui dura deux semaines, l’AWC l’analysa comme « une grève historique […] la première fois en Palestine que des ouvriers arabes et juifs se sont unis pour montrer qu’il n’y a pas de différences entre eux et qu’ils ont un ennemi commun »[29]. Un communiqué commun fut publié par la LLN et le PCP en soutien de la grève.
L’AWC affirmait compter plus de 20 000 adhérents. En décembre 1946, elle entra en contact avec la PAWS afin d’entamer des négociations en vue d’une réunification des deux tendances du mouvement ouvrier, et eut recours à cette fin à M. al‑Ariss, de la FSM, pour jouer le rôle de médiateur. De plus en plus, la critique des communistes concernant S. Taha était centrée sur son intention déclarée de transformer la PAWS en parti politique. Quant à l’AWC, certains de ses dirigeants tendaient également à vouloir lui faire jouer un rôle ouvertement politique.
En novembre 1945 la Ligue des États Arabes supervisait la reconstitution du Haut Comité arabe, qui à l’origine avait été créé lors de l’éclatement de la révolte de 1936, puis avait disparu à la défaite de celle-ci. Quand Jamil Mardam (qui avait été premier ministre syrien de 1936 à 1939) vint en Palestine en tant que délégué de la Ligue des États Arabes, pour essayer de mettre en place un nouveau Haut Comité arabe, il discuta avec une délégation de l’AWC conduite par F. Nassar et ce dernier insista pour le convaincre de la nécessité d’inclure dans le futur conseil un représentant du mouvement ouvrier. Début 1946 Jamal al‑Husayni revint de l’exil pour prendre la direction de ce comité, dont la présidence fut laissée vacante en vue du retour de son cousin Amin al‑Husayni. J. al‑Husayni dénonça publiquement l’AWC en l’accusant de chercher l’unité avec David Ben Gourion et les Juifs. Dans sa réponse, F. Nassar, dirigeant de l’AWC et également de la LLN rejetait les critiques, affirmant que J. al‑Husayni était mal informé. De son côté, S. Taha, secrétaire général de la PAWS a toujours été considéré par la direction de la Histadrut comme agent d’Amin al‑Husayni. En réalité des tensions croissantes apparurent en 1947 entre S. Taha et les partisans d’Amin al‑Husayni qui dominaient le Haut Comité arabe. S. Taha avaient des liens avec quelques-uns des rivaux exilés d’Amin al‑Husayni, en particulier Musa al‑Alami. Celui-ci avait contribué à l’élaboration du Livre blanc de 1939, puis avait été désigné comme délégué palestinien pour la conférence d’Alexandrie tenue le 7 octobre 1944 qui allait décider de la constitution de la Ligue des États Arabes. S. Taha fut assassiné le 12 septembre 1947.
La dernière manifestation publique de l’AWC fut la convocation de son 3e congrès en septembre 1947. On peut noter que la déclaration d’ouverture rejetait encore l’idée de partition. L’activité de la PAWS déclinait également au cours de la période fin 1947-début 1948, et il disparût virtuellement.
En mai 1944, le groupe dirigé par Sh. Mikunis et P. Feinhaus tint son premier congrès, désigné comme 8e congrès du Parti, prétendant ainsi constituer la continuation légitime du PCP d’avant la scission. Cette organisation adoptait des positions hostiles au Livre blanc de 1939, considérant que ses dispositions tendaient à préparer une partition de la Palestine. Elle déclarait soutenir l’installation en Palestine des réfugiés juifs en provenance des camps de personnes déplacées en Europe qui le souhaitait, mais refusait d’approuver les demandes en faveur d’une immigration illimitée. Elle appelait à l’établissement d’un « État démocratique indépendant » qui garantirait une « égalité complète de droits à la minorité juive »[30]. En décembre, le PCP obtint pour la première fois l’autorisation légale de publier son journal Kol Haam. Parmi les autres membres qui adhérèrent, on peut citer Ber Kovner (Meir Vilner) et Esther Vilenska. En 1945, un petit groupe dissident mené par H. Brozaza (qui avait été, rappelons-le, secrétaire de la Section juive), “Am Veolam” (“Le Peuple et le monde”), le réintègrera également. En outre, il sera rejoint par une fraction de l’“Union des socialistes internationalistes de Palestine”, qui avaient fait scission du Mapai dans les années 1930. (Mapai est l’acronyme pour “Mifleget Poalei Eretz Yisrael” ‑ “Parti des ouvriers d’Eretz Israël”; il a été constitué en 1930 par la fusion de deux organisations: Hapoel Hatzair ‑ Le Jeune ouvrier ‑, fondé en 1905, et Ahdut Haavoda ‑ Union du Travail -, fondé en 1919.)
À la veille du 9e congrès du PCP en septembre 1945, le secrétaire général Sh. Mikunis écrivit une « note de réflexion » adressée aux cadres dans laquelle il affirmait: « Le PCP soutient l’établissement du foyer national juif en Eretz Israël[31]. »
En juin 1946, lorsque les autorités britanniques procédaient à de nombreuses arrestations au sein de la communauté juive, le PCP dénonçait ces mesures comme « siège militaire violent », « outrage » et « nouvelle expression d’une oppression coloniale », comme attaque sérieuse « contre les droits élémentaires de tous les habitants de Palestine ». Il appelait à la « reconnaissance de la communauté juive existante et de ses droits au libre développement national » et à admettre le fait que le « foyer national » était désormais une « réalité » et que l’existence de « deux peuples en Palestine ne pouvait plus longtemps être niée ». Il attribuait le terrorisme juif à « l’amertume justifiée des masses du Yishuv [la communauté juive en Palestine] », celle-ci constituant un « groupe national opprimé dans un pays colonial » et affirmait que la résistance juive contre les Britanniques constituait « considéré objectivement, quelque chose de la nature d’une protestation contre la domination coloniale »[32].
En ce qui concerne la Histadrut, le PCP poussait à l’adhésion individuelle de ses membres. Cependant, ce n’est que début 1947, après un certain nombre de réunions avec les dirigeants de la Histadrut, que ses démarches furent acceptées officiellement.
En octobre 1947, le PCP se déclara favorable à la lutte « pour l’établissement de deux Etats démocratiques indépendants » dans le pays[33]. Des membres du Parti participèrent activement à la guerre contre les armées arabes, tandis que certains de ses dirigeants, dont Sh. Mikunis, furent envoyés à l’étranger pour solliciter de l’aide pour l’État nouvellement établi. Suite à la décision de l’ONU concernant le plan de partition, le 29 novembre 1947, le Parti adopta l’acronyme “Makei” (“Miflaga Komunistit Eretz-Yisraelit” ‑ “Parti communiste d’Eretz Israël”).
Pour achever l’aperçu du point de vue organisationnel, donnons quelques indications sur l’itinéraire ultérieur de quelques autres personnages mentionnés ci-dessus.
Au nom du Makei, M. Vilner signa la Déclaration de l’établissement de l’État d’Israël adoptée le 14 mai 1948, en tant que membre du Conseil d’État provisoire. Le Makei prit alors le nom “Maki” (Eretz Israël étant devenu Israël tout court). Il disposait des journaux hérités de ses prédécesseurs, Kol Haam en hébreu et al‑Ittihad (qui avait été interdit par les autorités britanniques en février) en arabe. Dans un article paru le 12 octobre 1948, au moment de la trêve conclue sous les auspices du médiateur de l’ONU, Sh. Mikunis exposa une position patriotique jusqu’au bout: « Attention, la trêve actuelle fait partie d’un plan impérialiste visant à nous ravir la victoire: l’intérêt d’Israël est de terminer la guerre en imposant une défaite totale aux gouvernements arabes réactionnaires […][34]. »
En 1948, ceux des dirigeants de la LLN qui n’acceptaient pas la décision de l’ONU, furent déclarés exclus de cette organisation. Ils collaborèrent à la lutte contre Israël; parmi eux, on peut citer E. Touma, B. Farah, Kh. Shanir, de même que F. Nassar et Mohammed Nimr Odeh qui avaient rejoint Amin al‑Husayni dans son exil à Bagdad[35]. Comme d’autres, F. Nassar fut arrêté par l’armée égyptienne lors de son avance vers Jérusalem, puis délivré par l’armée israélienne. D’autres dirigeants de la LLN parvinrent à s’enfuir vers le Liban, d’où ils revinrent en Israël après quelques mois. Parmi eux se trouvaient T. Toubi, E. Habibi, Hassan Yehia Abu Aysha, qui avec d’autres rejoignirent en octobre 1948 le Maki. E. Touma, après avoir participé à la lutte armée contre Israël, fera son autocritique trois ans plus tard et demandera sa réintégration dans le Maki, ce qui lui sera accordé. Des membres de la LLN en Gaza (dont Fakhri Maki, Fayez al‑Wahidi) établirent l’“Organisation communiste palestinienne”, qui disparaitra après 1967 suite à la répression israélienne. En Cisjordanie, la LLN continuait dans un premier temps à appeler à la création d’un État palestinien indépendant sur les territoires attribués aux Palestiniens par le plan de partition, et se trouvait donc en opposition à la fois aux opérations militaires de la part des États arabes et à l’annexion par la Transjordanie. Suite à l’annexion de la Cisjordanie par la Transjordanie, la LLN deviendra “Parti communiste jordanien”, avec F. Nassar comme secrétaire, et abandonnera la demande d’un État indépendant.
Le Maki continuait alors de demander l’application du plan de partition de l’ONU, c’est-à-dire l’établissement d’un État palestinien aux côtés d’Israël, selon l’argument que ceci porterait un coup double à la présence de l’impérialisme anglo-américain dans la région. Au sujet de l’accord d’armistice avec la Jordanie conclu le 3 avril 1949, M. Vilner critiqua vivement à la Knesset (Assemblée nationale) le fait que le territoire prévu pour un État palestinien indépendant était rattaché à la Transjordanie devenant Jordanie[36]:
Pour ce qui concerne la paix et la stabilité dans le Moyen Orient, cet accord constitue un pas en arrière. […] Cet accord renforce, étend et établit les positions du principal fauteur de guerre au Moyen Orient ‑ l’impérialisme britannique et américain. Cet accord améliore la capacité des impérialismes britannique et américain de préparer une guerre contre Israël et d’autres pays épris de paix.
Cet accord concède la reconnaissance du gouvernement d’Israël (et il y a une différence, selon que la présence de l’armée britannique à Naplouse en tant que fait établi jouit ou ne jouit pas de notre reconnaissance politique dans un document international) à Abd Allah, régnant en tant que souverain attitré de Bevin sur une partie de la Terre d’Israël. C’est à cela que nous sommes parvenus. C’est un fait politique international que le gouvernement d’Israël a créé de ses propres mains. […]
Nous aurions dû assister les forces démocratiques arabes. Un État arabe indépendant, démocratique et amicale serait notre meilleur cordon de sécurité […] et, selon les accords courants avec Abd Allah-Bevin, nous devrons être dans état permanent de préparation à la guerre, et nous devons nous attendre à ce que Israël sera dans un état de danger constant et direct.
Il est exact que l’abandon de la partition sous sa forme initialement prévue, au profit d’un élargissement de la Transjordanie, constituait un revirement favorable à la Grande Bretagne. Cependant, la position du Maki, telle qu’exprimée par M. Vilner, reflétait ses tendances nationalistes, qui transparaissaient en relation avec la façon de désigner le territoire intégré à la Transjordanie comme « une partie de la Terre d’Israël » (ainsi que l’évocation tout à fait irréaliste de l’éventuelle intention « des impérialismes britannique et américain de préparer une guerre contre Israël »). À la même session parlementaire, Yaacov Riftin, du Hashomer Hatzair, intervint dans le même sens, mais de façon plus explicite[37]:
Messieurs, je suis sûr que non seulement la population juive du pays, mais la nation juive et le mouvement sioniste mondial n’ont pas écarté l’éventualité d’atteindre la Terre d’Israël dans son ensemble, et considèrent un possible traité entre Israël et un pays arabe indépendant et démocratique comme une opportunité de restaurer l’intégrité du pays.
Plus tard, le Maki se trouvait en discordance par rapport à l’URSS en ce qui concerne la question de Jérusalem. Le 17 septembre 1949, en relation avec le projet d’internationalisation de Jérusalem proposé à l’ONU, le comité central du Maki publia la déclaration suivante[38]:
Jérusalem est en danger! Élevons-nous contre les pressions américaines et protégeons l’insertion de Jérusalem dans les frontières de l’État d’Israël. La “commission de conciliation” américaine vient de publier un plan qui vise à mettre en place un “haut commissaire” américain pour gouverner Jérusalem. Le gouvernement US multiplie ses efforts pour faire pression sur Israël. Il freine toute tentative en vue d’établir la paix au Moyen-Orient.
Or l’URSS prit une position favorable au projet d’internationalisation. Le 18 décembre 1949, le Maki publia une nouvelle déclaration de son comité central, qualifiant d’erronée sa position antérieure au sujet de Jérusalem[39].
Illustrons enfin la position du Maki au sujet de l’immigration juive. On peut citer une note de Sh. Mikunis, datant de mars 1948[40]:
La question de l’immigration des Juifs en Palestine fut l’un des instruments les plus importants de la politique impérialiste “diviser pour [mieux] régner” au cours des trente dernières années. La politique chauvine et anti-arabe des cercles dirigeants sionistes a aidé l’impérialisme et la réaction arabe à monter les masses populaires arabes contre l’immigration [des Juifs]. Le parti communiste lutte pour un accord judéo-arabe sur cette question, en tant que partie d’un accord antiimpérialiste global pour la lutte commune pour l’indépendance nationale. […] Nous considérons qu’au plan purement humanitaire et aussi au plan politique [les candidats à] l’émigration “illégale” doivent être recrutés principalement dans les camps de la zone anglo-américaine. D’est là que les victimes du fascisme seront libérées de l’esclavage, là qu’aura lieu le conflit avec l’impérialisme, c’est là que se trouve le matériau humain qui hait le fascisme et les nouveaux maitres Bevin-Marshall. […] Puisque, dans les démocraties populaires et dans d’autres pays, il y a des Juifs qui souhaitent aller en Palestine, il ne faut pas les laisser dans les mains des sionistes qui utilisent [les Juifs] dans leurs propres intérêts. Et ce au détriment de l’indépendance nationale et de la lutte antiimpérialiste. […] C’est pourquoi il faut intervenir activement dans cette affaire […] afin de garantir les intérêts des pays démocratiques et le caractère progressiste des contingents d’émigrants.
M. Vilner déclara au 11e congrès du Maki, en 1949: « Non seulement les marxistes israéliens sont favorables à la colonisation du pays, mais seuls leurs plans économiques sont en mesure de la réaliser[41]« . Ce même Vilner se plaignit cependant par la suite: « […] presque aucun des immigrants n’est entré au Parti communiste. L’immigration des démocraties populaires renforce la réaction en Israël, parce que des affairistes et des spéculateurs arrivent. Ils intègrent les rangs des partis bourgeois, du Mapai, et quelques-uns entrent au Mapam[42]. » (Mapam est l’acronyme pour “Mifleget Hapoalim Hameuhedet” ‑ “Parti unifié des ouvriers”; il a été constitué en 1948 par la fusion de trois organisations: le Hashomer Hatzair, l’Ahdut Haavoda qui avait été rétabli en 1944, et des restes du Poalei Tziyon Smol.) Le Maki gagnait aussi à sa cause, en 1950‑1951, un certain nombre de jeunes des kibboutz Haartzi (la fédération des kibboutz liés au Hashomer Hatzair). En 1949, des membres du kibbutz Zikim en furent expulsés après avoir demandé à adhérer au Maki. Il s’en suivit la constitution d’un premier kibbutz formé par des communistes, puis d’un second, celui de Yad Hanna.
Au 12e congrès du Maki, tenu du 29 mai au 1er juin 1952[43], Sh. Mikunis affirma que le programme défini en 1949, au 11e congrès, réclamant un « changement de gouvernement » était caduc, et qu’il fallait maintenant un « changement de régime ». Il insista sur un retour intégral aux frontières prévues par la résolution de 1947 et déclara: « Nous soutenons le droit du peuple arabe de Palestine à l’autodétermination, l’établissement d’un État arabe indépendant et le droit des réfugiés à revenir dans leur patrie. » En novembre 1952, dans un meeting tenu à Ramla, Sh. Mikunis déclara que le communisme ne pourrait être édifié en Israël « que sur les ruines du sionisme »[44].
C’est dans le courant des années 1962‑1964 que deux groupes opposés se constituaient au sein du Maki: d’un côté autour de M. Vilner, T. Toubi, E. Habibi, de l’autre autour de Sh. Mikunis, E. Vilenska. Le 2 août 1965, les membres du comité central du Maki réunis en leur vingt-septième et dernière session décidèrent d’un commun accord de se scinder et d’organiser deux congrès opposés. Le 3 août, il fut annoncé que le congrès du “Maki” maintenu autour de Sh. Mikunis se tiendrait le lendemain à Tel-Aviv et que celui du “Groupe Meir Vilner ” aurait lieu le 6 août à Jaffa. Ce dernier choisit comme nom “Reshima Komunistit Hadasha”, ou “Rakah” (Nouvelle liste communiste). Kol Haam resta l’organe du Maki et le Rakah hérita d’al‑Ittihad. Parmi les principaux dirigeants du Maki on peut citer Sh. Mikunis, E. Vilenska; parmi ceux du Rakah, M. Vilner, T. Toubi, E. Habibi, P. Feinhaus, E. Touma.
Bref aperçu des positions prises par les mouvements trotskistes
Il convient de commenter quelques aspects des positions trotskistes, du moins pour ce qui est de celles formulées à l’époque où fut constitué l’État d’Israël.
Au plan organisationnel, la présence des trotskistes semble avoir été assez réduite. L’un des personnages les plus marquants était Tony Cliff (Yigael Gluckstein). Il naquit en Palestine de parents juifs immigrés de l’Empire russe. En 1937 il rejoignit le mouvement trotskiste. Après s’être installé en Grande Bretagne en 1948, il adhéra au principal groupe trotskiste de ce pays, le Revolutionary Communist Party (Parti communiste révolutionnaire ‑ RCP), dont il fut cependant bientôt expulsé. En Palestine, dans les années 1930 (jusqu’en 1937) il participait aux Chugim Marxistim (Cercles marxistes), une organisation de jeunesse dirigée par Zeev Abramovitch et Yitzhak Yitzhaki, associée au Poalei Tziyon Smol. Parallèlement, existait un autre groupe trotskiste. Sur ces bases se formait la Ligue communiste révolutionnaire de Palestine, section en Palestine de la 4e Internationale (trotskiste), publiant un journal en hébreu Kol Hamaamad (La Voix de la classe), et un autre en arabe, Sawt al‑Haq (La Voix de la vérité). Ce groupe fut rejoint en 1942 par Jabra Nicola (Abu Said), né en 1912 à Haïfa, qui avait été dans les années 1930 membre de la direction du PCP et responsable de son organe en arabe al‑Ittihad. Après la constitution de l’État d’Israël, l’organisation disparût. J. Nicola rejoignit le Maki, reprenant la direction d’al‑Ittihad. Il fut cependant suspendu de ses fonctions en 1956. En 1964, il rejoignit la Socialist Organization in Israel (Organisation Socialiste en Israël, mieux connue par le nom de son journal, Matzpen, c’est-à-dire Boussole) fondé en 1962 par un groupe formé autour de quatre membres qui avaient été exclus du Maki, et à partir de laquelle allait se développer la section en Israël de la 4e Internationale. J. Nicola était membre de la direction de la 4e Internationale à partir de son 7e congrès tenu en 1963.
Au 2e congrès de la 4e Internationale, tenu en juin 1948, fut adoptée une résolution comprenant le passage suivant[45]:
Quant à la Palestine, la Quatrième Internationale rejette comme une utopie réactionnaire la “solution sioniste” de la question juive. Elle déclare qu’un renoncement complet du sionisme est la condition sine qua non de la fusion des luttes des travailleurs juifs et des luttes sociales, nationales et émancipatrices des ouvriers arabes. Elle déclare que la revendication de l’immigration juive en Palestine est réactionnaire de bout en bout comme est réactionnaire l’appel à l’immigration de tout peuple oppresseur dans les pays coloniaux en général. Elle affirme que la question de l’immigration, comme celle des rapports entre les Juifs et les Arabes ne peut être tranchée de façon satisfaisante qu’après que l’impérialisme ait été chassé par une assemblée constituante qui garantisse des droits intégraux aux Juifs en tant que minorité nationale.
Un texte diffusé dans un numéro spécial du Bulletin intérieur du Secrétariat International de la 4e Internationale en octobre 1947, « Projet de thèses sur la question juive après la seconde guerre impérialiste », rédigé en janvier 1947 par Ernest Mandel (signant Ernest Germain), développe l’analyse au sujet de la question nationale[46]:
S’appuyant fermement sur son programme et sur une analyse scientifique de la situation en Palestine mais considérant en même temps l’état réel de conscience des masses juives, la Quatrième Internationale doit reconnaître comme légitime leur volonté de mener une existence nationale à eux. Elle doit démontrer concrètement que la conquête de cette nationalité est irréalisable dans la société capitaliste décadente, et plus particulièrement irréaliste et réactionnaire en Palestine. Elle doit démontrer que pour les Juifs, comme pour tous les autres peuples de la terre, la défense ou la conquête définitive de leur nationalité propre ne peut pas s’obtenir au moyen de la construction d’États et d’économies “fermées”, mais que l’économie socialiste planifiée mondiale constitue le seul cadre réaliste dans lequel est actuellement possible un libre développement national des peuples.
Et dans un éditorial émanant de la rédaction de l’organe de la 4e Internationale, accompagnant la publication, en mai 1948, d’un article de la Ligue communiste révolutionnaire de Palestine intitulé « Contre le courant », on lit[47]:
Seuls les Trotskistes palestiniens ont maintenu la position socialiste en appelant les ouvriers juifs et arabes de rompre avec les ennemis de classe dans leur rangs et de livrer leur lutte indépendante contre l’impérialisme. […] seul le programme international pour la classe ouvrière mis en avant par les Trotskistes fournira les moyens pour résoudre le problème de la Palestine.
Dans le journal de la Ligue communiste révolutionnaire de Palestine, ces positions sont reprises d’un point de vue général, comme par exemple dans un article « Contre la partition », daté de septembre 1947[48]:
La solution du problème juif, tout comme la solution du problème du pays, ne viendra pas “d’en haut”, des NU ou d’une quelconque autre institution impérialiste. […] Afin de résoudre le problème, afin de nous libérer du fardeau de l’impérialisme, il n’y a qu’une seule voie, la guerre de classe commune, ensemble avec nos frères arabes, une guerre qui constitue un lien inséparable de la guerre antiimpérialiste des masses opprimées dans l’ensemble de l’orient arabe et le monde entier.
Plus concrètement dans un article datant de fin 1947 intitulé « La situation en Palestine » et présenté par l’organe de la 4e Internationale comme « thèses du groupe trotskiste palestinien »[49]:
Leur ligne politique [des révolutionnaires juifs en Israël] doit rester inébranlablement celle de la lutte contre le partage de la Palestine, pour la réintégration du territoire d’Israël dans une Palestine unie dans le cadre d’une Fédération des États Arabes du Moyen Orient qui garantira à la minorité juive tous les droits d’autonomie culturelle nationale. […] À bas l’intervention impérialiste en Palestine! Hors du pays toutes les troupes étrangères, les “médiateurs” et “observateurs” de l’ONU! Pour le droit des masses arabes à disposer d’elles-mêmes. Pour l’élection d’une Assemblée constituante au suffrage universel et secret.
Et dans l’article « Contre le courant » mentionné plus haut[50]:
[…] nous disons aux ouvriers juifs et arabes: l’ennemi se trouve dans votre propre camp. […] Ouvriers des deux peuples, unissez-vous dans un front commun contre l’impérialisme et ces agents. […] La seule voie vers la paix entre les deux peuples de ce pays, c’est de retourner les fusils contre les instigateurs à l’assassinat dans les deux camps.
Ce qui est significatif, c’est la façon dont l’opposition à la création d’un État juif est argumentée. Par exemple dans le « Projet de thèses » déjà cité[51]:
Le mouvement terroriste et le soi-disant “comité hébreu de libération nationale” posent bien l’objectif de l’expulsion de l’impérialisme britannique de la Palestine. […] Abstraction faite du caractère parfaitement utopique de ces vues, elles sont ultraréactionnaires et ne peuvent qu’élargir davantage le fossé qui sépare les travailleurs juifs et arabes de Palestine. […]
Si donc la Quatrième Internationale doit faire tout son possible pour déconseiller aux réfugiés juifs l’émigration vers la Palestine [..] elle doit dans sa propagande concrète en face de la question de l’immigration juive partir de la souveraineté de la population arabe. Seule cette population arabe a le droit de déterminer si oui ou non l’immigration en Palestine doit être ouverte ou fermée aux Juifs. […]
Par conséquent la Quatrième Internationale doit condamner et combattre la répression britannique en face de l’immigration juive, dénoncer toutes les mesures policières et y opposer chaque fois concrètement la revendication du retrait immédiat des troupes britanniques. […]
Mais déjà la partie radicale de la jeunesse nationaliste juive a eu conscience de l’inutilité de ces efforts de “conciliation” et de “manœuvre” de la part de l’Agence juive afin d’obtenir de l’impérialisme ou des grandes puissances une immigration illimitée et la constitution d’un État juif. La vague actuelle de terrorisme de la part des bandes “Irgun Tzevai Leumi” et “Stern” constitue des actes de désespoir de la part de cette minorité. […] Bien entendu, le terrorisme de désespoir ne constitue pas en lui-même la voie d’une solution au problème palestinien. […] Mais en tant que stade ultime du sionisme le terrorisme, en ne donnant aucun résultat concret, peut rendre les éléments les plus conscients et le plus actifs dans les masses juives aptes à reconsidérer toute la question du sionisme et de la solution du problème juif. […]
En démontrant que le slogan d’un “État binational” est un slogan nationaliste, antidémocratique allant à la fois à l’encontre du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et des besoins immédiats de la lutte anti-impérialiste en Palestine, nos militants doivent en même temps mettre à tout moment à l’ordre du jour la question de la réalisation concrète du slogan de l’unité judéo-arabe. […]
Le même type d’argument se retrouve dans l’article « Contre la partition » déjà cité[52]:
Peut-être la proposition de partition va-t-elle concrétiser le rêve du peuple juif de l’indépendance politique. “L’indépendance” de l’État juif se réduira à choisir de façon “libre” et “indépendante” entre deux options: mourir de faim ou se vendre à l’impérialisme.
Un petit État au cœur du Moyen Orient […] l’État sera sans défense et complètement à la merci des impérialistes. Et ils l’utiliseront afin de renforcer leur position toute en donnant aux États arabes des leçons au sujet du “danger juif” ‑ c’est-à-dire la menace représentée inévitablement par les tendances expansionnistes du minuscule État juif. Et un jour, lorsque la tension atteindra son comble, les “amis” impérialistes abandonneront l’État juif à son sort.
Compte tenu de ce bref aperçu on constate donc que malgré l’affirmation formelle d’une position antisioniste, les développements de celle-ci la contournent largement. C’est le cas en ce qui concerne l’affirmation qu’il faut reconnaitre comme légitime la volonté des masses juives de mener une existence nationale à eux. Il est vrai que les auteurs eux-mêmes hésitent à aller jusqu’au bout de leur raisonnement et se réfugient dans le remède de l’autonomie culturelle, rejetée pourtant à juste titre par le Parti bolchevique en URSS. Mais surtout, l’incohérence implicite de la position trotskiste ressort de la récurrence de l’argument caractérisant le sionisme comme utopique, façon de voir suggérant que l’idée de l’établissement d’un foyer juive en Palestine est tout à fait louable, à condition de passer sans détours au stade de l’économie socialiste planifiée mondiale qui seul rendrait possible un libre développement national des peuples. Le caractère erroné de cette position transparait dans chacun des arguments concrets. Ainsi, il est faux de dire que deux options sont laissées à l’État juif, ou bien de mourir de faim ou de se vendre à l’impérialisme. Il n’est de toute façon pas question pour les sionistes de se “vendre” à l’impérialisme; simplement, en tant que force politique bourgeoise ils se situent dans le cadre du système impérialiste mondial et défendent leurs intérêts dans ce cadre-là, bien évidemment à l’encontre des intérêts des masses populaires, sans parler de la classe ouvrière. Et toute l’histoire depuis la création de l’État d’Israël a montré que le régime sioniste est en mesure de garder une large autonomie dans la défense de ses intérêts propres, bien qu’il ne puisse se placer totalement en dehors de toute alliance avec les principales puissances impérialistes ‑ mais cela est vrai pour n’importe quel État capitaliste dans le monde.
Naturellement, les trotskistes ne manquaient pas de critiquer l’attitude de l’URSS. Par exemple, dans l’article « Contre le courant » déjà cité[53]:
Et l’Union soviétique? Pourquoi son représentant n’a-t-il pas traité le jeu de l’ONU comme ce qu’il est, une tricherie? ‑ Apparemment la politique étrangère actuelle de l’Union soviétique ne se préoccupe pas des luttes des masses coloniales.
À cet égard ‑ c’est-à-dire quant aux fondements mêmes -, notre position est diamétralement opposée à celle adoptée par les trotskistes. Nous considérons comme entièrement justifié l’objectif sous-jacent à la décision appliquée par le gouvernement soviétique: mettre en œuvre, sur le plan international, une politique de défense de la dictature du prolétariat instaurée en URSS, gravement menacée par les attaques déployées par le camp impérialiste à l’issue de la deuxième guerre mondiale.
Nous avons vu plus haut que la 4e Internationale a adopté une position compréhensive vis-à-vis de l’état d’esprit du sionisme, allant jusqu’à la défense des “terroristes” face à la répression britannique. Il se trouve qu’une certaine tendance du trotskisme français a directement soutenu le groupe Avraham Stern (qui officiellement s’appelait Lehi). C’est ce qu’indique le témoignage d’un ancien dirigeant de la 4e Internationale: « Car notre Parti communiste internationaliste (PCI) soutenait discrètement le groupe Stern[54]. » C’est également confirmé par des contributions à l’histoire du trotskisme émanant de groupes trotskistes, par exemple The Alliance for Workers’ Liberty: « Quelques trotskistes français appuyaient les guérillas sionistes contre la Grande Bretagne[55]. »
L’un des principaux éléments qui influençaient lourdement les débuts de l’activité communiste en Palestine était le mouvement Poalei Tziyon (Ouvriers de Sion), d’orientation sioniste, qui émergea initialement au cours des années 1897‑1898, sous la forme de cercles qui s’étendaient à travers l’Empire russe. En Palestine, en 1906, la nouvelle branche locale du Poalei Tziyon constitua le “Parti ouvrier social-démocrate juif en Eretz Israël” qui, en 1919, se transforma en une organisation nommée “Ahdut Haavoda” (“Union du Travail”). Celle-ci était affiliée à l’aile droite du mouvement Poalei Tziyon sur le plan mondial, laquelle était opposée à l’idée d’adhérer à l’Internationale communiste, et maintenait une étroite collaboration avec l’Organisation sioniste.
L’aile gauche du Poalei Tziyon ne suivit pas cette initiative et fit scission. Du 17 au 19 octobre 1919, le groupe scissionniste tint une assemblée générale et décida de se constituer en parti se réclamant du marxisme-léninisme, prenant le nom de “Mifleget Poalim Sotzialistim” (“Parti des ouvriers socialistes” ‑ MPS ou Mops). C’est du 2 au 4 octobre 1920 que le MPS tint son « 2e congrès » qui fut en fait son congrès constitutif: une charte fut adoptée qui énonçait ainsi les buts du parti: « Le socialisme est notre but final, la lutte des classes est notre moyen, la dictature du prolétariat sous la forme d’un régime des soviets est la voie que nous avons choisie[56]. » Puis, suite à une révision de ses positions, il changea sa dénomination en “Mifleget Poalim Sotzialistim Ivrim” (“Parti des ouvriers socialistes hébreux” ‑ MPSI ou Mopsi). En parallèle, le “Poalei Tziyon Smol” (“Ouvriers de Sion de Gauche”) resta l’héritier des tendances sionistes du MPS, maintenant l’affiliation à l’aile gauche du Poalei Tziyon au niveau mondial.
En décembre 1920, le mouvement sioniste fonda la Histadrut (“Hahistadrut Haklalit Shel Haovdim Haivrim Beeretz Yisrael” ‑ “Organisation générale des travailleurs hébreux en Eretz Israël”). Le congrès constitutif déclara que l’objectif était de « unir tous les ouvriers et travailleurs dans le pays qui vivent de leur propre travail sans exploiter le travail d’autres, afin de pourvoir à toutes les affaires relatives aux colonies, à l’économie et aussi à la culture, de tous les travailleurs dans le pays, de manière à édifier une société de travail juif en Eretz Israël »[57]. Le MPS participa à ce congrès et gagna 7 sièges sur 87 dans les organes de direction.
Le premier mai 1921, le MPS appela à une manifestation ouvrière autonome, séparée de la grande manifestation unitaire organisée par l’Ahdut Haavoda et le Hapoel Hatzair à Tel-Aviv et à Jaffa. Le gouvernement mandataire britannique saisit cette occasion pour intervenir contre le Parti. Accusés de propagande bolcheviste, la plupart de ses dirigeants furent soit emprisonnés, soit expulsés vers l’Union soviétique.
Peu après la dissolution officielle du MPS, réapparut au sein de l’Ahdut Haavoda un groupe proche des communistes, prosoviétique, que rejoignirent certains restes du Mopsi. Ces éléments, désignés comme “groupe Menahem-Elicha” firent scission de l’Ahdut Haavoda et fondèrent en janvier 1922 le “Parti communiste palestinien” (en yiddish: “Palestinishe Komunistishe Partay”, PKP). Au 2e congrès du PKP, en septembre 1922, une minorité avec à sa tête Yosef Berger-Barzilay (Zsilsnik) exigeait l’adhésion immédiate et sans conditions à l’Internationale communiste et en faisant scission forma le “Parti communiste de Palestine” (“Komunistishe Partay fun Palestine”, KPP).
En juillet 1923 à l’occasion du « 5e congrès », la fusion des deux factions sous le nom de PCP (appelé indifféremment “Parti communiste palestinien”, ou “de Palestine”) fut proclamée. Wolf Auerbach, membre du comité central (il avait été expulsé de Palestine en 1921 vers l’URSS, mais était revenu en novembre 1922), fut envoyé à Moscou pour obtenir l’admission à l’Internationale communiste. Cela fut réalisé en février 1924.
L’ancienne direction du PCP d’avant la fusion (le groupe Menahem Elisha) détenait cinq sièges sur les huit membres du comité central. Lors d’une réunion du comité central tenue en mars 1924, ils suggérèrent la suppression du cadre organisationnel du parti, et sa transformation en un « mouvement d’action, de culture et de propagande communiste », en affirmant « qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle, de véritable prolétariat ouvrier en Palestine »[58]. En juillet 1924, la minorité réussit à prendre la direction du Parti, avec un secrétariat renouvelé.
En novembre-décembre 1926, W. Auerbach assista au Plénum élargie du comité exécutif de l’Internationale communiste et au printemps 1928 il assista au 6e congrès de l’International Communiste, où il intervint comme Haydar[59]. Le deuxième dirigeant du PCP à jouer un rôle important était Y. Berger-Barzilay. Il fut envoyé en URSS fin 1924, pour assister au plénum de l’Internationale communiste en tant que délégué du PCP et y retourna à deux reprises au nom du Parti, en août 1926, puis au printemps 1928 pour assister au 6e congrès de l’Internationale communiste[60]. Il y avait à cette époque une interaction au sein du mouvement communiste dans tous les pays de la région (Palestine, Liban, Syrie, Égypte). Les membres du PCP contribuèrent à la constitution des partis communistes dans les pays voisins. Entre 1924 et 1930, leurs analyses des évènements du Moyen-Orient furent publiées dans les périodiques liés à l’Internationale communiste (L’Internationale communiste, l’Internationale syndicale rouge, Correspondance internationale). W. Auerbach utilisait comme pseudonymes: Daniel, Abu Siam, Haydar; d’autres signaient Bob, JB, Nadav.
En février 1927 se tint à Bruxelles le Premier Congrès mondial de Nations opprimées auquel participèrent des représentants de divers mouvements de libération nationale d’Asie et d’Afrique, comme Mohammed Hatta pour l’Indonésie, Jawaharlal Nehru pour l’Inde. À cette occasion fut émis la première déclaration de la Ligue contre l’Impérialisme. Présidents d’honneur de cette dernière furent Albert Einstein, Henri Barbusse et Sun Yat‑sen.
Lors de ce congrès et du suivant, tenu en décembre, la Palestine se trouvait représentée par trois délégations: un groupe nationaliste arabe; les membres du PCP (au sein de la délégation de l’Internationale communiste); le Poalei Tziyon Smol. Au cours du 2e congrès, les délégués du mouvement nationaliste syrien, soutenus par la CGTU (Confédération générale du travail unitaire) française, demandèrent que la Ligue tranche la question de la représentation palestinienne et obtinrent l’exclusion du Poalei Tziyon Smol.
À la même époque, une aile antisioniste existait au sein de l’Ahdut Haavoda, autour du secrétaire de la section de Tel-Aviv, Tzvi Coltun. Ce dernier quitta l’Ahdut Haavoda en 1928 et rejoignit le PCP en 1932. Une évolution eut lieu aussi au sein du Gdud Haavoda (organisation qui à sa première conférence tenue en 1921 avait fixé comme son objectif d’établir une « Commune Générale des Ouvriers juifs en Palestine »), dont le PCP réussit à attirer un certain nombre de membres.
En 1927 quelques jeunes ouvriers arabes furent envoyés pour formation à Moscou, parmi eux Najati Sidqi et Radwan Hassan al‑Hilu. Dans un premier temps, en 1929, l’Internationale communiste délégua en Palestine le Tchèque Bohumir Smeral (l’un des principaux membres du Parti communiste tchèque lors de sa fondation, de la direction de laquelle il avait cependant été écarté en 1926), W. Auerbach étant en mission à Moscou[61]. Le comité exécutif de l’Internationale communiste décida en octobre 1930, de nommer un nouveau comité central à majorité arabe dont le secrétaire de facto était N. Sidqi. Il fut ratifié par le 7e congrès du PCP tenu en décembre 1930. Les décisions prises à ce congrès ont été guidées par un document de l’Internationale communiste intitulé: « Les tâches du PCP dans son environnement ». Une vague d’arrestations frappa le PCP en 1931, tous les membres arabes du nouveau comité central furent arrêtés. Ils furent remplacés par Saïl Tarsisi, Kemal Ouda et Itaman Zarour. N. Sidqi réussit à quitter le pays en 1934, il remplissait alors des missions pour l’Internationale communiste, puis revint au Liban à la fin des années 1930; il fut expulsé du PCP au début des années 1940.
En 1934, R. al‑Hilu (désigné souvent par le pseudonyme de Musa), de retour de Moscou, devint secrétaire général du Parti. De 1936 à 1939, le secrétariat du Parti était composé de R. al‑Hilu, Simha Tzabari et Mohammed Nimr Odeh.
Au 7e congrès de l’Internationale communiste en juillet 1935 assistèrent deux délégués arabes du PCP. Par ailleurs, au cours de la discussion sur le rapport de Gheorghi Dimitrov, Khaled Bakdash (dirigeant du Parti communiste syrien) intervint au nom des partis communistes arabes, sous le pseudonyme de Ramsi. L’intervention du secrétaire du PCP, R. al‑Hilu (Yussuf) fut critiquée, dans la mesure où elle ne faisait pas une distinction claire entre le mouvement sioniste et la masse de la population juive. Il fut demandé à la délégation palestinienne de prononcer une seconde intervention pour clarifier les positions, ce que fit Ashkar (Hadjar). (Le frère d’Ashkar était membre du groupe d’Izz al‑Din al‑Qassam, actif dans l’insurrection qui se développait à cette époque, et servait d’intermédiaire avec les communistes[62]).
En 1941, à la suite de l’attaque de l’Allemagne national-socialiste contre l’URSS, la direction du parti fut de nouveau frappée par la répression. R. al‑Hilu ainsi que deux de ses adjoints, S. Tzabari et Shmuel Mikunis, furent arrêtés, puis libérés vers la fin de l’année. Pendant leur emprisonnement, le Parti était dirigé par Pnina Feinhaus, Khalil Shanir et Hassan Yehia Abu Aysha.
Parti communiste syrien, Parti communiste libanais
Des cercles d’orientation marxiste émergeaient dans les principales villes de la Syrie et du Liban au cours des années 1920, à l’initiative d’intellectuels, parmi lesquels Yussuf Ibrahim Yazbak[63]. Fuad al‑Shamali, ouvrier migrant libanais, avait dirigé un Partie ouvrier libanais à Alexandrie qui était affilié au Parti socialiste égyptien, de 1920 à 1922. Il avait été déporté par le gouvernement britannique en 1922 vers le Liban. Là, il travaillait dans une fabrique de tabac et constitua en 1924 le “Syndicat général des ouvriers du tabac”. Ce syndicat, en entrant en contact avec d’autres groupements, établit en 1925 le “Comité suprême des Syndicats” (“al‑Lajnah al‑Naqabiyah al‑Uliya”).
Fin 1924, Yosef Berger, représentant le Parti communiste palestinien, vint au Liban et y rencontra Y. Yazbak et F. al‑Shamali, dans le cadre des tentatives entreprises par le PCP d’étendre sa base au-delà de la minorité juive. Le 24 octobre 1924 un parti communiste de Syrie et Liban fut formé sous le nom de “Parti libanais du Peuple” avec Y. Yazbak comme secrétaire général. Pratiquement depuis le début, des divergences apparaissaient entre le Parti libanais et le représentant du PCP, qui considérait qu’il s’agissait de développer une branche du PCP au Liban. Le PCP, à l’époque, constituait le noyau organisationnel le mieux développé du mouvement communiste au Moyen Orient et aspirait à coordonner l’ensemble des activités dans les pays environnants. Cette ambition fut cependant critiquée par l’International communiste.
Au printemps 1925, le PLP développait des contacts avec des représentants d’un groupe de communistes arméniens, la Ligue Spartacus, établi au Liban début 1924. Mi‑1925, par la fusion des deux organisations, fut formé le “Parti communiste de Syrie et de Liban” (“al‑Hizb al‑Shuyui al‑Suri al‑Lubnani”). Un comité central intérimaire fut constitué comprenant trois membres du comité central du PLP (Y. Yazbak, F. al‑Shamali, Ilyas Abu Nadher), deux dirigeants de la Ligue Spartacus (Artin Madoyan, Haykazun Boyadjian) et Eli Teper (alias Max Kogal) du PCP. Le nouveau parti tint sa première conférence, clandestine, le 9 décembre 1925. Le comité central intérimaire fut confirmé et élargi, un programme fut adopté. Parallèlement, F. al‑Shamali, en tant que représentant du comité central du Parti, rencontra Wolf Auerbach et E. Teper, tous les deux membres du comité central du PCP, en tant que représentants de l’Internationale communiste.
Entretemps, le PLP avait obtenu l’autorisation légale des autorités britanniques. Il commença à publier un hebdomadaire, al‑Insaniyyah (L’Humanité). Cependant, suite au soutien apporté par le Parti à l’insurrection qui débuta en Syrie en juillet 1925, le journal fut interdit et un ordre d’arrestation émis contre la direction du Parti. Y. Yazbak se réfugia en France, où il entra en contact avec le PCF. Début 1926, toute la direction du Parti se trouvait en prison, y compris Y. Yazbak, revenu de France. Ils furent libérés seulement début 1928, dans le cadre d’une amnistie générale. Dans ces conditions, l’Internationale communiste chargea temporairement le PCP de superviser et organiser l’activité des communistes libanais et syriens.
En février 1928, le Parti fut reconstitué, avec un comité central composé d’A. Madoyan, H. Boyadjian, Farid Tuma, Nasim al‑Shamali, et F. al‑Shamali comme secrétaire général (Y. Yazbak quitta le parti). Le Parti était représenté par F. al‑Shamali au 6e congrès de l’Internationale communiste, tenu en juillet-septembre 1928, et fut admis comme membre de l’Internationale[64]. Le nom du Parti fut alors changé en “al‑Hizb al‑Shuyui al‑Suri”, de façon à refuser la division de la Syrie imposé par la France.
Début 1930, le Parti commença à publier un hebdomadaire, Sawt al‑Umal (La Voix des Ouvriers), qui fut cependant interdit le mois suivant. Le Parti continuait néanmoins à agir publiquement. En juin, F. al‑Shamali fut réélu secrétaire général du Syndicat des ouvriers du tabac. En juillet ce syndicat lança un appel à la création d’un syndicat général.
En 1931 fut tenu une conférence réunissant les partis communistes de Palestine et de Syrie[65].
Au cours de la période 1930‑1933, le Parti s’étendait et recrutait des militants, parmi lesquels Khaled Bakdash, Mustafa al‑Ariss, Niqula al‑Shawi, Farjallah [Faraj Allah] al‑Hilu, Hassan Quraitim, Yussuf Khatar al‑Hilu, Fuad Kazan, Rafiq Ridha. En automne 1932, F. al‑Shamali fut expulsé du Parti. En 1932, l’Internationale communiste adressa un rapport au Parti qui insistait sur la nécessité d’une arabisation (en rapport avec la prépondérance de membres arméniens). En 1934, le Parti reprit un journal existant, al‑Duhur (Les Evénements), sous la direction de Salim Khayatah. En outre S. Khayatah contribua à l’organisation du Congrès de la Libération nationale arabe tenu en mars 1934. S. Khayatah fut arrêté quelques mois après et le journal cessa de paraitre.
Le Parti contribua activement à la constitution, en 1935, de la “Ligue anti-nazi et anti-fasciste en Syrie et Liban” (“Usbat Mukafahat al‑Naziyah wa al‑Fashiyah fi Suriya wa Lubnan”), laquelle tint un premier congrès en mai 1939 à Beyrouth.
Les deux branches de Syrie et de Liban restaient au sein d’une seule et même organisation jusqu’à l’indépendance du Liban en 1943 et s’unifièrent de nouveau en 1946, mais furent finalement séparées en 1958 suite à de la fondation de la République Arabe Unie constitué par la Syrie et l’Égypte. Les communistes libanais qui s’opposaient à l’union subirent une répression sévère de la part du gouvernement syrien, et F. al‑Hilu fut assassiné en prison en 1960. Après la dissolution de la RAU en 1961, le Parti communiste syrien se trouvait sous la direction de Kh. Bakdash.
Budeiri, Musa
The Palestine Communist Party 1919‑1948
London, Ithaka Press, 1979
Lockman, Zachary
Comrades and enemies ‑ Arab and Jewish Workers in Palestine, 1906‑1948
Berkeley, CA, University of California Press, 1996
Rucker, Laurent
Staline, Israël et les Juifs
Paris, Presses Universitaires de France, 2001
Greilsammer, Alain (Ilan)
Les Communistes israéliens
Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1978
Notes
[1]. Yosef Berger-Barzilay, membre du secrétariat du Parti, dans un texte de 1926. Musa Budeiri, The Palestine Communist Party 1919‑1948, London, Ithaka Press, 1979, p. 10.
[2]. Idem, p. 57.
[3]. Idem, p. 89.
[4]. Cf. à ce sujet: Bureau Exécutif de l’Internationale Syndicale Rouge, « Aux Ouvriers arabes de Palestine », L’Internationale syndicale rouge, 37‑38, février 1924. A. Bouziam [Wolf Auerbach], « La Palestine contemporaine et son mouvement ouvrier », L’Internationale syndicale rouge, 37‑38, février 1924. Documents reproduits in: Bulletin international, 55‑58, juillet-octobre 1982, Paris, Librairie internationale.
[5]. Zachary Lockman, Comrades and enemies ‑ Arab and Jewish Workers in Palestine, 1906‑1948, Berkeley, CA, University of California Press, 1996. Traduit de l’Anglais par nous.
http://content.cdlib.org/xtf/view?docId=ft6b69p0hf&chunk.id=s1.3.33&toc.depth=1&toc.id=ch3
[6]. Ibid. Traduit de l’Anglais par nous.
[7]. À ne pas confondre avec une autre organisation d’acronyme semblable, l’AWS dirigée par Fakhri al-Nashashibi. Cette Société de Travailleurs Arabes (Arab Workers Society, AWS) fut créée en juillet 1934 à Jérusalem et établit par la suite d’autres branches, notamment à Jaffa.
[8]. À ne pas confondre avec le parti Ihud formé en 1942 par des personnalités juives en Palestine, dans le prolongement du mouvement Brit Shalom.
[9]. M. Budeiri, op. cit., p. 24.
[10]. Cf.: Nadab, « Le Premier congrès arabe en Palestine et la lutte anti-impérialiste dans les pays arabes », L’Internationale communiste, 11, 1930. Document reproduit in: Bulletin international, op. cit.
[11]. Z. Lockman, op. cit., chapitre 4, note 30. Traduit de l’Anglais par nous.
http://content.cdlib.org/xtf/view?docId=ft6b69p0hf&chunk.id=s1.4.37&toc.depth=1&toc.id=ch4
NB (avril 2007): Les passages du tract sont reproduits selon une édition électronique antérieure; ils n’apparaissent plus dans la page Internet indiquée ci-dessus.
[12]. Z. Lockman, op. cit. Traduit de l’Anglais par nous.
http://content.cdlib.org/xtf/view?docId=ft6b69p0hf&chunk.id=s1.5.48&toc.depth=1&toc.id=ch5
[13]. Idem. Traduit de l’Anglais par nous.
http://content.cdlib.org/xtf/view?docId=ft6b69p0hf&chunk.id=s1.4.39&toc.depth=1&toc.id=ch4
http://content.cdlib.org/xtf/view?docId=ft6b69p0hf&chunk.id=s1.6.56&toc.depth=1&toc.id=ch6
[14]. M. Budeiri, op. cit., p. 104.
[15]. Idem, p. 156.
[16]. Idem, p. 163.
[17]. Z. Lockman, op. cit..
http://content.cdlib.org/xtf/view?docId=ft6b69p0hf&chunk.id=s1.7.66&toc.depth=1&toc.id=ch7
[18]. M. Budeiri, op. cit., p. 165.
[19]. Laurent Rucker, Staline, Israël et les Juifs, Paris, Presses Universitaires de France, 2001, p. 115‑116.
[20]. M. Budeiri, op. cit., p. 188.
[21]. Idem, p. 210 et p. 229.
[22]. Idem, p. 233.
[23]. L. Rucker, op. cit., p. 115‑116.
[24]. M. Budeiri, op. cit., p. 233.
[25]. Idem, p. 238.
[26]. Z. Lockman, op. cit.
http://content.cdlib.org/xtf/view?docId=ft6b69p0hf&chunk.id=s1.7.71&toc.depth=1&toc.id=ch7
[27]. Ibid.. Traduit de l’Anglais par nous.
[28]. M. Budeiri, op. cit., p. 194.
[29]. Idem, p. 195.
[30]. Idem, p. 168.
[31]. Alain Greilsammer, Les Communistes israéliens, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1978, p. 128.
[32]. M. Budeiri, op. cit., p. 170.
[33]. Idem, p. 173.
[34]. A. Greilsammer, op. cit., p. 157.
[35]. Idem, p. 104, 116 et 122.
[36]. http://www.jcpa.org/art/knesset2.htm. Traduit de l’Anglais par nous.
[37]. Ibid. Traduit de l’Anglais par nous.
[38]. A. Greilsammer, op. cit., p. 163.
[39]. Ibid.
[40]. L. Rucker, op. cit., p. 147‑148.
[41]. A. Greilsammer, op. cit., p. 186.
[42]. Entretien de Meir Vilner avec l’ambassadeur de l’URSS en Israël, Pavel Erchov, 8 juillet 1950. Cf. L. Rucker, op. cit., p. 192‑193.
[43]. Shmuel Mikunis, « Le combat pour la paix et l’indépendance d’Israël », Rapport politique du comité central pour le 12e congrès. Cité in: A. Greilsammer, op. cit., p. 166‑167.
[44]. A. Greilsammer, op. cit., p. 181.
[45]. http://www.wsws.org/francais/heritage/heritage/chapitre1-35/9dec01_heritage11.shtml
[46]. http://www.pouvoir-ouvrier.org/archives/palest1.html
[47]. http://www.marxists.de/middleast/misc/pal1948.htm. Traduit de l’Anglais par nous.
[48]. http://www.marxists.de/middleast/misc/partition.htm. Traduit de l’Anglais par nous.
[49]. http://www.pouvoir-ouvrier.org/archives/palest2.html
[50]. http://www.marxists.de/middleast/misc/pal1948.htm. Traduit de l’Anglais par nous.
[51]. http://www.pouvoir-ouvrier.org/archives/palest1.html
[52]. http://www.marxists.de/middleast/misc/partition.htm. Traduit de l’Anglais par nous.
[53]. http://www.marxists.de/middleast/misc/pal1948.htm. Traduit de l’Anglais par nous.
[54]. Roger Faligot, Rémi Kauffer, Le croissant et la croix gammée, Paris, Albin Michel, 1990, p. 154.
[55]. http://www.workersliberty.org/node/1745
[56]. A. Greilsammer, op. cit., p. 22.
[57]. Z. Lockman, op. cit.
http://content.cdlib.org/xtf/view?docId=ft6b69p0hf&chunk.id=s1.2.17
[58]. A. Greilsammer, op. cit., p. 30.
[59]. http://www.labournetaustria.at/archiv44.htm
[60]. Au sujet des positions du Parti à cette période, cf.: « Résolution sur la situation politique ‑ adoptée par la séance plénière du CC élargi du PC de Palestine », Correspondance internationale, 29, avril 1924. Document reproduit in: Bulletin international, op. cit.
[61]. Au sujet des orientations du Parti au moment de la révolte arabe de 1929, cf.: Bob, « La Lutte contre la déviation de droite dans le PC de Palestine », Correspondance internationale, 50, juin 1929; Bob, « Le PC de Palestine et l’insurrection arabe », Correspondance internationale, 106, octobre 1929; Secrétariat politique du CE de l’IC, « Résolution sur le mouvement insurrectionnel en Arabistan (adoptée le 16 octobre 1929) », Correspondance internationale, 11‑12, 1930. Documents reproduits in: Bulletin international, op. cit.
[62]. M. Budeiri, op. cit., p. 80‑81 et 85.
[63]. Ce résumé est basé principalement sur: Tareq Y. Ismael & Jaqueline S. Ismael, The Communist Movement in Syria and Lebanon, Gainesville, University Press of Florida, 1998. http://www.upf.com/Fall1998/ismael.html.
[64]. http://www.labournetaustria.at/archiv44.htm
[65]. Cf.: Conférence des représentants du PC de Syrie et du PC de Palestine, « Les Tâches des communistes dans le mouvement national arabe », Correspondance internationale, 1 et 3, février 1933. Document reproduit in: Bulletin international, op. cit.